De nouveaux tirs de roquettes en Irak ont pour la première fois fait un mort dans les rangs américains. L'événement fait redouter samedi plus de tensions dans un pays déjà plongé dans sa plus grave crise politique et sociale depuis des décennies.
Les Etats-Unis avaient récemment promis «une réponse ferme» face à la multiplication des attaques visant leurs intérêts en Irak – non revendiquées mais qui sont pour Washington le fait des factions pro-Iran.
Vendredi soir, 30 roquettes se sont abattues sur la base K1 à Kirkouk, région pétrolière au nord de Bagdad, a indiqué un responsable américain à l'AFP. «Un sous-traitant américain a été tué et plusieurs militaires américains et des membres du personnel irakien ont été blessés», a rapporté la coalition antijihadistes emmenée par les Américains.
Les tirs contre des bases irakiennes abritant des soldats américains ou des représentations diplomatiques américaines se sont intensifiées depuis deux mois.
Forte intensité
Dix attaques ont déjà fait des blessés et un mort dans les rangs des militaires irakiens et provoqué des dégâts matériels jusqu'aux abords de l'ambassade américaine, dans l'ultrasécurisée Zone verte de Bagdad, où les Américains ont depuis déployé armes et blindés en renforts.
Celle de vendredi soir diffère toutefois par son intensité, jamais autant de roquettes n'ayant été tirées sur une seule base. «Les tirs étaient très précis. L'attaque a visé précisément la zone où se trouvent les Américains, près de la salle de réunion», a indiqué un responsable des services de sécurité de la province de Kirkouk à l'AFP.
De hauts commandants de la police irakienne et de la coalition internationale auraient dû s'y retrouver vendredi car ils devaient diriger une vaste opération dans des zones montagneuses où se terrent toujours des cellules du groupe Etat islamique (EI).
Mais, en raison de conditions météorologiques défavorables, l'opération – et donc la réunion – ont été reportées, selon la police.
Pas de revendication
Si aucune des dernières attaques anti-américaines n'a été revendiquée, Washington pointe du doigt les factions armées pro-Iran, dont l'influence ne cesse de grandir et qui sont désormais intégrées aux forces de sécurité irakiennes.
Pour les Américains en Irak, affirme une source de sécurité occidentale à l'AFP, ces factions sont désormais plus menaçantes que l'EI, sur lequel Bagdad s'est déclaré victorieux il y a deux ans.
Dans son communiqué annonçant l'attaque contre la base K1, la coalition a indiqué que les forces irakiennes menaient l'enquête, et que ce seraient elles qui y répondraient. Avec une telle déclaration, «si une escalade est possible, elle est loin d'être certaine», assure Fanar Haddad, spécialiste de l'Irak.
«Surtout, affirme le chercheur à l'AFP, ceux qui poussent pour une escalade à Washington devront composer avec l'aversion du président Donald Trump pour l'idée d'accroître son engagement militaire au Moyen-Orient».
L'Irak, lui, plaide depuis des mois pour que ses deux grands alliés américain et iranien ne se servent pas de son sol comme d'un champ de bataille.
Nouvelle donne
Mais la donne a changé maintenant que l'Iran a renforcé son influence chez son voisin au détriment de Washington, aux abonnés absents ou presque depuis trois mois d'une révolte sans précédent.
Depuis la démission du gouvernement irakien il y a près d'un mois, la République islamique et ses alliés en Irak poussent pour placer un de leurs hommes au poste de Premier ministre. Face à l'intransigeance iranienne, le président Barham Saleh menace aussi de démissionner.
L'instabilité politique a été déclenchée par la pire crise sociale que connaît le deuxième producteur de pétrole de l'Opep.
Les manifestants conspuent les autorités et leur parrain iranien, et paralysent toujours administrations et écoles dans la quasi-totalité des villes du Sud. Samedi, ils sont même parvenus à interrompre pour la première fois depuis trois mois la production – de 100'000 barils par jour – d'un champ de pétrole du sud du pays.
Malgré près de 460 morts et 25'000 blessés, les protestataires promettent de continuer tant qu'ils n'auront pas obtenu la refonte du système de répartition des postes en fonction des ethnies et confessions et le renouvellement d'une classe politique inchangée depuis 16 ans.
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