Verdict dimancheLe Mexique sur le point d'élire sa première présidente
hl
31.5.2024 - 08:29
Près de 100 millions d'électeurs sont appelés aux urnes dimanche au Mexique pour désigner la très probable première présidente du pays. La violence n'a pas épargné la campagne.
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31.05.2024, 08:29
ATS
«Ce 2 juin nous allons entrer dans l'histoire», a lancé la favorite, la candidate de la gauche au pouvoir Claudia Sheinbaum, mercredi lors de son rassemblement de fin de campagne devant des dizaines de milliers de personnes à Mexico.
«C'est le temps des femmes et de la transformation. Cela signifie vivre sans peur et libres de la violence», a-t-elle ajouté à l'attention des Mexicaines, qui dénoncent à l'unisson une société machiste.
L'ex-maire de Mexico «me paraît être une femme très préparée, une femme intelligente», déclare l'une de ses partisanes, Beatriz Cruz Ochoa, 56 ans, qui travaille dans les transports. «Elle a amélioré la sécurité de la capitale».
Portée par la popularité du président sortant Andres Manuel Lopez Obrador, Mme Sheinbaum, 61 ans, a constamment devancé dans les sondages sa rivale de centre-droit Xochitl Galvez, 61 ans également.
Mme Sheinbaum est créditée de 53% des intentions de vote, contre 36% pour Mme Galvez, d'après la moyenne des enquêtes réalisées par la société Oraculus.
«Impunité»
Cheffe d'entreprise issue d'un milieu modeste, Mme Galvez a attaqué sa rivale sur le bilan sécuritaire du gouvernement sortant, parlant de «186'000 personnes assassinées et 50'000 personnes disparues» depuis le début du mandat du président Andres Manuel Lopez Obrador en décembre 2018.
«Nous avons vu beaucoup de crimes et le parquet ne fait rien. Il y a de l'impunité», se plaint Rosa Maria Miranda, femme au foyer de 61 ans, en sortant d'une réunion de campagne de l'opposition à Mexico.
La campagne a été entachée par l'assassinat de 24 candidats à des mandats locaux, d'après les chiffres officiels.
Mercredi, Alfredo Cabrera, candidat à la mairie de Coyuca de Benítez (Guerrero, sud) a été tué de plusieurs balles tirées dans le dos, une scène captée par une caméra vidéo.
Loin derrière les deux favorites, le candidat centriste Jorge Alvarez Maynez, 38 ans, fait figure d'outsider pour cette élection à un tour (12% des intentions de vote selon Oraculus).
Sa campagne a été endeuillée par l'effondrement d'un écran géant lors d'un meeting à Monterrey (neuf morts, des dizaines de blessés).
Claudia Sheinbaum s'est engagée à poursuivre les politiques sociales du président sortant et de son Mouvement pour la Régénération nationale (Morena).
Pendant son gouvernement, 8,9 millions de personnes sont sorties de la pauvreté qui touche encore 36,3% des 129 millions de Mexicains, selon le Conseil national pour l'évaluation de la politique de développement social (CONEVAL).
Majorité?
La présidentielle est le principal enjeu mais pas le seul des plus grandes élections jamais organisées au Mexique, avec également le renouvellement du Congrès et du Sénat, l'élection des gouverneurs dans neuf Etats sur 32, et d'une myriade d'élus locaux. En tout, 20.000 postes sont à pourvoir.
Première interrogation: si elle est élue présidente, l'ex-maire de Mexico va-t-elle encore disposer d'une majorité au Congrès et au Sénat? D'une majorité simple ou plus élargie?
Deuxième question: la gauche va-t-elle conserver son fief depuis 25 ans, la capitale du Mexique, dirigée par Claudia Sheinbaum de 2018 à 2023, et par le président sortant Lopez Obrador dans les années 2000?
«La perte de Mexico donnerait l'impression que Morena a été touchée» et «Claudia serait affaiblie d'entrée», affirme à l'AFP Jorge Zepeda Patterson, éditorialiste respecté.
Aux élections intermédiaires de 2021, Morena avait perdu la majorité absolue au Congrès et six des 16 districts de Mexico.
Troisième inconnue: qui sera l'interlocuteur de la «presidenta» aux Etats-Unis, avec qui le Mexique entretient une relation bilatérale d'une intensité sans égale (commerce, migration, lutte contre le trafic de drogues et d'armes)?
Avec Trump ou Biden?
La future présidente, qui prendra ses fonctions le 1er octobre, devra attendre la réponse jusqu'au 5 novembre, date du «match retour» annoncé entre le président démocrate Joe Biden et l'ex-président républicain Donald Trump, dont l'impact politique de la condamnation prononcée jeudi reste encore à déterminer.
«Je pense que nous aurons de bonnes relations, que cela soit avec Trump ou Biden. Ils ont besoin de nous. Nous avons besoin d'eux», a déclaré Claudia Sheinbaum à des journalistes étrangers dont l'AFP mi-mai.
L'élection au Mexique va marquer le retrait du président sortant Andres Manuel Lopez Obrador, qui a installé la gauche au pouvoir.
En rupture avec le tout-répressif, il a choisi de s'attaquer aux causes de la délinquance, avec des programmes sociaux à destination des jeunes. Claudia Sheinbaum veut poursuivre cette politique, tout en luttant contre «l'impunité».
La présidente trouvera un pays dont l'économie devrait croître de 2,2%, portée par le retour des usines le long de la frontière avec les Etats-Unis et l'augmentation du salaire minimum.
«Les exportations soutiendront la croissance en 2025 (...) L'inflation continuera à descendre peu à peu vers les 3,1% en 2025», d'après l'OCDE.