Le Sénat américain a infligé jeudi un camouflet à Donald Trump. Il a voté à une large majorité sur un amendement critiquant sa décision de retirer les troupes de Syrie, signe du fort malaise dans les propres rangs républicains du président.
Ce texte «exprime le sentiment du Sénat que les Etats-Unis font actuellement face à des menaces venant de groupes terroristes opérant en Syrie et en Afghanistan et qu'un retrait précipité des Etats-Unis pourrait mettre en danger les progrès obtenus à dure peine, ainsi que la sécurité nationale».
Les sénateurs ont voté par 68 voix contre 23 pour mettre un terme aux débats sur cet amendement, qui devrait donc être ajouté à une loi sur la sécurité au Moyen-Orient. Fait marquant, c'est le chef républicain Mitch McConnell, qui évite d'ordinaire de critiquer publiquement Donald Trump, qui avait présenté cet amendement.
L'EI pas encore vaincu
Pour cet habile tacticien, il s'agissait de «permettre aux sénateurs de dire publiquement ce que les Etats-Unis devraient faire en Syrie et en Afghanistan», a-t-il expliqué jeudi. Le groupe «Etat islamique (EI) et Al-Qaïda n'ont pas encore été vaincus», a-t-il souligné, en contradiction directe avec le président. «La sécurité nationale américaine nécessite un engagement continu dans nos missions là-bas».
M. Trump avait soudainement annoncé en décembre le retrait des soldats américains de Syrie, affirmant alors que l'EI avait été vaincu. Et il ne fait pas mystère de son intention de quitter dès que possible l'Afghanistan, après 17 ans de conflit.
Sa décision sur la Syrie a provoqué le départ de son ministre de la Défense Jim Mattis et semé le désarroi chez les alliés européens et kurdes des Etats-Unis.
«C'est une mauvaise idée», s'est indigné le sénateur républicain Marco Rubio lors d'un discours dans l'hémicycle avant le vote. «Cette simple annonce a sapé notre crédibilité aux yeux de nos alliés».
Retournez «à l'école»
A part certains parlementaires non-interventionnistes, le malaise est profond dans les rangs républicains, qui ont en plus été outrés cette semaine par la sonnante critique de Donald Trump à l'encontre des chefs de ses propres services de renseignement.
Mardi, devant le Sénat, la directrice de la CIA Gina Haspel et le directeur du renseignement Dan Coats, tous les deux nommés par Donald Trump, avaient dressé un tableau des grandes menaces mondiales reflétant un désaccord marqué avec l'analyse du locataire de la Maison Blanche sur la Syrie, la Corée du Nord ou encore l'Iran.
Une évaluation qui leur a valu le lendemain une volée de bois vert de la part du président: «Les membres des services de renseignement devraient peut-être retourner à l'école!», a-t-il tweeté, les qualifiant de «naïfs».
Loin de Twitter
«Je préférerais que le président reste à distance de Twitter, particulièrement lorsqu'il s'agit de ces questions importantes de sécurité nationale, pour lesquelles nous avons des experts qui ont l'expérience et sont des professionnels», a tancé sur CNN le nouveau numéro deux de la majorité républicaine au Sénat, John Thune.
L'amendement de M. McConnell complète un projet de loi qui envisage notamment de nouvelles sanctions contre la Syrie et protégerait les autorités locales américaines décidant de ne pas travailler avec des entreprises boycottant Israël.
Ce projet doit être soumis à un premier vote de procédure au Sénat et, in fine, devra être examiné par la Chambre des représentants aux mains des démocrates.
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