La généticienne française Emmanuelle Charpentier dans un laboratoire, en mai 2015 à Braunschweig, dans le nord de l'Allemagne
Les généticiennes française Emmanuelle Charpentier (g) et américaine Jennifer Doudna, en octobre 2015 à Oviedo, en Espagne
Emmanuelle Charpentier, prix Nobel «haute couture» pour les gènes
La généticienne française Emmanuelle Charpentier dans un laboratoire, en mai 2015 à Braunschweig, dans le nord de l'Allemagne
Les généticiennes française Emmanuelle Charpentier (g) et américaine Jennifer Doudna, en octobre 2015 à Oviedo, en Espagne
Prix et honneurs pleuvent sur elle depuis sa découverte avec l'Américaine Jennifer Doudna, d'un outil «révolutionnaire» de modification des gènes. A 51 ans, Emmanuelle Charpentier décroche le prix Nobel, la récompense suprême à laquelle elle a du mal à croire.
«Bizarrement, on m'a dit plusieurs fois (que j'allais recevoir le prix) mais maintenant que ça arrive, ça ne semble pas vrai, alors qu'évidemment c'est vrai», a-t-elle confié mercredi lors d'une conférence de presse à distance.
Installée en Allemagne, la Française a trouvé en 2011/2012, avec l'Américaine Jennifer Doudna, co-récipiendaire du Nobel, une technique d'édition du génome baptisée CRISPR-Cas9, apte à éliminer et à ajouter des fractions de matériel génétique avec une extrême précision.
Sorte de ciseaux moléculaires, ce procédé «permet de faire de la chirurgie haute couture du gène», expliquait en 2016 à l'AFP Emmanuelle Charpentier. «Le but ultime» de cette technique «révolutionnaire» est de «corriger des maladies génétiques humaines», ajoutait cette femme brune au tempérament volontaire.
A cette fin, elle a cofondé une société de biotechnologie, CRISPR Therapeutics, alliée au groupe Bayer, qui a permis des avancées notamment dans la lutte contre certaines maladies du sang ou certains cancers.
En 2019, sa technique a été expérimentée sur une Américaine qui souffrait d'une maladie génétique du sang, la drépanocytose. Des cellules-souches de sa moelle osseuse ont été prélevées, modifiées et réimplantées. Avec la même méthode, une Allemande de 19 ans a été soignée pour une autre maladie du sang, la bêta-thalassémie.
- «Message» aux jeunes filles -
Depuis qu'elle a découvert ce «couteau suisse» de la génétique, Emmanuelle Charpentier a accumulé plus d'une trentaine de prix et honneurs. «Je n'imaginais pas que je pourrais faire un jour une telle découverte».
Ce qui la rend heureuse, c'est d'obtenir des résultats avec son équipe: «Je fais de la recherche (...) parce que j'ai envie de savoir».
Déjà distinguée par le «Prix pour les femmes et les sciences», c'est aux jeunes filles qu'elle a tout de suite pensé mercredi. Ce prix Nobel obtenu par un duo féminin est «un message très fort» pour elles.
A-t-elle rencontré des obstacles dans sa carrière parce qu'elle était une femme? «Mon principal problème était d'être étrangère et de ne pas faire partie de la +famille+ dans les différentes institutions pour lesquelles j'ai travaillé», expliquait-elle.
Originaire de la région parisienne, Emmanuelle Charpentier est la fille d'un responsable de jardins publics et d'une surveillante en psychiatrie.
Après des études de biochimie et de microbiologie à l'Université Pierre et Marie Curie à Paris, elle obtient son doctorat à l'Institut Pasteur puis quitte la France à 27 ans pour les Etats-Unis.
Elle s'installe ensuite en Autriche puis en Suède avant de rejoindre l'Allemagne où elle prend la direction de l'Institut Max Planck de biologie des infections à Berlin.
Après l'annonce du Nobel, le président Emmanuel Macron a salué dans un tweet la lauréate, en ajoutant que la France devait «savoir retenir tous les talents en recherche fondamentale».
«Ca n'est pas parce que je veux pas faire de la recherche en France, c'est parce que la vie m'a amenée à être un électron libre, à beaucoup voyager», a répliqué Emmanuelle Charpentier, mercredi soir sur RTL.
L'institut Max Planck «offre énormément de moyens, et les moyens que j'ai actuellement à Berlin, je pense que j'aurais du mal à les avoir en France», a-t-elle ajouté.
La chercheuse avait admis «faire partie des gens qui sont workaholic», qui se donnent «à 200%«.
«Ca n'a pas été toujours évident sur le plan personnel», confiait cette sportive qui se détend en nageant et en faisant du vélo. «Il faut être solide», a-t-elle ajouté mercredi.
Ce que ce prix Nobel va changer ? «J'espère que ça va pouvoir faire passer le message, extrêmement important étant donné la situation actuelle, de continuer à soutenir la recherche fondamentale en microbiologie et en maladies infectieuses», a-t-elle confié, avant d'aller fêter sa récompense à Berlin.
pcm-rap-mw-juc/may
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