Paix et sécurité menacées L'UE veut se doter d'une «liste noire» sanctionnant la corruption

ATS

3.5.2023 - 14:31

La Commission européenne a présenté mercredi ses propositions pour harmoniser les dispositions pénales anticorruption à travers l'UE. Elle veut aussi ajouter à la «liste noire» des sanctions européennes les auteurs d'actes de corruption où que ce soit dans le monde.

Quatre commissaires européens sont venus présenter à la presse les mesures de lutte contre la corruption.
Quatre commissaires européens sont venus présenter à la presse les mesures de lutte contre la corruption.
ATS

Keystone-SDA

«Nous envoyons un message clair: l'UE n'est pas ouverte à ceux qui se livrent à la corruption, où qu'elle se produise», a souligné le chef de la diplomatie de l'UE, Josep Borrell, lors d'une conférence de presse.

«La corruption peut menacer la paix et la sécurité internationale, alimenter le crime organisé, le terrorisme et d'autre crimes. C'est pourquoi nous élargissons notre champ d'action pour lutter contre la corruption dans le monde entier», a-t-il ajouté.

Gel des avoirs

Selon le cadre législatif proposé, qui doit encore être approuvé par les Vingt-Sept, ces personnes considérées comme impliquées dans «des activités graves de corruption», quelle que soit leur nationalité, pourraient voir geler leurs avoirs dans l'UE et être interdites de séjour sur le sol européen. De même, ils se verraient privés d'accès aux ressources financières d'individus ou entités dans l'UE.

Ce mécanisme vise la corruption passive ou active, le détournement de fonds par un agent public, en particulier dans les pays jugés non-coopératifs en matière fiscale ou défaillants dans la lutte contre le blanchiment de capitaux, et le financement du terrorisme.

Ce serait un «système similaire» aux régimes de sanctions adoptés, par exemple, contre les personnalités russes impliquées dans l'invasion de l'Ukraine et placées sur la «liste noire» de l'UE. La différence est qu'"il ne s'agit plus de cibler un Etat tiers spécifique» mais des individus quels qu'ils soient, a observé la vice-présidente de la Commission Vera Jourova.

«Loi Magnistki»

Ce dispositif s'apparente à la «loi Magnistki» des Etats-Unis, d'abord adoptée en 2012 pour sanctionner des Russes accusés d'être impliqués dans la mort en détention à Moscou d'un avocat dénonçant la corruption, puis élargie en 2016 à tous les suspects de violation des droits humains ou d'actes importants de corruption à travers le monde.

Fin 2020, l'UE s'était déjà dotée de la capacité de sanctionner les auteurs de «graves violations des droits de l'homme» partout dans le monde.

En pratique, le placement d'une personne sur cette nouvelle liste noire anticorruption serait formellement proposé par le chef de la diplomatie de l'UE. Il devrait être avalisé à l'unanimité des Vingt-Sept.

«Nous ne pouvons pas cibler tous ceux qui sont corrompus dans les pays tiers. Il y a toujours un certain degré d'appréciation politique», mais pour lister quelqu'un, «il faudra des informations montrant que cette personne s'est livrée à un acte grave de corruption», qu'il s'agisse de sources ouvertes (médias, déclarations publiques...), de rapports d'universitaires ou d'ONG, d'informations recueillies par les services de renseignements des Etats membres, précise-t-on à la Commission.

La personne visée pourra contester la décision devant la justice européenne.