Il entend «gronder» les nationalismes Le pape appelle à «retrouver l'âme européenne»

ATS

28.4.2023 - 14:48

Le pape François a appelé vendredi à «retrouver l'âme européenne» et dénoncé «l'infantilisme belliqueux» sur fond de montée des nationalismes et de guerre en Ukraine, au premier jour de sa visite en Hongrie.

Le pape François en visite chez le premier ministre hongrois Viktor Orban (à g.).
Le pape François en visite chez le premier ministre hongrois Viktor Orban (à g.).
KEYSTONE/EPA/LUCA ZENNARO

Le pape François, arrivé vendredi en Hongrie pour une visite de trois jours, a appelé à «retrouver l'âme européenne» face à «l'infantilisme belliqueux» sur fond de montée des nationalismes et de guerre en Ukraine.

Dans les rues de la capitale, placée sous haute sécurité, le jésuite argentin, 86 ans, a été accueilli par des habitants agitant des drapeaux de la Hongrie et du Vatican. Il y passera la totalité de son séjour en raison de sa santé fragile, qui sera observée de près, un mois après son hospitalisation.

Dans son premier discours prononcé dans ce pays d'Europe centrale frontalier de l'Ukraine, le pape a déploré «le triste déclin du rêve choral de paix, tandis que les solistes de la guerre prennent la place».

«Les nationalismes grondent»

«Les nationalismes recommencent à gronder», a-t-il souligné, jugeant que la politique internationale «régresse vers une sorte d'infantilisme belliqueux». «Dans ce moment historique, l'Europe est fondamentale (...) Il est donc essentiel de retrouver l'âme européenne», a insisté le souverain pontife.

Exception au sein de l'Union européenne, la Hongrie n'a pas coupé ses liens avec le Kremlin. M. Orban se garde de critiquer le président russe et refuse d'envoyer des armes à Kiev.

De son côté, le pape condamne l'"agression» de l'Ukraine «martyrisée» mais le Saint-Siège tente de maintenir tant bien que mal un dialogue avec Moscou, bien que sa tentative de médiation n'ait pas abouti jusqu'ici.

«Colonisations idéologiques»

Quelques minutes plus tôt, le pape s'est entretenu avec M. Orban pendant une vingtaine de minutes, une rencontre à huis clos au cours de laquelle le Premier ministre a insisté sur la chrétienté «vectrice de paix», selon l'agence de presse MTI.

Pour le dirigeant de 59 ans, qui a à coeur de promouvoir la «civilisation chrétienne», la venue du pape deux ans à peine après une escale de sept heures à Budapest apparaît comme un succès diplomatique.

«Je suis heureux, tous les yeux sont rivés sur la Hongrie», a confié à l'AFP Laszlo Temesi, un journaliste retraité présent sur le convoi du pape dans l'espoir de l'apercevoir.

Dans ce pays de 9,7 millions d'habitants, dont quelque 39% de catholiques selon les derniers chiffres datant de 2011, Viktor Orban et ses partisans sont soucieux de mettre en avant les points communs avec le chef de l'Eglise catholique.

Dans son discours, le pape a aussi salué les valeurs chrétiennes traditionnelles portées par le gouvernement hongrois, notamment à travers ses «politiques efficaces pour la natalité et la famille».

Il a fustigé au passage les «colonisations idéologiques qui éliminent les différences, comme dans le cas de ladite culture du genre» et l'"échec tragique» de l'avortement.

«Ouverture aux autres»

Jorge Bergoglio a toutefois rappelé à la Hongrie son devoir d'accueil envers les migrants, insistant sur la «nécessité d'ouverture aux autres» face à la tendance «à se replier sur soi-même».

«Les valeurs chrétiennes ne peuvent être témoignées à travers la rigidité et les fermetures», a-t-il mis en garde, alors que la Hongrie a érigé des clôtures à ses frontières et restreint le dépôt des demandes d'asile aux ambassades à l'étranger, s'attirant plusieurs condamnations de la Cour de justice de l'UE.

Fervent défenseur des droits des réfugiés, le pape, lui, ne cesse de plaider pour un accueil bienveillant et une juste répartition au sein de l'Union européenne.

Conscient des enjeux diplomatiques de cette visite très attendue, François s'est présenté en «ami et frère de tous», tandis que les autorités ont insisté sur le caractère spirituel de cette visite, assurant qu'il ne s'agissait pas d'un «évènement politique».

Dans l'après-midi, l'évêque de Rome s'adressera au clergé local à la basilique Saint-Etienne, devant laquelle des écrans géants et des chaises ont été installés.

Pour son 41e voyage international depuis son élection en 2013, il rencontrera également des personnes pauvres, des jeunes, des représentants du secteur universitaire et culturel et présidera dimanche une messe en plein air.

Malgré son âge avancé et ses douleurs au genou l'obligeant à se déplacer avec une canne ou en fauteuil roulant, le chef de l'Eglise catholique continue de voyager. Il est le deuxième pape à se rendre en Hongrie, après les visites de Jean Paul II en 1991 et 1996.