Corée du Sud Le président Yoon promet des réformes après la déroute électorale

ATS

10.4.2024 - 23:18

Le président sud-coréen Yoon Suk Yeol a promis jeudi des «réformes», après des élections législatives désastreuses pour les conservateurs qui ont renforcé la mainmise de l'opposition sur le Parlement.

En outre, le chef du Parti du pouvoir au peuple (PPP) Han Dong-hoon, le Premier ministre Han Duck-soo et une série de collaborateurs de haut rang ont présenté leur démission, ont indiqué les médias locaux.

«Je vais humblement honorer la volonté du peuple exprimée lors des élections générales, réformer les affaires de l'Etat et faire de mon mieux pour stabiliser l'économie et les moyens de subsistance de la population», a déclaré M. Yoon, selon son chef de cabinet, Lee Kwan-sup.

Le principal parti d'opposition de Corée du Sud a remporté les élections législatives, selon des résultats presque complets, a rapporté jeudi l'agence Yonhap, un coup dur pour le président conservateur Yoon Suk Yeol.

Selon les résultats presque définitifs du scrutin de mercredi communiqués par la Commission électorale nationale, le PPP conservateur de M. Yoon et son allié sont passés de 114 à 108 sièges au Parlement. Les grands gagnants sont le Parti démocratique (PD) de Lee Jae-myung et ses alliés, qui ont vu leur nombre de sièges grimper à 174, contre 156 dans la précédente législature.

Le parti Reconstruire la Corée, fondé il y a quelques semaines par l'ancien ministre de la Justice Cho Kuk, visé par des accusations de corruption qu'il nie, a profité du mécontentement à l'égard des deux principaux partis pour obtenir 12 sièges. Le triomphe de l'opposition a toutefois été moins important que ne le laissaient supposer les sondages de sortie des urnes, tous les partis d'opposition réunis n'ayant pas atteint la super-majorité de 200 sièges à l'Assemblée nationale, qui en compte 300.

«Le peuple a gagné»

«Le peuple a gagné, la volonté de juger Yoon Suk Yeol est très claire», a déclaré M. Cho après le vote, ont rapporté les médias locaux. Pour l'analyste politique Yum Seung-yul, «les chiffres d'aujourd'hui montrent la forte colère des gens contre Yoon pour ses deux années de gouvernance».

«Et s'il ne changeait pas, même avec ce résultat édifiant aux élections? Je pense qu'il y aura encore plus de colère publique et cela m'inquiète», a-t-il ajouté auprès de l'AFP. Elu de justesse en 2022 face à M. Lee, M. Yoon a mené une politique de fermeté à l'égard de la Corée du Nord tout en renforçant l'alliance de son pays avec les Etats-Unis et en se rapprochant du Japon, ancienne puissance coloniale avec laquelle les querelles historiques sont nombreuses.

Mais l'absence de majorité parlementaire l'a déjà empêché de mettre en oeuvre son programme de droite, et depuis le début de sa présidence, sa cote de popularité n'a jamais décollé, restant souvent autour de 30%.

Lee Jae-myung, englué dans une série d'enquêtes pour corruption qu'il estime motivées par des considérations politiques, peut désormais savourer sa revanche, obtenue au terme d'une campagne électorale ultrapolarisée et haineuse. Le résultat du scrutin le met en bonne position pour retenter sa chance à la présidentielle de 2027.

«Je regarderai le choix du peuple avec un coeur humble», a déclaré M. Lee après le vote, cité par les médias locaux. A l'Assemblée nationale à Séoul, où les députés et autres responsables se sont rassemblés mercredi pour la soirée électorale, l'humeur était sombre dans les rangs du PPP, tandis que des cris de joie et des applaudissements fusaient du côté des démocrates.

La démographie jouait pourtant en faveur de M. Yoon, les électeurs âgés de plus de soixante ans, réputés plus conservateurs, étant plus nombreux que les plus jeunes, dont beaucoup disent se sentir abandonnés par la classe politique.

«Emprisonner» et «punir»

«Les gens autour de moi s'intéressent nettement moins à ces élections que la dernière fois. Je pense que c'est parce qu'ils se sentent plutôt déçus», a relevé Kim Yong-ho, 24 ans, propriétaire d'une entreprise, à l'extérieur d'un bureau de vote dans le district de Gwangjin, à Séoul.

Le ton de la campagne a également rebuté de nombreux électeurs. Le débat politique de fond a été inexistant, remplacé par des appels à «emprisonner» M. Lee ou à «punir» M. Yoon, des discours haineux et une désinformation en ligne qui, redoutent les experts, pourrait conduire à d'autres agressions physiques comme celle dont M. Lee a été victime en janvier.

«J'ai vraiment honte de la politique et du gouvernement de notre pays», souffle Kim Do-kyung, 47 ans, militante pour les femmes migrantes et leurs enfants.