Comores Présidentielle sous tension aux Comores

ATS

23.3.2019 - 10:13

Le président du petit archipel des Comores Azali Assoumani sollicite dimanche son maintien à la tête du pays. Ce scrutin est lourd de tensions avec l'opposition, qui l'accuse de dérive autoritaire et redoute un «hold-up électoral».

Sûr de sa force, le chef de l'Etat sortant a rassemblé vendredi plusieurs milliers de personnes dans la capitale Moroni autour du slogan «un seul jour, un seul tour, un seul homme». «Nous gagnerons cette élection dès le 24 mars», a assuré à ses partisans M. Azali, 60 ans, au pouvoir depuis 2016.

La machine Azali s'est mise en marche avec la réforme constitutionnelle approuvée par référendum l'an dernier. Très controversée, elle a étendu d'un à deux mandats de cinq ans la durée de la présidence attribuée successivement à chacune des trois îles de l'archipel (Grande-Comore, Mohéli, Anjouan).

Ce système a donné un coup de canif au fragile équilibre institutionnel instauré en 2001 pour mettre fin aux crises séparatistes et aux coups d'Etat à répétition. Celles-ci agitent l'archipel depuis son indépendance en 1975.

'Mascarade'

L'opposition a hurlé au loup mais rien n'y a fait. Au contraire. M. Azali a riposté à la contestation en embastillant nombre de ses détracteurs, à commencer par son ennemi de toujours, l'ancien président Ahmed Abdallah Sambi, accusé de corruption.

Sur sa lancée, l'ex-putschiste, élu en 2016, a remis son quinquennat en jeu dès cette année. En cas de succès, il pourrait garder les rênes du pays jusqu'en 2029.

Plus de 800 observateurs de la société civile comorienne, financés par l'Union européenne (UE), sont annoncés dans les 731 bureaux de vote du pays pour garantir la régularité du scrutin. Les premiers résultats sont attendus lundi.

Réforme controversée

En décembre 2001, l'Union des Comores succède à la République fédérale islamique des Comores. Une nouvelle Constitution dote chaque île d'une large autonomie et instaure une présidence tournante, tous les cinq ans, entre les trois îles.

En 2016, l'ex-putschiste Azali Assoumani (1999-2006) est élu président, après un scrutin émaillé d'incidents. Un référendum constitutionnel en juillet renforce ses pouvoirs, en faisant passer de cinq à dix ans la présidence tournante entre les îles.

Cette réforme provoque de violentes critiques. En octobre, un groupe de rebelles armés affronte les forces comoriennes à Mutsamudu, capitale d'Anjouan. Ces derniers mois, des dizaines de responsables et militants de l'opposition ont été arrêtés.

Coups d'Etat et séparatisme

Moins d'un mois après l'indépendance en 1975, le premier président Ahmed Abdallah est renversé par un opposant, Ali Soilih. En 1978, le mercenaire français Bob Denard, à la tête d'un commando, rend le pouvoir à l'ex-président Abdallah, devenant commandant en chef de l'armée.

En 1989, le président Abdallah est assassiné dans son palais dans des circonstances mystérieuses. Bob Denard, alors chef de la garde présidentielle, tente de prendre le contrôle du pays avant de quitter Moroni après une intervention militaire française.

Les Comores connaissent ensuite plusieurs années d'une double crise: séparatiste, avec la sécession d'Anjouan en 1997 – qui n'a rejoint les autres îles qu'en 2001-, et institutionnelle, après un coup d'Etat qui porte au pouvoir Azali Assoumani en 1999.

Mayotte, pomme de discorde

Les Comores ont proclamé leur indépendance de Paris en 1975 mais l'île de Mayotte a décidé de rester dans le giron français. Toujours revendiquée par Moroni, soutenu par plusieurs résolutions de l'ONU, Mayotte nourrit depuis les tensions entre les Comores et la France.

L'archipel des Comores se situe à 70 km des côtes du département français et les Comoriens sont nombreux à risquer la traversée sur des embarcations de fortune pour immigrer à Mayotte. Les deux gouvernements ont signé en novembre un accord destiné, entre autres, «à faciliter des migrations légales et maîtrisées».

L'archipel regroupe les îles de Grande-Comore, Anjouan et Mohéli. Elles abritent près de 814'000 habitants, dont plus de la moitié ont moins de 20 ans, selon la Banque mondiale en 2017.

Islamisées depuis le XIIe siècle, les Comores comptent 99% de musulmans, majoritairement sunnites. La nouvelle Constitution adoptée en juillet consacre l'islam comme religion d'Etat. Le pays est membre de la Ligue arabe.

Girofle et ylang ylang

Dépourvu de grandes infrastructures touristiques, contrairement à l'île Maurice ou aux Seychelles, l'archipel est un pays de pêche et d'agriculture. Les principales sources de devises sont la vanille, le clou de girofle et surtout l'ylang ylang, plante à la fleur jaune recherchée pour son huile essentielle et entrant dans la composition de parfums.

Selon la Banque mondiale, la croissance de l'Union des Comores devait être stable à 2,7% en 2018 grâce notamment aux transferts d'argent envoyés par la diaspora (près de 13% du PIB). Elle devrait atteindre 3,1% en 2019-20, soutenue par des projets d'infrastructures.

Classées au 165e rang sur 189 par l'ONU pour leur l'indice de développement humain en 2018, les Comores doivent surtout lutter contre la malnutrition, selon la Banque mondiale.

Les Comores, dont la moitié de la population a moins de 20 ans, s'apprêtent à élire leur président dimanche (archives).
Les Comores, dont la moitié de la population a moins de 20 ans, s'apprêtent à élire leur président dimanche (archives).
Source: KEYSTONE/EPA/STEPHEN MORRISON
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