Etude Le changement climatique modifie l'alimentation des oiseaux

uc, ats

15.2.2022 - 17:00

Avec le réchauffement, les insectes figurant au menu des oiseaux change, ce qui a des conséquences pour certaines espèces en période de couvaison (archives).
Avec le réchauffement, les insectes figurant au menu des oiseaux change, ce qui a des conséquences pour certaines espèces en période de couvaison (archives).
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Le buffet ouvre plus tôt, mais il n'est plus aussi diversifié, sain et abondant. C’est ainsi qu'une étude des instituts Eawag et WSL décrit la situation des oiseaux insectivores sous des latitudes tempérées pendant la couvaison. Une conséquence du réchauffement.

Keystone-SDA, uc, ats

Les rejetons d'oiseaux chanteurs, comme le roitelet ou l'hirondelle, ont besoin de deux à trois semaines pour être assez grands et forts avant de quitter le nid. Ils doivent recevoir la plus grande quantité de nourriture et la meilleure qualité possible dans ce laps de temps.

Au menu, on trouve principalement des insectes, non seulement terrestres comme les coléoptères et les abeilles, mais aussi aquatiques comme les trichoptères ou les moustiques, ont indiqué mardi l'Institut de recherche sur l'eau Eawag et l'Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL) dans un communiqué commun.

L'ornithologue Ryan Shipley a mené une étude dans le cadre de l'initiative de recherche Blue-Green-Biodiversity lancée par ces deux instituts. Il a examiné comment l’abondance d'insectes et la période de reproduction de diverses espèces d'oiseaux chanteurs-migrateurs ont évolué en 25 ans dans le nord-est des Etats-Unis en lien avec le changement climatique.

Données uniques

À l'Université Cornell, dans l'État de New York, les insectes ont été comptés, mesurés et classés jour après jour de 1989 à 2014. «Ces données sont uniques», indique Ryan Shipley, cité dans le communiqué: «Nous voyons non seulement comment le nombre total d'insectes a évolué en 25 ans, mais aussi les changements en termes de masse corporelle, de diversité et de la présence de certaines espèces».

Le chercheur a sélectionné sept espèces de petits oiseaux qui se reproduisent à diverses périodes. Les données climatiques montrent, comme chez nous, une hausse des températures au début du printemps. L’émergence des insectes a lieu plus tôt, tout comme la période d’effloraison. Les insectes aquatiques émergent en moyenne une semaine plus tôt et les insectes terrestres presque deux semaines plus tôt que dans les années 1990.

Pour les insectes aquatiques, les données montrent en outre que leur nombre augmente beaucoup plus rapidement en avril qu'auparavant mais diminue drastiquement en mai. La période où l’approvisionnement en insectes aquatiques est riche s'est donc raccourcie et a avancé dans la saison de reproduction, selon ces travaux publiés dans la revue Current Biology.

Pendant la deuxième moitié de la période de reproduction, les insectes terrestres sont dominants, leur nombre augmente continuellement jusqu'à mi-juillet, quoique dans une moindre mesure que par le passé.

Tandis que les oiseaux qui se reproduisent tôt dans la saison trouvent essentiellement des insectes aquatiques, ceux qui commencent à se reproduire à la mi-mai ne disposent plus que d'insectes terrestres.

Omega-3 au menu

Or tous les insectes ne se valent pas: les insectes aquatiques sont de meilleure qualité que les insectes terrestres. Leur teneur en acides gras Omega-3 est plusieurs fois supérieure. «Les oisillons qui ingèrent davantage de ces précieuses graisses grandissent plus vite et peuvent quitter le nid plus rapidement», explique Ryan Shipley.

Il semble que les oiseaux qui pondent précocement comme le merle bleu de l'Est, profitent de cette nouvelle situation, car ils trouvent plus d'insectes aquatiques. Dans la région étudiée, leur population a augmenté depuis 1966. En revanche, le nombre d'hirondelles bicolores, qui couvent plus tard et doivent presque exclusivement se nourrir d'insectes terrestres a fortement diminué.

On pourrait s'attendre à ce que les oiseaux s'adaptent au nouveau calendrier des insectes et commencent à couver plus tôt. «C'est effectivement ce qui se passe. Toutefois, pas dans la même mesure que la présence décalée des insectes dans la saison», précise Ryan Shipley. En 25 ans, la période de couvaison des espèces d'oiseaux observées a avancé de 3 à 7 jours.

Contrairement à de nombreuses régions des Etat-Unis et d'Europe, le nombre total d'insectes dans la région étudiée est resté stable entre 1989 et 2014. Le fait que la situation ait empiré pour certains oiseaux malgré cela montre à quel point le timing et la qualité de la ressource alimentaire sont décisifs pendant la période de couvaison, conclut l'Eawag.

Ryan Shipley entend maintenant mener une étude de grande ampleur avec des données provenant d'Europe, du Japon et de Russie.