Eat Art A Nice, l'artiste suisse Spoerri expose ses recyclages poétiques

ATS

12.11.2021 - 11:31

«Tableaux-pièges» où il saisit l'instantané d'un déjeuner, pièges à mots ou autres tapisseries détournées: le Musée d'art moderne et d'art contemporain (Mamac) de Nice, consacre une grande exposition à l'une des figures du Nouveau réalisme, le Suisse Daniel Spoerri.

L'artiste suisse Daniel Spoerri expose à Nice (archives).
L'artiste suisse Daniel Spoerri expose à Nice (archives).
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Keystone-SDA

L'exposition se tiendra jusqu'au 27 mars, date du 92e anniversaire de l'artiste suisse, d'origine roumaine, né sur les bords du Danube à Galati, dans l'Est de la Roumanie. Il vit et continue de créer entre Vienne et son jardin de 16 hectares en Toscane.

Une grande partie des collections du Mamac, ouvert en 1990 sur la Côte d'Azur, est «tournée vers le Nouveau réalisme». Ce mouvement a été fondé en France en 1960 par des artistes comme Yves Klein, Arman, Raymond Hains, Daniel Spoerri ou Jean Tinguely, dans le sillage du critique d'art Pierre Restany, explique Rebecca François, commissaire de l'exposition.

Ce mouvement se fonde sur «un recyclage poétique du réel urbain industriel, publicitaire». Le Mamac qui consacre une salle entière de ses expositions permanentes au Niçois Yves Klein n'avait encore «rien fait sur Spoerri», poursuit Mme François.

C'est désormais chose faite grâce notamment à une pièce maîtresse, qui vient enrichir le fonds du musée niçois, «La Chambre 13», reconstitution réalisée en 1998 par Spoerri de la chambre qu'il occupait à ses débuts à Paris entre 1959 et 1965, à l'Hôtel Carcassonne, au 24 rue Mouffetard.

Don d'une galerie bernoise

«Nous la voulions absolument, mais elle était très difficile à déplacer. La galerie bernoise Henze & Ketterer qui la possédait a fait un geste extraordinaire et en a fait don au Mamac», se réjouit Mme François.

Le musée propose «une déambulation aussi surprenante et fascinante» que celle d'un théâtre forain, plongeant le visiteur dans des pièges et attrapes, cabinets de curiosités et banquets d'un artiste ancien danseur étoile, qui a commencé au côté de son ami suisse Tinguely en collectant pour lui de la ferraille.

C'est avec les «tableaux-pièges», natures mortes tridimensionnelles que Spoerri a rejoint les Nouveaux réalistes en 1960. Le principe est simple: à la fin d'un repas, il fige, en les collant au support, la trace de ce repas (couverts, assiettes, restes de nourriture, emballage...). Il l'appelle le «Eat Art» (des oeuvres et actions mettant en scène la nourriture et nos habitudes alimentaires).

Dans le restaurant réel qu'il a géré à Düsseldorf (Allemagne) entre 1968 et 1972, les clients, qui en avaient les moyens pouvaient repartir à la fin du repas avec leur propre oeuvre.

Mais Spoerri cherchera à se défaire de cette étiquette «d'artiste de la vaisselle sale». Dans sa série de «détrompe-l'oeil», il appose un objet réel sur une toile ou une tapisserie chinée aux puces et s'interroge sur les frontières entre réalité et illusion. Comme cette douche en trois dimensions collée sur un paysage de cascade kitsch.

Nouveau réalisme

«Daniel Spoerri était l'un des plus jeunes membres du Nouveau réalisme», confie à l'AFP Youri Vincy, directeur de la galerie parisienne Lara Vincy, qui a prêté une oeuvre. «C'est un grand fédérateur. Il a réuni et exposé de nombreux artistes», ajoute-t-il.

A la fin des années 1960, il avait notamment fondé la Eat Art Gallery ou des artistes comme Cesar, Ben ou Arman avaient exposé des créations éphémères comestibles tandis que des peintres comme Pierre Soulages ont participé à certains de ses banquets.