Astronomie Découverte du plus vieux trou noir de l'univers, né à «l'aube cosmique»

AFP

18.1.2024

Une équipe internationale d'astronomes a découvert le plus ancien trou noir, qui existait déjà à l'aube cosmique, quand l'Univers était vieux d'à peine 400 millions d'années, selon une étude parue mercredi.

Cette image annotée fournie par la NASA le lundi 6 novembre 2023 montre une vue composite des données de l'observatoire de rayons X Chandra de la NASA et du télescope spatial James Webb indiquant un trou noir en expansion, 470 millions d'années seulement après le big bang. Il s'agit du plus ancien trou noir découvert à ce jour. (NASA via AP)
Cette image annotée fournie par la NASA le lundi 6 novembre 2023 montre une vue composite des données de l'observatoire de rayons X Chandra de la NASA et du télescope spatial James Webb indiquant un trou noir en expansion, 470 millions d'années seulement après le big bang. Il s'agit du plus ancien trou noir découvert à ce jour. (NASA via AP)
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Cette détection fait reculer d'«environ 200 millions d'années celle d'un trou noir massif», remarque à l'AFP Jan Scholtz, astrophysicien à l’Institut de cosmologie Kavli de l'Université britannique de Cambridge.

Elle «va alimenter une nouvelle génération de modèles théoriques» pour expliquer un tel phénomène dans l'Univers jeune, il y a plus de 13 milliards d'années, a ajouté ce co-auteur de l'étude parue dans la revue Nature.

Il faut imaginer un objet d'une masse estimée à 1,6 million de fois celle de notre Soleil. Invisible, comme tous les trous noirs, il absorbe la matière environnante en émettant à sa périphérie une quantité phénoménale de lumière.

C'est cette lumière qui a permis de détecter la galaxie au cœur de laquelle il est tapi, baptisée GN-z11 lors de l’annonce de sa découverte en 2016 à l'aide du télescope spatial Hubble.

GN-z11 était alors la galaxie la plus ancienne, et donc la plus lointaine, observée par Hubble. Jusqu'à l'arrivée en 2022 du télescope spatial James Webb, qui a permis la détection du trou noir de GN-z11.

Cette détection s'ajoute à d'autres réalisées avec le James Webb, et qui révèlent un Univers jeune abritant des objets beaucoup plus lumineux qu'attendus.

Le trou noir détecté par l'équipe internationale menée par Cambridge est daté à 430 millions d'années après le Big bang. C'est l'époque de l'aube cosmique, quand au sortir des âges dit «sombres» naissent les premières étoiles et galaxies.

Plusieurs scénarios

Le problème, pour un trou noir de cette taille, est de comprendre comment il a pu grossir aussi vite. Il faut normalement des durées se comptant en plusieurs centaines de millions ou plusieurs milliards d'années pour ceux découverts plus tard.

Ses caractéristiques «suggèrent une croissance plus rapide et plus précoce que celle des autres trous noirs connus aux époques très reculées», explique à l'AFP Stéphane Charlot, astrophysicien à l'Institut d'astrophysique de Paris et co-auteur de l'étude.

Et par conséquent des «mécanismes de formation des trous noirs dans l'univers jeune qui pourraient être différents de ceux que nous connaissons dans l'univers plus proche», ajoute-t-il.

Si on s'en tient aux scénarios classiques, «l'Univers est alors trop jeune pour abriter un trou noir aussi massif, donc nous devons envisager d'autres façons pour son apparition», observe le professeur Roberto Maiolino, astrophysicien à Cambridge et premier auteur de l'étude, cité dans un communiqué.

Les théoriciens imaginent qu'un tel objet soit né «gros», à partir de l'explosion d'une étoile supermassive en fin de vie, ou bien de la concentration rapide d'un nuage de gaz dense, sans passer par la phase de formation d'étoiles.

Une fois bien né, le trou noir de GN-z11 se serait alors gavé du gaz environnant pour grossir rapidement. Et d'autant plus facilement que «les observations semblent indiquer une forte densité de ce gaz», selon M. Charlot.

L'étude de Nature «n'écarte aucun de ces scénarios» selon Jan Scholtz, qui parie sur les capacités hors du commun d'observation du télescope James Webb pour faire la lumière sur le phénomène.

«On peut s'attendre à en détecter d'autres quand nous aurons un plus grand nombre d'observations en profondeur de plus larges portions du ciel», espère l’astrophysicien.