Le parachute rouge de plongée émerge à la surface des flots à quelques encablures du sud de la Côte-sous-le-Vent en Guadeloupe. «Ce sont les prélèvements qui remontent», commente Emmanuelle Perié-Bardout, responsable de la mission Under The Pole, qui explore depuis une quinzaine d'années les profondeurs des mers du globe.
Des membres de la mission Under The Pole photographient les fonds marins, le 16 avril 2023 au large de la Guadeloupe
Des membres de la mission Under The Pole photographient les fonds marins, le 16 avril 2023 au large de la Guadeloupe
Emmanuelle Perié-Bardout (c), responsable de la mission Under The Pole, et son mari Ghislain Bardoit (g), au large de Le Moule, le 16 avril 2023 en Guadeloupe
Des membres de la mission Under The Pole plongent pour photographier les fonds marins, le 16 avril 2023 en Guadeloupe
Un plongeur de la mission Under The Pole, photographie les fonds marins, le 16 avril 2023 au large de la Guadeloupe
En Guadeloupe, l'expédition Under the Pole explore la vie des grandes profondeurs - Gallery
Des membres de la mission Under The Pole photographient les fonds marins, le 16 avril 2023 au large de la Guadeloupe
Des membres de la mission Under The Pole photographient les fonds marins, le 16 avril 2023 au large de la Guadeloupe
Emmanuelle Perié-Bardout (c), responsable de la mission Under The Pole, et son mari Ghislain Bardoit (g), au large de Le Moule, le 16 avril 2023 en Guadeloupe
Des membres de la mission Under The Pole plongent pour photographier les fonds marins, le 16 avril 2023 en Guadeloupe
Un plongeur de la mission Under The Pole, photographie les fonds marins, le 16 avril 2023 au large de la Guadeloupe
Depuis plus de trois heures, elle assure avec un autre membre de l'équipe «la sécurité de surface» pour les quatre plongeurs chargés de ramener des prélèvements, des photos et des mesures de toute la vie sous-marine de la zone mésophotique, située entre 30 et 200 mètres de profondeur, encore mal étudiée.
«Comme sur terre, ces forêts animales, faites de coraux noirs, de gorgones ou d'éponges, doivent être connues pour mesurer les services rendus par ces écosystèmes et mieux les protéger», précise Emmanuelle Bardout, navigatrice, plongeuse et directrice, avec son mari Ghislain, de la mission.
Avec les échantillons contenus dans les sacs qui seront analysés une première fois sur le bateau par une scientifique, une petite plaque en plastique fait passer un message à ceux qui attendent en surface: une estimation d'horaire du retour en surface pour une des deux palanquées, un «tout va bien, tel please».
«Il demande sa liseuse pour lire ou regarder des films lors des paliers de décompression, qui sont longs, après ce temps sous l'eau et à cette profondeur», sourit Emmanuelle en faisant descendre le téléphone étanche par le parachute.
«La mission en Guadeloupe, qui dure au total 2 mois et demi, c'est la continuité d'un programme de recherche de 10 ans baptisé Deep Life qui réunit une quarantaine de chercheurs», raconte-t-elle, en scrutant l'horizon au cas où un parachute jaune, «alerte sur un problème au fond», ne sorte de la mer d'huile de cette douce journée d'avril. Deep life est soutenue par de nombreux sponsors publics et privés.
Plastique et mortalité des coraux
Depuis 2021, l'équipée s'est déjà rendue en Arctique, aux Canaries et prévoit quelques mois en Méditerranée courant 2023. Et d'ici deux ans, les palanquées d'Under the Pole devraient revenir dans les eaux caribéennes pour observer l'évolution des forêts animales de la zone mésophotique.
Quand les plongeurs remontent à bord, le Zodiac met les gaz pour rallier le Why, le bateau d'Under The Pole qui héberge une quinzaine de personnes à son bord: scientifiques, plongeurs, mécaniciens, médecin, photographe, cuisinier mais aussi l'institutrice des enfants du couple Bardout, 11 et 7 ans qui suivent leur parents dans toutes leurs aventures.
«Une bonne bande de copains», qui se connaît depuis longtemps et qui sait trouver «l'équilibre entre le travail de chacun, la vie en communauté et la promiscuité imposée par le petit espace du bateau», ajoute Ghislain Bardout. Il espère parvenir à rassembler les quelque 8 millions d'euros nécessaires au financement du Why not, le bateau des futures missions, plus grand et plus adapté à l'exploration scientifique que l'actuel.
Ghislain fait partie des plongeurs de grande profondeur qui constatent avec étonnement la très grande diversité d'espèces sous-marines des eaux locales, quand d'autres terrains d'étude montraient une espèce dominante, dite «ingérieure» dans la zone mésophotique.
Malgré toute la résilience de la zone mésophotique foisonnante de vie, les explorateurs dressent un triste constat: un haut niveau de mortalité des coraux de surface, régulièrement évalué à plus de 80%, mais aussi des déchets en quantité.
«Cela fait plusieurs décennies qu'on trouve du plastique dans les poissons à toutes les profondeurs», souligne Luiz Rocha, chercheur à l'université des sciences de Californie, spécialiste des poissons, venu renforcer ponctuellement la mission Under the Pole.
Il porte aussi un message d'alerte sur les questions de surpêche, y compris quand elle est côtière, comme en Guadeloupe où, assurent les plongeurs, les casiers de pêche sont nombreux, parfois abandonnés. «En remontant l'autre jour, raconte l'un d'eux, on a croisé deux balistes en pleine parade nuptiale, mais de part et d'autre d'un casier. C'était trop triste».