Deux nouveaux heurts ont éclaté dimanche à Santiago du Chili entre des manifestants et la police au troisième jour des pires émeutes qu'ait connu le pays depuis des décennies. Ils ont fait deux morts et au moins trois blessés.
Des protestataires, le visage dissimulé sous des capuches, se sont violemment affrontés avec des policiers sur la Plaza Italia, dans le centre de la capitale, a constaté l'AFP. Les forces de l'ordre ont répliqué avec des gaz lacrymogènes et des jets d'eau.
Après trois jours de violences, le centre de la capitale chilienne offrait dimanche un visage de désolation: feux rouges au sol, carcasses de bus carbonisées, commerces pillés et des milliers de pierres et de bâtons parsemant les chaussées. Selon les autorités, 716 personnes ont été arrêtées.
Couvre-feu
Le couvre-feu est désormais en vigueur dans cinq régions, dont la capitale, Santiago, selon le général Javier Iturriaga del Campo, et près de 10'000 policiers et militaires ont été déployés. Le président Sebastian Pinera avait décrété vendredi soir l'état d'urgence pour 15 jours à Santiago.
Dans la nuit de samedi à dimanche, deux femmes sont mortes dans le pillage et l'incendie d'un supermarché Lider, de la chaîne américaine Walmart, à San Bernardo en banlieue sud de la capitale, selon un bilan revu à la baisse. Les autorités avaient préalablement évoqué trois morts.
«Une troisième personne a été brûlée à 75%«, a déclaré le ministre de l'Intérieur et de la Sécurité, Andrés Chadwick. Selon les autorités, deux personnes ont également été grièvement blessées par balle après un incident avec la police lors de pillages, également dans le sud de la capitale. Des violences ont également eu lieu dans d'autres grandes villes du pays comme Valparaiso et Concepcion.
Prix des tickets de métro
Les manifestations ont débuté vendredi pour protester contre une hausse – de 800 à 830 pesos (environ 1,04 euro) – du prix des tickets de métro à Santiago.
M. Pinera a fait marche arrière samedi soir et suspendu la hausse. Mais les manifestations et les violences se sont poursuivies samedi, nourris par la colère face aux conditions socio-économiques et aux inégalités dans ce pays considéré comme l'un des plus stables d'Amérique latine.
Dégâts de plus de 300 millions
Des dizaines de supermarchés, de véhicules et de stations-service ont été saccagés ou incendiés. Les bus et les stations de métro ont été la cible privilégiée des manifestants. Selon le gouvernement, 78 stations de métro ont subi des dommages, dont certaines ont été totalement détruites.
Les dégâts pourraient atteindre plus de 300 millions de dollars et un retour à la normale sur certaines lignes pourrait prendre des mois, a indiqué dimanche le président de la compagnie nationale de transports publics, Louis de Grange.
«Il ne s'agit pas seulement du métro, mais de tout. Les Chiliens en ont eu marre des injustices», a déclaré à une chaîne de télévision locale, Manuel, un travailleur qui tentait dimanche de gagner son lieu de travail.
Dialogue annoncé
Avec des mots d'ordre comme «Marre des abus» ou «Le Chili s'est réveillé», diffusés sur les réseaux sociaux, le pays fait face à une des pires crises sociales depuis des décennies. Les revendications des manifestants se sont élargies à d'autres sujets, comme les inégalités sociales ou la contestation d'un modèle économique où l'accès à la santé et à l'éducation relève presque uniquement du secteur privé.
Dimanche, M. Pinera devait réunir ses ministres et d'autres hauts responsables pour faire un point sur la situation. Il a également annoncé un dialogue «large et transversal» pour tenter de répondre aux demandes sociales.
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