Alors que les transports publics parisiens étaient quasiment paralysés dimanche par une grève contre la réforme des retraites, le gouvernement français a multiplié les réunions pour sauver son projet. La confrontation fait craindre une pagaille lundi sur les quais.
Le conflit a tourné au bras de fer entre le gouvernement et le secrétaire général du syndicat CGT Philippe Martinez, regonflé par la mobilisation du 5 décembre, qui a fait descendre plus de 800'000 manifestants dans la rue, dans toute la France.
«Si l'on ne fait pas une réforme profonde, sérieuse, progressive aujourd'hui, quelqu'un d'autre en fera une demain brutale, vraiment brutale», a prévenu le chef du gouvernement français, Edouard Philippe, «déterminé» à mener «jusqu'à son terme» le projet de système universel de retraite par points.
«Nous tiendrons jusqu'au retrait» de la réforme, dans laquelle «il n'y a rien de bon», a répliqué le dirigeant syndicaliste. Une deuxième grande journée de grève et de manifestations est prévue mardi à l'appel des syndicats CGT-FO-Solidaires-FSU. Certaines voix évoquent déjà un troisième round jeudi prochain.
Consultations et réunions
Pour tenter de sortir de l'ornière, le calendrier de l'exécutif français s'accélère. Tout le week-end, des consultations ont eu lieu à Matignon, siège du gouvernement. Dimanche soir, le président français Emmanuel Macron et Edouard Philippe réuniront au palais de l'Elysée des ministres concernés par le dossier.
Lundi, ils ont convié les dirigeants de la majorité et des ministres à un «déjeuner de calage» au palais présidentiel. Dans l'après-midi, le haut-commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye présentera aux partenaires sociaux les conclusions de sa longue concertation. Enfin, mercredi, Edouard Philippe détaillera son plan consistant à fusionner les 42 régimes de retraite existants.
«On pourra apporter des réponses extrêmement positives pour beaucoup de gens qui subissent des injustices dans le système actuel: les femmes, les agriculteurs et ceux qui ont des parcours hachés notamment», assure-t-il.
«Tous les Français»
«Ce sera non», a toutefois déjà répondu le secrétaire général de la CGT à l'hypothèse d'une transition sur dix ou quinze ans entre les régimes actuels et le futur système. Même refus pour FO: «Il faut arrêter avec cela. On laisse tomber les mauvaises idées. On revient au point de départ, sans préalable», a souhaité le numéro un de Force ouvrière, Yves Veyrier, sur BFMTV.
Monté au créneau, le ministre français de l'économie Bruno Le Maire a accusé la CGT de «défendre plus ses troupes que les Français». Réponse du leader syndical: le ministre est «encore dans la division». La CGT «défend tous les Français parce que ce projet de loi concerne tous les Français».
La mobilisation s'est d'ores et déjà inscrite dans la durée. De nouveaux défilés ont eu lieu samedi, coagulant les colères. Des marches contre le chômage et la précarité, prévues de longue date, ont rassemblé, selon le ministère de l'intérieur, 23'500 personnes en France, dont des «gilets jaunes» et des militants syndicaux mobilisés sur les retraites.
Différer les déplacements
Les trois premiers syndicats de cheminots (CGT, Unsa et SUD) ont appelé à amplifier la grève à partir de lundi. Le trafic ferroviaire sera en légère amélioration, mais encore «très perturbé» par la grève illimitée. La SNCF prévoit de faire circuler seulement un TGV et un train de banlieue sur cinq. A Paris, dix lignes de métro sur seize seront fermées.
La SNCF et la RATP invitent «tous les voyageurs qui en ont la possibilité à différer leurs déplacements», compte tenu du «fort risque de saturation du réseau».
Le trafic était déjà fortement réduit dimanche à la SNCF, avec 1 TGV sur 6 en circulation, 15% des trains de banlieue. La RATP a même fermé 14 lignes de métro sur 16.
Du côté de l'économie, la tension monte. Nombre d'acteurs économiques en France redoutent une prolongation de cette grève et un manque à gagner pour les commerçants, mais aussi des blocages routiers ou une pénurie de carburant, qui affecteraient leur activité plus sévèrement durant la période cruciale des fêtes de fin d'année.
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