Un «conflit direct» avec l'OTANSergueï Riabkov: la Genève internationale «fait partie du passé»
sn, ats
2.3.2023 - 14:59
Le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov voit une menace grandissante d'un «conflit direct» avec l'OTAN. A Genève, il a rencontré une délégation américaine. L'attractivité de la Genève internationale «fait partie du passé», a-t-il dit jeudi.
Keystone-SDA, sn, ats
02.03.2023, 14:59
02.03.2023, 15:29
ATS
«La tendance est réellement dangereuse», a affirmé à la presse le numéro deux de la diplomatie russe. La menace d'un affrontement direct avec les Etats-Unis et leurs alliés «s'est accélérée ces derniers mois et dernières semaines». Et le numéro deux de la diplomatie russe d'avertir les Occidentaux en cas de livraison d'armement plus létal, comme des avions de chasse.
Le ton grave, il estime que certains ne prennent plus au sérieux «le sens du danger» lié aux armes nucléaires. Auparavant, devant la Conférence du désarmement (CD), il a lancé une nouvelle salve agressive contre les Etats-Unis et les pays de l'OTAN.
Il a accusé Washington de «tester la sécurité» des sites stratégiques russes, en aidant Kiev à les viser. Devant la presse, il a renchéri en affirmant qu'il ne faisait aucun doute que les Etats-Unis étaient en soutien lors d'assauts récents, notamment dans la région de Saratov.
Un reproche qu'il élargit aussi au sabotage du gazoduc de North Stream, appelant à une investigation internationale indépendante. L'implication grandissante des Occidentaux fait courir «le risque d'un affrontement direct entre Etats nucléaires avec des conséquences catastrophiques», a-t-il ajouté devant la CD.
Avertissement lancé à Washington
Il a répété les accusations russes d'utilisation militaire de composantes biologiques en Ukraine. Ni Kiev, ni les Etats-Unis n'ont apporté de réponse, a-t-il estimé.
Le numéro deux de la diplomatie russe est revenu sur la suspension de la participation russe au traité New START de désarmement nucléaire. Il a répété que Moscou se conformerait toutefois aux limites décidées pour les armes nucléaires américaines et russes.
Signé en 2010, le New START a été prolongé pour cinq ans en 2021. Il contraint les deux pays à ne pas fabriquer plus de 1550 ogives opérationnelles. Selon M. Riabkov, avec leur attitude en Ukraine, les Etats-Unis ont fait preuve de «cynisme» en demandant de pouvoir à nouveau mener des inspections sur les sites nucléaires russes.
Pour relancer l'accord, il faudrait «un changement vers le mieux» de l'activité américaine, selon M. Riabkov. Notamment l'arrêt d'accusations infondées sur le nucléaire russe, dit-il.
Malgré ces tensions, le vice-ministre a admis avoir rencontré une délégation américaine à Genève. Et il a laissé entendre que celle-ci était dirigée par la sous-secrétaire d'Etat en charge du désarmement. Et d'appeler le président Joe Biden à convaincre les sénateurs de ratifier le traité d'interdiction des essais nucléaires. En cas de test américain, Moscou répondra.
«La Genève internationale n'est plus la même»
Autre certitude, le mécontentement contre l'attitude suisse sur l'Ukraine n'a pas changé. S'il estime que son chef Sergueï Lavrov a déjà tout dit là-dessus, le numéro deux de la diplomatie russe répète que «la Genève internationale comme capitale de la diplomatie internationale n'est plus la même». Son attractivité comme plateforme de dialogue «fait partie du passé», ajoute-t-il.
Plus largement, M. Riabkov a relayé les reproches habituels lancés par Moscou depuis des années. Le soutien à l'allié syrien est sans faille. Moscou dénonce l'attitude des enquêteurs onusiens sur les armes chimiques face à un dossier monté par les Occidentaux, dit-il.
Pendant que le vice-ministre parlait, les ambassadeurs de nombreux pays européens, britannique et des Etats-Unis à l'ONU ont entouré à l'extérieur de la salle leur collègue ukrainienne, en geste de solidarité. Pour autant, ils n'ont pas fait le choix d'être présents dans la salle puis de la quitter comme c'était le cas il y a un an avec le discours par vidéo du M. Lavrov. «Riabkov n'est pas Lavrov», affirme à Keystone-ATS un diplomate occidental. «Il faut ajuster la réaction à la personne qui fait le discours et à la situation».
Appel par Blinken
Le vice-ministre est le premier haut responsable russe à s'exprimer publiquement devant une instance onusienne à Genève depuis le début de la guerre en Ukraine.
Dans la matinée, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a à nouveau dénoncé les violations russes en Ukraine, par vidéo devant le Conseil des droits de l'homme. Il a ciblé le «musèlement systématique» des opposants en Russie, justifiant le mandat de rapporteur spécial de l'ONU lancé l'année dernière.
De même, il faut renouveler la Commission d'enquête internationale sur l'Ukraine, dit-il. De son côté, M. Riabkov devait également s'exprimer, en fin d'après-midi, devant le Conseil des droits de l'homme. Pour dire que cette instance est partiale. Face aux critiques contre la répression en Russie, il répond que Moscou honore la loi et ses obligations internationales.