Panique à Kaboul Les talibans à Kaboul, le président en fuite à l'étranger

ATS

15.8.2021 - 19:39

Le président Ashraf Ghani a fui l'Afghanistan dimanche, laissant de fait le pouvoir aux talibans. Ces derniers ont atteint Kaboul, symbole de leur victoire militaire totale en tout juste 10 jours.

Des talibans posent devant la maison du gouverneur de Ghazni le 15 août 2021.
Des talibans posent devant la maison du gouverneur de Ghazni le 15 août 2021.
KEYSTONE/AP Photo/Gulabuddin Amiri

15.8.2021 - 19:39

Le mouvement islamiste radical s'apprêtait à revenir au pouvoir, 20 ans après en avoir été chassé par une coalition menée par les États-Unis en raison de son refus de livrer le chef d'Al-Qaïda, Oussama Ben Laden, dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001.

Dans la soirée, l'ancien vice-président Abdullah Abdullah a annoncé que le président Ashraf Ghani avait «quitté» le pays. Ce départ parachève la déroute des dernières semaines, après sept années au pouvoir au cours desquelles il ne sera pas parvenu à rebâtir son pays, contrairement à ses promesses.



«Transfert pacifique du pouvoir»

«L'Émirat islamique ordonne à toutes ses forces d'attendre aux portes de Kaboul», a d'abord annoncé sur Twitter Zabihullah Mujahid, un porte-parole des talibans.

Puis il a précisé qu'elles étaient autorisées à pénétrer dans les zones de la capitale abandonnées par l'armée afghane, pour y maintenir l'ordre. Les talibans ont aussi promis qu'ils ne chercheraient à se venger de personne.

Appelant à «ne pas s'inquiéter», le ministre de l'Intérieur, Abdul Sattar Mirzakwal, a assuré qu'un «transfert pacifique du pouvoir» vers un gouvernement de transition allait avoir lieu.

Un porte-parole des insurgés, Suhail Shaheen, a confirmé à la BBC qu'ils escomptaient un transfert pacifique du pouvoir «dans les prochains jours». «Nous voulons un gouvernement inclusif (...) ce qui veut dire que tous les Afghans en feront partie», a-t-il assuré.



L'Otan pour une solution politique

L'Otan, qui se retire également d'Afghanistan, a appelé à «une solution politique au conflit», selon un porte-parole.

En à peine 10 jours, les talibans, qui avaient lancé leur offensive en mai à la faveur du début du retrait final des troupes américaines et étrangères, ont pris le contrôle de quasiment tout le pays.

La débâcle est totale pour les forces de sécurité afghanes, pourtant financées pendant 20 ans à coups de centaines de milliards de dollars par les États-Unis, et pour le gouvernement.



Les Américains s'en vont

Le secrétaire d'État américain, Antony Blinken, a annoncé que l'évacuation des diplomates américains et des civils afghans ayant coopéré avec les États-Unis qui craignent pour leur vie avait commencé.

Le président américain, Joe Biden, avait porté à 5000 soldats le déploiement militaire à l'aéroport de Kaboul pour procéder à cette évacuation, qui concerne environ 30'000 personnes.

«Pas Saïgon»

Son administration a défendu sa décision de mettre fin à 20 ans de guerre, la plus longue qu'ait connue l'Amérique. «Ceci n'est pas Saïgon», a affirmé M. Blinken sur CNN en référence à la chute de la capitale vietnamienne, en 1975, un souvenir encore douloureux pour les États-Unis.

«Nous sommes allés en Afghanistan il y a 20 ans avec une mission et cette mission était de régler le compte de ceux qui nous ont attaqués le 11 septembre (2001). Nous avons accompli cette mission», a-t-il plaidé.

A l'instar des Etats-Unis et d'autres pays, notamment européens, l'UE a dit travailler de manière «très urgente» à mettre en sécurité son personnel afghan à Kaboul. Plusieurs Etats européens ont transféré leurs expatriés à l'aéroport. L'Otan a dit apporter son assistance pour sécuriser l'infrastructure en vue des évacuations.

La Suisse a fermé temporairement son bureau de coopération dans la capitale afghane. La Norvège, qui gère le portefeuille de l'Afghanistan au Conseil de sécurité de l'ONU avec l'Estonie, a demandé «une réunion urgente dès que possible» du Conseil.

Panique à Kaboul

Au fil de la journée, la panique s'est emparée de la capitale. Les magasins ont fermé, des embouteillages monstres sont apparus, des policiers ont été vus troquant leur uniforme pour des vêtements civils. Une énorme cohue était visible auprès de la plupart des banques, les gens cherchant à retirer leur argent tant qu'il était encore temps.

Beaucoup d'Afghans, et les femmes en particulier, habitués à la liberté qu'ils ont connue ces 20 dernières années, craignent un retour au pouvoir des talibans. Lorsqu'ils dirigeaient le pays, entre 1996 et 2001, ces derniers avaient imposé leur version ultra-rigoriste de la loi islamique.

Les talibans ont promis que s'ils revenaient au pouvoir, ils respecteraient les droits humains, en accord avec les «valeurs islamiques». Mais dans les zones nouvellement conquises, ils ont déjà été accusés de nombreuses atrocités: meurtres de civils, décapitations, enlèvements d'adolescentes pour les marier de force, notamment.

ATS