Le dialogue politique libyen prévu dès mercredi à Genève toussote avant même de démarrer, les deux camps rivaux suspendant leur participation. Mais l'ONU a annoncé lundi que les discussions militaires avaient abouti à un projet d'accord de cessez-le-feu.
Dans la soirée, les Parlements aussi bien du camp du gouvernement d'union nationale (GNA), reconnu par la communauté internationale, que de celui de l'Est du pays qui soutient le maréchal Khalifa Haftar ont annoncé leur défection pour mercredi. Le premier parce qu'il attend des avancées dans les discussions militaires et le second parce que sa délégation de 13 représentants aux pourparlers politiques n'a pas été entièrement validée par la mission de l'ONU en Libye (MANUL).
Au total, 13 membres des deux camps étaient attendus, de même qu'un nombre quasiment similaire de représentants désignés par l'émissaire de l'ONU Ghassan Salamé. Pour autant, le dialogue démarrera bien mercredi. «De nombreux participants sont déjà arrivés à Genève et nous espérons que tous les (autres) participants invités emboîteront le pas», a déclaré à l'AFP un porte-parole de la MANUL.
Faciliter le retour des civils
Quelques heures auparavant, la mission onusienne avait pourtant fait état d'une petite avancée au terme, dimanche, de la seconde série de discussions indirectes de la Commission militaire conjointe constituée de hauts responsables à parts égales entre les deux camps.
Un projet d'accord de cessez-le-feu a été préparé pour «faciliter le retour sûr des civils dans leurs zones», a précisé la MANUL. En cas d'arrangement, celle-ci serait chargée de surveiller le cessez-le-feu avec la Commission militaire conjointe. Les deux parties au conflit libyen devront maintenant présenter le projet à leurs dirigeants. Elles devront ensuite finaliser en mars l'arrangement en préparant les comités chargés de l'application.
Mais en marge de ces discussions, la situation reste tendue. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a confirmé vendredi pour la première fois que des membres de l'Armée nationale syrienne (ANS) pro-Ankara soutenait le GNA. Aux côtés de ces miliciens syriens, sont également présents des «ressortissants turcs», a insisté lundi devant la presse à Genève le chef de la diplomatie libyenne Mohamed Syala. «Tant que les civils seront en danger, ils seront là».
Photos de jeunes tués
Il affirme que le GNA «ne voit pas de raison de retirer ses forces». Alors que le gouvernement exige lui le déplacement de celles de Khalifa Haftar, qui se trouvent à quelques kilomètres de Tripoli. «Ils peuvent actuellement s'attaquer quand ils veulent» à la capitale, a encore expliqué M. Syala.
Devant le Conseil des droits de l'homme, le chef du GNA a lui appelé les Etats qui mènent une «guerre par truchement» en Libye à la responsabilité. Sans mentionner nommément la Russie dont des mercenaires se trouvent au côté de Khalifa Haftar.
Ceux qui financent l'acheminement d'armes en Libye «doivent être tenus pour responsables», a insisté le dirigeant qui a ciblé l'inaction de la communauté internationale. L'ONU a dénoncé à de nombreuses reprises les violations de l'embargo sur les armes, y compris après la récente conférence internationale de Berlin en janvier.
Le chef du GNA Fayez al-Sarraj a accusé les forces liées à l'homme fort de l'Est libyen de violations du droit international humanitaire (DIH) la semaine dernière dans le bombardement d'infrastructures portuaires à Tripoli. Il a montré à la tribune des photos de jeunes tués par ces violences. Il avait temporairement suspendu la participation de son camp aux discussions militaires indirectes, avant de reprendre celle-ci le lendemain.
Appel suisse à des clarifications
«Certains ne souhaitent pas» que les Libyens aient accès aux droits humains, a insisté M. Sarraj. Et il a déploré aussi que la production pétrolière soit bloquée par certaines communautés. Il reproche aussi à la communauté internationale de ne pas être intervenue pour l'ouverture des champs et des ports.
La Suisse souhaite elle avant tout un «cessez-le-feu», a déclaré à Keystone-ATS le conseiller fédéral Ignazio Cassis. Favorable à un mécanisme d'investigations, elle veut que les responsabilités des violations des droits humains soient «clarifiées». «La Libye reste un potentiel incendie», a ajouté M. Cassis.
Depuis l'augmentation des violences il y a près d'un an, les affrontements ont fait des milliers de victimes, selon la MANUL. Des centaines de civils ont également été blessés.
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