Russie Partisans d'Alexeï Navalny interpellés devant son pénitencier

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6.4.2021 - 21:23

Une dizaine de partisans d'Alexeï Navalny, dont des médecins, ont été interpellés mardi par la police russe devant sa colonie pénitentiaire. Ils étaient allés réclamer des informations sur l'état de l'opposant, malade et en grève de la faim.

En milieu d'après-midi, trois fourgons de police sont arrivés pour embarquer les protestataires, parmi lesquels figurait Anastassia Vassilieva, une militante d'opposition et médecin personnelle d'Alexeï Navalny. 
En milieu d'après-midi, trois fourgons de police sont arrivés pour embarquer les protestataires, parmi lesquels figurait Anastassia Vassilieva, une militante d'opposition et médecin personnelle d'Alexeï Navalny. 
Source: KEYSTONE/AP Photo/Pavel Golovkin

Keystone-SDA, cc

Inquiets pour la santé du principal détracteur du Kremlin, qui selon son avocate a perdu cinq kilos depuis qu'il a cessé de s'alimenter le 31 mars, ses soutiens s'étaient retrouvés en fin de matinée devant le camp n°2 de Pokrov, 100 km à l'est de Moscou.

Ils demandaient à voir son directeur et les personnes chargées du suivi de la santé de M. Navalny, ce dernier ayant dit souffrir de fièvre, d'une forte toux et de douleurs au dos. Sans surprise, les autorités n'ont pas accédé à leur requête.

Protestataires embarqués

En milieu d'après-midi, trois fourgons de police sont arrivés pour embarquer les protestataires, parmi lesquels figurait Anastassia Vassilieva, une militante d'opposition et médecin personnelle d'Alexeï Navalny, a constaté une journaliste de l'AFP.

Les dizaines de policiers présents ont emmené dans les fourgons des médecins en blouse blanche et d'autres personnes, dont au moins un journaliste. Selon la police locale, neuf personnes ont été arrêtées pour «troubles à l'ordre public».

Dans la soirée, Mme Vassilieva a été relâchée, selon son équipe. Le journaliste interpellé a également annoncé sur Twitter avoir été relâché quelques heures après son interpellation.

Transfert de Navalny?

D'après des informations du média pro-Kremlin Izvestia parues lundi soir, M. Navalny a été transféré dans une unité médicale après l'aggravation de son état, en l'occurrence l'apparition de fièvre et de toux. Aucune confirmation officielle n'a cependant été publiée.

Selon l'avocate de M. Navalny, Olga Mikhaïlova, la prison ne dispose que d'un aide-soignant et d'aucun médecin. Elle a affirmé lundi que son client pesait 80 kilos, contre 93 à son arrivée dans cette prison et 85 au début de sa grève de la faim.

«Insalubrité et tuberculose»

Les inquiétudes concernant ce militant anti-corruption de 44 ans sont d'autant plus grandes qu'il a survécu de justesse l'année dernière à un empoisonnement à l'agent innervant Novitchok qui l'avait plongé dans le coma. Il en accuse le Kremlin, qui nie toute responsabilité.

Retourné en Russie en janvier après cinq mois de convalescence en Allemagne, il avait été immédiatement arrêté et condamné à deux ans et demi d'emprisonnement pour une vieille affaire de fraude qu'il considère comme politique.

Depuis son arrivée au pénitencier de Pokrov, qui passe pour être l'un des plus durs de Russie, il accuse ses gardiens de le «torturer» notamment par privation de sommeil.

Alexeï Navalny s'exprime régulièrement sur les réseaux sociaux sans que l'on sache comment ses messages sortent du pénitencier. Il a ainsi raconté lundi qu'un détenu de son baraquement avait été hospitalisé pour tuberculose, le troisième en quelques semaines.

«Chaque prisonnier prie Dieu de ne pas se retrouver ici car, à l'intérieur, c'est l'insalubrité, la tuberculose et le manque de médicaments», a-t-il écrit.

Répression accrue

Depuis son retour en Russie, ses partisans font face à une répression accrue. Avant son arrestation mardi, Anastassia Vassilieva, la directrice de l'Alliance des médecins, un syndicat proche de l'opposition et dans le collimateur des autorités, avait dit vouloir «comprendre ce qu'il se passe» dans le camp de Pokrov.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a pour sa part jugé que M. Navalny ne devait pas bénéficier de «conditions particulières», les services pénitentiaires ayant assuré fin mars qu'il recevait «toute l'assistance médicale nécessaire».

Sa femme, Ioulia Navalnaïa, a quant à elle publié sur Instagram une lettre du directeur de la colonie pénitentiaire dans laquelle il lui écrit ne pas pouvoir faire hospitaliser l'opposant car l'administration pénitentiaire ne dispose pas de ses documents d'identité.

«Monsieur le directeur, n'oubliez pas que si le pire se produit pour Alexeï, sa mort sera sur votre conscience et sur celle de Poutine», dit-elle en commentaire : «Mais votre Poutine vous poignardera ensuite dans le dos et vous fera porter le chapeau».