Les Brésiliens votaient dimanche pour le deuxième tour de l'élection présidentielle. Un scrutin qui se déroulait sans incidents graves pour départager le sulfureux candidat d'extrême droite Jair Bolsonaro de son adversaire de gauche Fernando Haddad.
A 17H00 (21h en Suisse), la grande majorité des bureaux de vote avaient déjà fermé. Seuls ceux de l'extrême ouest du pays devaient rester ouverts jusqu'à 19h00. Les résultats seront connus environ une heure après.
Après le scrutin du 7 octobre qui a vu Bolsonaro frôler une élection dès le premier tour (46% des suffrages), les 147 millions d'électeurs semblaient faire leur choix plus par rejet que par conviction : "contre la corruption" pour le candidat d'extrême droite, "contre la haine" pour celui de gauche.
Un livre sous le bras
De nombreux électeurs de gauche se sont rendus aux urnes avec un livre sous le bras, un pied de nez aux électeurs de Jair Bolsonaro, dont certains s'étaient photographiés votant au premier tour avec une arme.
"1984" de George Orwell ou encore "Comment meurent les démocraties" de Daniel Ziblatt et Steven Levitsky faisaient partie des titres sélectionnés par les électeurs qui, sous les mots clé #LivroSim et #Armanao (Livre oui, arme non), postaient des photos sur les réseaux sociaux.
Autre livre et autre message, Dias Toffoli, le président de la Cour suprême, s'est rendu aux urnes avec la Constitution. "Le futur président devra respecter les institutions, la démocratie et l'Etat de droit", a-t-il déclaré.
Pour Marcio Coimbra, de l'Université presbytérienne Mackenzie, le Brésil a des garde-fous solides avec "un parquet fort, une Cour suprême forte et un Congrès qui fonctionne".
Les candidats ont voté
Jair Bolsonaro a voté dans la matinée à Rio, évitant soigneusement la foule. Accompagné de sa troisième épouse Michelle, il n'a fait aucune déclaration, "pour des raisons de sécurité".
Le vote a a été moins tranquille à Sao Paulo pour Fernando Haddad, accueilli par des partisans brandissant des roses et entonnant des chansons traditionnelles de la gauche, mais aussi par un concert de casseroles d'opposants.
"La démocratie est en danger. Les libertés individuelles sont en danger", a déclaré Haddad à la sortie du bureau de vote. Mais "le Brésil s'est réveillé ces derniers jours. J'attends les résultats avec beaucoup d'espoir".
La candidate écologiste Marina Silva, éliminée dès le 1er tour, a déclaré avoir voté pour Fernando Haddad "pour l'Indien, le Noir et l'environnement".
Ecart resserré
Les deux derniers sondages samedi soir ont crédité Jair Bolsonaro, du Parti social libéral (PSL), de 54 et 55 % des intentions de vote et Fernando Haddad, du Parti des travailleurs (PT) de l'ex-président Lula, de 46 et 45%.
L'écart entre les deux prétendants à la fonction suprême pour un mandat de quatre ans est passé de 18 points à la mi-octobre à 8 à 10 points à la veille du scrutin.
"Je continue de penser que Bolsonaro est favori", estime Gaspard Estrada, spécialiste de l'Amérique latine à Sciences Po, mais "dans l'histoire électorale du Brésil il n'est pas du tout exclu qu'il y ait des mouvements forts dans les dernières 24 heures".
Après une dure campagne de l'entre-deux tours, alimentée par des discours de haine et émaillée de violences, le vote se déroulait dans le calme, a confirmé dans l'après-midi le ministre de la Sécurité publique, Raul Jungmann.
Le président sortant Michel Temer a indiqué de son côté que la transition débuterait "dès demain", lundi.
Pays en crise
Dans un pays miné par une violence record, le marasme économique, une corruption endémique et une crise de confiance aiguë dans la classe politique, Jair Bolsonaro a réussi à s'imposer comme l'homme à poigne dont le Brésil aurait besoin.
Catholique défenseur de la famille traditionnelle, il a reçu le soutien crucial des puissantes églises évangéliques et a indigné, par ses déclarations outrancières, une bonne partie des Noirs, des femmes et des membres de la communauté LGBT.
Fernando Haddad, 55 ans, a promis de "rendre le Brésil heureux de nouveau" comme sous les mandats de Lula dans les années de croissance (2003-2010). Mais il n'a pas fait l'autocritique du PT, jugé responsable par beaucoup des plaies actuelles du pays, notamment la corruption.
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