Le parti au pouvoir en Russie a subi de lourdes pertes dimanche aux élections du Parlement de Moscou. Le scrutin a été suivi de près, après un été de manifestations sévèrement réprimées par la police russe.
S'ils contrôlent encore le Parlement moscovite avec 25 sièges sur 45, les députés pro-Kremlin perdent près d'un tiers de leurs élus par rapport à la législature précédente. En 2014, les candidats du parti présidentiel Russie unie et leurs alliés avaient remporté 38 sièges.
Neuf anciens députés de Russie unie n'ont ainsi pas réussi à garder leur siège, parmi lesquels le chef de la branche moscovite du parti, Andreï Metelsky, député depuis 2001. Face à la chute de la popularité du parti présidentiel, les autorités avaient pourtant pris soin de ne présenter aucun candidat sous cette bannière, tentant d'aller chercher des personnalités issues de la société civile.
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a quant à lui préféré mettre l'accent sur les succès de ce parti dans le reste du territoire russe. Et d'estimer que ce scrutin avait été un «beau succès».
Entrée de deux partis au Parlement
Dans un mouvement de protestation inédit depuis 2012, plusieurs dizaines de milliers de personnes sont descendues dans les rues de Moscou à un rythme quasi hebdomadaire depuis mi-juillet, à l'appel de l'opposition, furieuse de voir ses candidats écartés de ce scrutin.
L'opposant Alexeï Navalny, dont tous les alliés ont été exclus des élections, avait appelé les électeurs à «voter intelligemment» en soutenant les mieux placés pour battre les candidats du Kremlin. Rien ne dit que son message a été suivi, dans un contexte de grogne sociale liée à la montée de la pauvreté et une impopulaire réforme des retraites. Mais les candidats soutenus par les autorités ont perdu dans 20 des 45 districts de la capitale russe.
Avec 13 députés, contre cinq auparavant, les candidats communistes sont les grands gagnants de l'élection. Deux autres partis entrent au Parlement moscovite: les libéraux de Iabloko, qui remportent trois sièges et pourront en plus compter sur une indépendante qu'ils soutenaient, et le parti Russie juste, considéré comme faisant partie de l'opposition «tolérée» par le Kremlin, qui gagne trois députés.
«On s'est battu ensemble pour ça. Merci à tous pour votre contribution», a déclaré Alexeï Navalny sur Twitter. L'avocate Lioubov Sobol, qui a émergé comme une des meneuses de la contestation de l'été, a elle salué «un résultat qui rentrera dans l'histoire de Moscou». Le taux de participation est toutefois resté très bas à Moscou. Il s'est élevé à 21,77%, à peine plus que lors de la précédente élection locale en 2014.
L'ONU veut enquêter
Pour la plupart non autorisées, les manifestations de l'été ont donné lieu à près de 2700 interpellations à Moscou, du jamais vu depuis la vague de protestations de 2011-2012 qui avait précédé le retour de Poutine à la présidence après un mandat de Premier ministre. Pratiquement toutes les figures de l'opposition ont reçu de courtes peines de prison et cinq manifestants ont écopé de lourdes peines pour «violences» envers les forces de l'ordre, allant jusqu'à quatre ans de prison.
Lundi, la Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Michelle Bachelet, a demandé l'ouverture d'enquêtes sur le «recours excessif» à la force par la police russe au cours de ces manifestations. Elle a aussi appelé les autorités à «respecter la liberté d'expression, le droit de réunion pacifique et le droit de participer aux affaires publiques».
Réélections des fidèles de Poutine
En tout, plus de 5000 élections avaient lieu dans le pays dimanche. Les Russes ont élu 16 gouverneurs régionaux et les parlementaires locaux de 13 régions, dont la Crimée, péninsule ukrainienne annexée par la Russie en 2014.
A Saint-Pétersbourg, où la campagne avait été très controversée, le gouverneur par intérim soutenu par le Kremlin Alexandre Beglov s'est fait réélire dès le premier tour, mais l'opposition a dénoncé de nombreuses fraudes électorales. Ailleurs en Russie, la majorité des gouverneurs soutenus par Russie unie ont été réélus, malgré quelques couacs, comme à Khabarovsk où le parti nationaliste LDPR a largement conquis le Parlement municipal.
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