«Paroles de vérité» Les Chinois louent les «très bonnes idées» de Macron sur Taïwan

ATS

12.4.2023 - 11:30

A rebours du tollé provoqué en Occident, les Chinois ne tarissent pas d'éloges sur les «très bonnes idées» d'Emmanuel Macron qui appelle l'UE à ne pas être «suiviste» des Etats-Unis sur la question de Taïwan. De son côté, l'île espère que la France s'engagera davantage à ses côtés.

«Certains pays ne veulent pas voir que d'autres deviennent indépendants et autonomes», a souligné mercredi devant la presse un porte-parole de la diplomatie chinoise, Wang Wenbin. (archives)
«Certains pays ne veulent pas voir que d'autres deviennent indépendants et autonomes», a souligné mercredi devant la presse un porte-parole de la diplomatie chinoise, Wang Wenbin. (archives)
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L'île fait l'objet d'une âpre rivalité entre Pékin, qui revendique sa souveraineté sur ce territoire, et Washington, principal allié et fournisseur d'armes de Taïwan. Lors de son voyage en Chine, le président français a déclaré au site américain Politico et au quotidien Les Echos que l'Europe ne devrait pas s'aligner sur les Etats-Unis ou sur la Chine en cas de conflit à propos de Taïwan.

Ces commentaires, publiés après son retour à Paris, sont «manifestement le fruit d'une observation et d'une réflexion de longue date», estime mardi le Global Times, un quotidien proche du pouvoir chinois. Et d'évoquer des «paroles de vérité».

«Une fausse Europe»

«Certains veulent construire une fausse Europe dans l'opinion publique, et masquer les véritables voix et intérêts» des Européens, fustige le journal.

En cas de conflit à Taïwan, «la pire des choses serait de penser que nous, Européens, devrions être suivistes» et «nous adapter au rythme américain et à une surréaction chinoise», a estimé Emmanuel Macron, plaidant pour une «autonomie stratégique» de l'Union Européenne.

Ces propos, publiés dimanche au moment où la Chine simulait des bombardements ciblés contre Taïwan, ont semé le trouble en Occident. L'ancien président américain Donald Trump a ainsi accusé Emmanuel Macron de «lécher le cul» de la Chine.

Contre «une nouvelle guerre froide»

Pékin a dit ne «pas être surpris» par ces réactions. «Certains pays ne veulent pas voir que d'autres deviennent indépendants et autonomes», a souligné mercredi devant la presse un porte-parole de la diplomatie chinoise, Wang Wenbin. «Au contraire, ces pays essaient toujours de les soumettre à leur propre volonté», a-t-il ajouté sans préciser à quels pays il faisait référence.

Cette prise de position du chef de l'Etat français «s'avérera être une brillante décision» car elle traduit «une opposition à une nouvelle Guerre froide», salue le journaliste Chen Weihua, correspondant à Bruxelles du China Daily, un quotidien officiel publié en anglais.

Pour autant, il est «irréaliste» de penser que la France se rangera au côté de la Chine en cas de conflit avec les Etats-Unis, prévient l'influent Hu Xijin, ancien rédacteur en chef du Global Times et héraut du nationalisme chinois. L'Europe et les Etats-Unis «ont des valeurs communes et sont liés par l'Otan», avertit-il.

Manifester son soutien

Le représentant de Taïwan à Paris a de son côté estimé que «toutes ces réactions montrent combien la voix de la France compte pour la stabilité et la paix dans la région». Et «nous espérons que la France puisse jouer un rôle encore plus positif et s'engager davantage», a ajouté Chihchung Wu sur Radio classique.

Il a souligné qu'il ne s'agissait pas nécessairement de participer activement sur le plan militaire: «nous ne sommes pas naïfs, nous ne sommes pas là à espérer que la France envoie l'armée à Taïwan, que la France va mourir pour Taïwan».

Mais il a noté qu'il y avait «plusieurs façons» de manifester son soutien. Et de citer l'exemple de la guerre en Ukraine: la France envoie des canons Caesar quand Taiwan a cessé d'exporter ses semi-conducteurs à la Russie.

«Taïwan a besoin de la France», a affirmé mercredi le représentant de Taipei en France, soulignant que chaque pays avait «un rôle à jouer» pour éviter une guerre avec la Chine.

Un «axe» de pays autoritaires

Il a enfin souligné que ce n'est pas parce que Emmanuel Macron n'a pas publiquement déclaré avoir discuté de certains sujets sensibles, dont Taïwan, qu'il ne les a pas abordés avec son homologue chinois Xi Jinping. «C'est la réalité des relations internationales», a-t-il dit. «Il y a des choses dont on peut parler mais qu'on ne peut pas montrer».

Enfin, il a rappelé l'enjeu pour Taïwan qui est désormais face à un «axe» de pays autoritaires: «on est en première ligne pour défendre la démocratie». «Au fond, la Chine a peur de la liberté et la démocratie qui fonctionne très bien. Et c'est pour cette raison que la Chine veut détruire notre liberté et notre démocratie», a-t-il également déclaré.