Allemagne Un Allemand accusé d'espionnage au Bundestag au profit de la Russie

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25.2.2021 - 15:37

Un Allemand est accusé par le parquet d'avoir transmis des données sur la chambre des députés à la Russie. Cette affaire révélée jeudi est susceptible d'envenimer des relations germano-russes déjà tendues.

Le suspect travaillait pour une entreprise mandatée à plusieurs reprises par le Bundestag pour y effectuer des contrôles de ses ordinateurs portables.

Mais, selon l'hebdomadaire Der Spiegel, cet homme de 55 ans a un passé chargé: ancien officier d'une division blindée de l'armée est-allemande, il a été entre 1984 et 1990 un collaborateur non officiel de la Stasi, la police politique d'ex-RDA, affirme le magazine.

Ses missions au Bundestag lui ont donné «accès à des fichiers PDF contenant les plans des propriétés» de la chambre basse du parlement allemand, située en plein coeur de Berlin, détaille le parquet fédéral, chargé des affaires d'espionnage.

Entre fin juillet et début septembre 2017, le suspect a «décidé de sa propre initiative de transmettre les informations sur les propriétés du Bundestag allemand aux services de renseignements russes», accuse le parquet fédéral de Karlsruhe.

Piratage

Il aurait ainsi transmis ces documents à un employé de l'ambassade russe à Berlin, soupçonné d'être un membre du renseignement militaire russe GRU. Mis en accusation par le parquet fédéral, le suspect risque désormais de passer en procès, si le tribunal compétent donne son feu vert.

Cette affaire d'espionnage n'est pas la première à envenimer les relations germano-russes. La Russie est ainsi accusée d'un piratage informatique à grande échelle qui a visé en 2015 les ordinateurs du Bundestag et les services de la chancelière Angela Merkel, ainsi que l'Otan et la chaîne de télévision francophone TV5 Monde.

Les pirates informatiques s'étaient procuré parallèlement des données personnelles sur une messagerie de la chancelière allemande, sur la période allant de 2012 à 2015. Mme Merkel, qui s'escrime à maintenir envers et contre tout le fil du dialogue avec le président Vladimir Poutine, a elle-même déploré par le passé des tentatives «scandaleuses» de piratage et assuré disposer de «preuves tangibles» de l'implication des forces russes.

Motifs de discorde

La liste des motifs de discorde entre les deux pays n'a cessé de s'allonger ces dernières années.

En août 2019, le meurtre en plein coeur de Berlin d'un Géorgien de la minorité tchétchène par un homme soupçonné d'avoir agi sur ordre de Moscou avait suscité des tensions entre les deux capitales.

Cette affaire s'est soldée depuis fin 2019 par des expulsions par Berlin de diplomates russes pour protester contre leur manque de coopération dans l'enquête. L'auteur présumé de ce meurtre est jugé depuis l'automne à Berlin. Moscou rejette dans ce cas aussi toutes les accusations.

Mais c'est récemment le cas de l'opposant Alexeï Navalny, soigné à Berlin après un empoisonnement qu'il impute aux services russes qui a un peu plus crispé les relations, à quelques mois du 80e anniversaire de l'invasion par les Nazis de la Russie.

Berlin n'a de cesse de demander la libération de l'opposant numéro un au Kremlin, incarcéré dès son retour en Russie le 17 janvier. L'Allemagne, comme la Suède et la Pologne, a en outre expulsé des diplomates russes le 8 février, en représailles à des mesures similaires prises par Moscou contre des diplomates accusés d'avoir participé à des manifestations de soutien à M. Navalny.

Alliés malgré tout

Malgré ces relations tendues, Moscou et Berlin continuent de défendre contre vents et marées leur projet controversé de gazoduc, Nord Stream 2, qui va relier les deux pays, en dépit de l'opposition des Etats-Unis.

Angela Merkel, qui quittera le pouvoir à la fin de l'année après 16 années passées à la chancellerie, considère Nord Stream comme «un dossier économique» dans lequel le gouvernement «a toujours refusé de s'immiscer», selon un porte-parole de la dirigeante allemande.

Berlin est aussi à la manoeuvre pour développer en Europe le vaccin russe anti-Covid, Spoutnik V. Un laboratoire allemand, IDT Biologika, pourrait ainsi participer à la production du vaccin russe.

Angela Merkel a par ailleurs proposé que l'agence allemande des médicaments «soutienne la Russie» dans sa demande d'agrément auprès de l'organisme européen compétent, l'EMA.

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