"Un million d'enfants en sévère malnutrition" L'ONU peine à mobiliser une aide à la mesure de la crise afghane

ATS

31.3.2022 - 22:09

Les Nations unies ont mobilisé jeudi 2,44 milliards de dollars d'aide pour l'Afghanistan lors d'une conférence des donateurs. C'est bien en deçà des fonds espérés pour «mettre fin à la spirale de la mort» dans le pays en proie à une dramatique crise humanitaire.

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KEYSTONE/EPA/HEDAYATULLAH AMID

Keystone-SDA

L'ONU avait saisi la communauté internationale du plus grand appel de fonds jamais lancé pour un seul pays. Elle espérait mobiliser 4,4 milliards de dollars lors de cet événement virtuel co-organisé avec le Royaume-Uni, l'Allemagne et le Qatar, ce qui aurait permis de tripler le montant demandé en 2021.

Dans son discours d'ouverture, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé à une «action immédiate» sans laquelle «nous ferons face à une crise de la faim et de malnutrition en Afghanistan».

Enfants menacés

«Un million d'enfants en sévère malnutrition sont au bord de la mort», avait-il mis en garde. Certains «vendent déjà leurs enfants et des parties de leur corps pour nourrir leur famille». «Le premier pas de toute réponse humanitaire significative doit être d'enrayer la spirale de la mort de l'économie afghane», avait-il plaidé.

Les talibans ont pris le pouvoir en Afghanistan le 15 août, après le retrait précipité des forces étrangères dirigées par les Etats-Unis. La crise humanitaire dans le pays s'est rapidement aggravée depuis.

L'ONU plaide depuis des mois pour un allègement des sanctions occidentales infligées à Kaboul après le retour au pouvoir des insurgés.

«Les pays riches et puissants ne peuvent pas ignorer les conséquences de leurs décisions sur les plus vulnérables», a estimé Antonio Guterres. «La communauté internationale doit trouver des moyens d'épargner le peuple afghan».

Le pays subit en outre sa pire sécheresse depuis des décennies. «La situation est incroyablement fragile», a résumé le coordinateur humanitaire des Nations unies, Martin Griffiths. La vie «ne tient qu'à un fil pour la moitié de la population».

Les femmes «au coeur» de la réponse

Les talibans ont suscité la semaine dernière l'indignation en ordonnant la fermeture des écoles secondaires de filles quelques heures seulement après avoir autorisé leur réouverture pour la première fois depuis leur prise de pouvoir.

Jeudi, les cheffes de la diplomatie britannique et allemande Liz Truss et Annalena Baerbock ont condamné cette fermeture. «Aucun pays ne peut prospérer si la moitié de sa population est laissée de côté», a déclaré Mme Truss, pressant pour que les femmes soient «au coeur» de la réponse humanitaire internationale.

Les avancées pour les femmes ces vingt dernières années en Afghanistan «ne doivent pas fondre comme de la glace au soleil», a insisté son homologue allemande, annonçant que son pays allait fournir 200 millions d'euros d'aide.

Le Royaume-Uni a promis de verser 380 millions de dollars d'aide au cours du prochain exercice financier. Au moins 50% de cette aide serait destinée aux femmes et aux filles. Les Etats-Unis se sont eux engagés à fournir près de 204 millions de dollars d'aide humanitaire.

La Suisse a également dénoncé la fermeture des écoles pour les filles de plus de 12 ans. Ignazio Cassis a considéré cette attitude comme une violation des droits fondamentaux. Demandant aux talibans de se conformer aux droits humains, le président de la Confédération a annoncé une aide de 30 millions de francs d'ici la fin de l'année et autant pour l'année prochaine.

«Ne pas abandonner» l'Afghanistan

Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères du Qatar, Majed Al-Ansari, a déclaré qu'il était important pour les talibans d'entendre de la part du monde musulman que «les enseignements de l'islam ne confinent pas les femmes».

«Nous devons condamner très fermement et parler très clairement aux talibans de toute violation des droits humains, mais nous ne devons pas non plus abandonner l'Afghanistan. Nous avons abandonné l'Afghanistan une fois et nous savons quel en a été le résultat», a-t-il ajouté.

Déjà début mars, lors d'une conférence des donateurs similaire pour le Yémen, l'ONU n'avait mobilisé que 1,3 milliard de dollars, loin des 4,27 milliards espérés.