«Entre nos mains» La pandémie en 2022: bruit de fond ou résurgence?

ATS

2.12.2021 - 07:42

Après deux ans de pandémie, le Covid-19 pourrait être dompté. Mais l'incapacité de la communauté internationale à distribuer équitablement les vaccins, risque au contraire de prolonger, voire d'aggraver en 2022, la crise qui a déjà emporté des millions de personnes.

2.12.2021 - 07:42

Partout dans le monde, se sont répétées les mêmes scènes de patients intubés ou alités dans les couloirs faute de place, pris en charge par des soignants épuisés. Et, dans les rues de pays comme le Brésil ou encore l'Indonésie, celles de queues interminables de proches à la recherche d'oxygène. (image d'illustration)
Partout dans le monde, se sont répétées les mêmes scènes de patients intubés ou alités dans les couloirs faute de place, pris en charge par des soignants épuisés. Et, dans les rues de pays comme le Brésil ou encore l'Indonésie, celles de queues interminables de proches à la recherche d'oxygène. (image d'illustration)
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Malgré l'explosion de cas que connaît l'Europe au début de l'hiver, de nombreux experts en santé publique jugent que le monde a désormais les outils et le savoir-faire pour maîtriser le virus. Encore faut-il que populations et pouvoirs politiques acceptent de faire parfois des choix difficiles et souvent contestés.

«L'évolution de cette pandémie est entre nos mains», martèle Maria Van Kerkhove, chargée de la lutte contre le Covid-19 à l'OMS et qui est en première ligne depuis l'apparition de la maladie à la fin 2019 en Chine. Sommes-nous en mesure «d'atteindre un stade où nous contrôlerons la transmission en 2022? Absolument!», lance t-elle, et d'accuser: «Nous aurions déjà pu y arriver, mais nous ne l'avons pas fait».

Pénurie d'oxygène

Un an après leur arrivée sur le marché, des vaccins ont prouvé leur efficacité contre les formes les plus graves de la maladie, à défaut d'empêcher complètement la transmission du variant Delta à la contagiosité redoutable. La production mondiale de sérums devrait atteindre 24 milliards de doses en juin. Théoriquement, bien assez pour immuniser la population mondiale.

Pour l'heure, 7,5 milliards de doses ont déjà été injectées, mais surtout dans les pays riches, où on veut vacciner d'abord les enfants et donner des doses de rappel, malgré les discours de solidarité avec les pays pauvres, où le taux de vaccination reste trop faible.

Partout dans le monde, se sont répétées les mêmes scènes de patients intubés ou alités dans les couloirs faute de place, pris en charge par des soignants épuisés. Et, dans les rues de pays comme le Brésil ou encore l'Indonésie, celles de queues interminables de proches à la recherche d'oxygène.

Les images des centaines de bûchers improvisés pour incinérer les morts du Covid-19 en Inde, ont incarné l'ampleur de la perte en vies humaines: officiellement plus de 5,1 millions mais peut-être deux ou trois fois plus, selon l'OMS.

Faire partie des meubles

Aucun pays n'a été autant affecté que les Etats-Unis, où presque 800'000 personnes sont mortes. Le flot constant de brèves nécrologies sur le compte @FacesofCovid ramène ce nombre impersonnel à de brefs instantanés de vie: «Christopher Mehring, 56, de Dillon, Montana, mort du covid le 2 Nov. 2021 [...] Les mots sont impuissants à décrire son amour pour ses petits-enfants».

En Europe, en cette fin d'année 2021, la 5e vague a commencé à déferler avec violence, forçant une fois encore les Etats à jongler entre nouvelles libertés et restrictions. Pendant ce temps, le mouvement anti-vaccins et anti-certificats Covid se sont radicalisés: des émeutes ont éclaté notamment aux Pays-Bas et en France, en Guadeloupe.

Pourtant, les experts estiment que l'étape de «pandémie», pourrait bientôt être surmontée. À l'instar de la grippe, le monde pourrait continuer à cohabiter avec le virus, devenu une maladie endémique mais largement maîtrisée, faisant «partie des meubles», assure à l'AFP Andrew Noymer, un épidémiologiste de l'université de Californie Irvine.

Pour le conseiller de la Maison-Blanche sur le coronavirus, Anthony Fauci, grâce à la vaccination, la maladie «sera un bruit de fond plus ou moins fort, mais qui ne nous dominera pas comme elle le fait maintenant».

Tout le monde ou personne

Mais l'inégalité d'accès aux vaccins reste un défi et vient s'agréger aux déséquilibres pré-existants entre pays nantis et démunis. Dans le premier groupe le taux de vaccination atteint en moyenne 65% quand dans le second on tourne à moins de 7%, selon des chiffres de l'ONU.-

Or, comme le répète à l'envi le chef de l'OMS Tedros Adhanom Ghebreyesus: «Personne n'est en sécurité tant que tout le monde ne l'est pas». En clair, plus le virus circule plus la probabilité d'émergence d'un variant plus contagieux, plus mortel, voire résistant aux vaccins, est élevée.

Autant de craintes soulevées par l'apparition ce mois-ci d'Omicron, un variant classé «préoccupant» par l'OMS et d'abord détecté en Afrique australe. Si l'organisation, estime que le risque lié à ce mutant est «très élevé», elle reconnaît aussi que, pour l'heure, on ne sait que peu de choses sur sa dangerosité, sa transmissibilité et surtout sa résistance aux vaccins.

Les pays riches feraient preuve «de myopie, en pensant qu'en se vaccinant eux-mêmes, ils se sont débarrassés du problème», a souligné Gautam Menon, professeurs de biologie et de physique à l'université d'Ashoka en Inde.

Scénario-catastrophe

Pire, un scénario-catastrophe hypothétique récemment élaboré par l'OMS en guise d'avertissement envisage une pandémie de Covid-19 hors de contrôle provoquée par des mutations de plus en plus dangereuses, doublée d'une autre pandémie de type Zika.

Dans ce scénario, la confusion, la désinformation et les crises migratoires déclenchées par les maladies réduisent à néant la confiance dans les autorités politiques et scientifiques, tandis que les systèmes de soins s'effondrent.

Un cas de figure d'autant plus inquiétant «que nous avons un virus à l'origine d'une pandémie en ce moment et de nombreux candidats pour la suivante», a reconnu Michael Ryan, directeur de l'OMS pour les situations d'urgence. Quelle que soit la manière dont le Covid-19 va évoluer, «il est clair que nous ne pourrons jamais nous démobiliser», a-t-il ajouté.

ATS