Tempête politique en Pologne Scandale autour d'un «possible missile russe» trouvé dans la forêt

ATS

14.5.2023 - 06:51

L'annonce de la découverte des débris d'un missile «probablement russe» au coeur de la Pologne a provoqué une tempête politique à Varsovie. L'opposition crie au scandale et réclame la démission du ministre de la défense, qui ambitionne de faire de son pays une puissance militaire européenne.

Des policiers montent la garde sur le site où les restes d'un objet militaire non identifié ont été trouvés dans une forêt près de la ville de Zamosc près de Bydgoszcz, Pologne, 27 avril 2023. Le bureau du procureur du district de Gdansk a ouvert une enquête sur la découverte.
Des policiers montent la garde sur le site où les restes d'un objet militaire non identifié ont été trouvés dans une forêt près de la ville de Zamosc près de Bydgoszcz, Pologne, 27 avril 2023. Le bureau du procureur du district de Gdansk a ouvert une enquête sur la découverte.
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A la fin avril, les restes d'un «objet militaire aérien» – un missile de croisière russe KH-55, capable de transporter des têtes nucléaires, tombé en décembre, selon les médias polonais – ont été trouvés par un passant dans une forêt près de Bydgoszcz, dans le nord, à environ 500 km de la frontière orientale de ce pays membre de l'OTAN.

Le gouvernement nationaliste populiste, jusqu'alors muet sur cette affaire, a fait jeudi son premier commentaire public à ce sujet. Le ministre de la défense, Mariusz Blaszczak, a accusé le commandant des forces opérationnelles d'avoir négligé les opérations de recherche des débris du projectile et de n'avoir informé personne de l'incident. M. Blaszczak n'a toutefois pas demandé sa démission ou sa suspension.

«En contact»

Les militaires polonais et leurs collègues américains présents en Pologne ont pourtant bien suivi le vol de l'engin, y compris à partir de leurs avions, a-t-il ajouté. «Nous avons été en contact avec nos homologues polonais à ce sujet. On essaie d'en savoir un peu plus», a commenté vendredi à Washington le porte-parole du conseil de sécurité nationale John Kerby.

Le premier ministre Mateusz Morawiecki a quant à lui assuré n'avoir été informé de cette affaire qu'à la fin avril, même si le chef d'état-major des armées, le général Rajmund Andrzejczak, déclare l'avoir révélée aux responsables «au moment des faits».

Vendredi, le bureau de la sécurité nationale (BBN) a souligné que les informations dont il dispose sur l'incident «ne justifieraient pas des décisions personnelles au sein du commandement des forces armées». Selon le BBN, «aucune conclusion n'a été présentée au président» polonais Andrzej Duda, qui, en vertu de la constitution, est le chef suprême des armées.

«Le roi est nu»

Sans se prononcer sur les accusations formulées à son encontre, le commandant des forces opérationnelles, le général Tomasz Piotrowski, a appelé vendredi à «la raison», à «pondérer les émotions», disant faire «confiance» à la justice polonaise.

Dans le même temps, le chef de l'opposition centriste polonaise Donald Tusk a estimé que «la première décision» à prendre était celle de limoger M. Blaszczak, qui, selon lui, tente de «se cacher derrière les généraux».

L'ancien ministre centriste de la défense Tomasz Siemoniak a pour sa part qualifié de «propagande» la promesse maintes fois faite par l'actuel titulaire de ce poste, selon laquelle, la Pologne disposera dans les deux ans de «la plus puissante armée en Europe». «Le roi est nu», a conclu M. Siemoniak.

De son côté, la gauche a dénoncé «le mensonge» et «les manipulations» du pouvoir. D'après les médias polonais, le missile sur lequel on pouvait discerner des inscriptions en cyrillique n'avait pas de tête armée, ce qu'aucune source officielle n'a jamais confirmé à ce jour.

Imposants achats d'armes

La ville de Bydgoszcz, près de laquelle le missile est tombé, abrite d'importantes forces militaires polonaises, des institutions de l'OTAN et des usines d'armement.

Voisine directe de l'Ukraine, la Pologne accueille notamment sur son sol, dans le cadre de l'OTAN, environ 10'000 soldats américains et vient de se lancer dans d'imposants achats d'armes afin de renforcer ses propres capacités de défense.

En juillet, Varsovie avait signé des accords-cadres avec la Corée du Sud portant sur un millier de chars K2, 672 obusiers automoteurs K9A1, 50 avions de combat FA-50 et 288 systèmes lance-roquettes multiples K239 Chunmoo. Par ailleurs, les premiers des 32 avions américains F-35 sont attendus en Pologne dès l'année prochaine.

Mercredi, le ministre Blaszczak a déclaré qu'il comptait signer un contrat avec Washington sur l'acquisition par son pays de 96 hélicoptères Apache et que les premiers lance-roquettes multiples Himars devraient arriver en Pologne courant mai.