Genève
L'activiste des droits de l'homme égyptien Mohamed Zaree remporte cette année le prix Martin Ennals. Interdit de quitter le territoire de son pays depuis mai 2016, il n'a pas pu venir recevoir son prix mardi à Genève. Il risque toujours 30 ans de prison.
Lors de la cérémonie en soirée en présence de la Haut commissaire adjointe de l'ONU aux droits de l'homme Kate Gilmore, une intervention de M. Zaree par vidéo était prévue. Sa femme a réceptionné le prix pour lui.
Mohamed Zaree dirige le bureau égyptien de l'Institut du Caire pour les études sur les droits de l'homme (CIHRS) dont le siège a dû être déplacé dans un autre Etat de la région. Menacé de mort, il est resté, contrairement aux autres employés de son institution qui ont quitté le pays. Le militant continue de diriger également un réseau d'ONG indépendantes, malgré les pressions du gouvernement.
Le président du jury du prix Hans Thoolen a salué devant la presse à Genève l'attitude de M. Zaree, qui a "profondément" marqué les membres. Il a envoyé une lettre au président égyptien Abdel Fattah al-Sissi pour lui demander de lever l'interdiction de quitter le territoire, sans obtenir de réponse.
Plusieurs pays ciblés
Arrêté pour avoir reçu du financement étranger, puis libéré, M. Zaree risque jusqu'à 30 ans de prison. "Il lui a été dit qu'il y aurait un procès", a indiqué le directeur de la Fondation Martin Ennals, Michael Khambatta.
Les avoirs de son organisation ont été gelés et le directeur Bahey El Din Hassan fait partie de ceux qui ont quitté le pays. La répression d'Abdel Fattah al-Sissi est "sans comparaison possible" avec celle de ces prédécesseurs, dit M. Hassan dont l'ONG dispose aussi d'un bureau à Genève. Et de dénoncer des exécutions de masse, de la torture ou des disparitions forcées.
Cet acharnement dépasse le cercle des opposants politiques et des défenseurs des droits de l'homme, selon le directeur du CIHRS. Il s'applique à tous les dissidents. M. Hassan ne pense toutefois pas que le prix provoquera des représailles en Egypte.
Au contraire, il le considère comme un "message" adressé au président égyptien. Mais l'absence de réaction de plusieurs pays est perçue par Abdel Fattah al-Sissi comme un "feu vert" à la répression, ajoute-t-il.
Décerné par dix ONG
Parmi les deux autres finalistes, la militante transgenre salvadorienne Karla Avelar, détenue et torturée, a dénoncé devant la presse l'impunité et le manque d'accès à la justice dans son pays. Enfin deux filles de certains des cinq membres de FreeThe5KH ont alerté sur la détérioration de la situation des ONG au Cambodge avant les élections prévues en 2018.
Ces organisations ne pourront peut-être pas surveiller le scrutin et certaines ont dû fermer faute de financement. Les FreeThe5KH sont détenus de manière provisoire depuis un an et demi en raison de leur travail dans l'Association cambodgienne pour les droits de l'homme et le développement.
La cérémonie de mardi était organisée par la Ville de Genève. Le prix Martin Ennals est remis chaque année depuis 1993 par dix ONG, dont Amnesty International, l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT), la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) ou encore Human Rights Watch (HRW).
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