Sécurité globale Le Sénat entame l'examen d'un texte controversé

ATS

16.3.2021 - 18:49

Quatre mois après l'Assemblée nationale, le Sénat français a entamé mardi l'examen en première lecture de la proposition de loi LREM sur la «sécurité globale». Ce texte rencontre toujours une forte opposition des associations de défense des libertés et de la gauche.

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a défendu ce projet. 
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a défendu ce projet. 
KEYSTONE

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a défendu un projet «important qui va renforcer considérablement la confiance qu'a la nation dans ses forces de l'ordre». Il a réaffirmé «toute la volonté» du gouvernement de conserver l'article 24 qui a cristallisé les critiques. Il a indiqué s'en remettre à la «sagesse» des parlementaires «pour pouvoir avoir la meilleure rédaction possible».

La coordination Stop loi sécurité globale a pour sa part appelé à reprendre la mobilisation «pour mettre en échec ce texte et la logique liberticide qui l'accompagne». Elle avait annoncé des rassemblements mardi devant le palais du Luxembourg et en province.

Gauche offensive

Dans l'hémicycle, la gauche promet d'être très offensive sur «tous les articles attentatoires à la liberté». Le groupe CRCE à majorité communiste a défendu une motion visant au rejet en bloc du texte, rejetée largement. Sa présidente Eliane Assassi a dénoncé «un changement de paradigme (...) acté en matière de sécurité publique. L'espace public devient un espace de contrôle et de suspicion.»

Pour le chef de file PS Jérôme Durain, cette loi «bancale n'appelle ni enthousiasme ni construction de barricade, elle appelle d'abord notre vigilance et notre travail».

Le texte a été profondément réécrit par les sénateurs en commission. «Nous partageons les objectifs sous tendus» par le texte, a indiqué le corapporteur LR Marc-Philippe Daubresse. «Nous avons cherché à mesurer leur impact à l'aune des libertés publiques qu'il nous appartient de défendre».

Le texte ainsi réécrit «n'est pas laxiste, il est plus équilibré et beaucoup plus robuste juridiquement», a affirmé son homologue centriste Loïc Hervé.

Critique des policiers

Mais la réécriture n'est pas du goût des syndicats de police. «Sur certains points, le texte a été vidé de son sens», a ainsi regretté Linda Kebbab, déléguée nationale du Syndicat Unité SGP-FO. Elle pointe en particulier la réécriture des articles 23 (sur les remises de peine) et 24, qui répondaient à une demande des syndicats de police.

Dans sa version votée par les députés, l'article 24 modifiait la loi de 1881 sur la liberté de la presse pour réprimer la diffusion «malveillante» d'images des forces de l'ordre. Il avait suscité une levée de boucliers des journalistes.

Les sénateurs ont choisi de proposer «un nouvel article qui dépasse l'opposition stérile» entre liberté de la presse et protection des forces de l'ordre, en créant dans le Code pénal un nouveau délit de «provocation à l'identification».

Le texte issu de l'Assemblée prévoyait la fin des crédits de remises de peine pour infractions envers les forces de l'ordre, pompiers ou élus. Les sénateurs ont limité en commission le dispositif aux infractions les plus graves (meurtres, violences ayant entraîné une mutilation permanente...).

Agents armés au musée ?

Concernant les caméras piétons utilisées par les policiers, les sénateurs se sont opposés en commission à la diffusion d'images directement dans les médias ou sur les réseaux sociaux. Ils ont par ailleurs resserré l'encadrement juridique du recours aux drones.

Ils n'ont en revanche pas modifié une disposition autorisant l'accès aux établissements recevant du public (musées, théâtres...) aux policiers et gendarmes armés en dehors de leurs heures de service. Cette mesure fait débat: le président centriste de la commission de la Culture Laurent Lafon entend notamment s'y opposer. «Le policier n'est jamais un ennemi», a souligné M. Darmanin.