Phénomène intéressant Les avalanches fonctionnent comme les séismes

uc, ats

25.7.2022 - 17:00

Des scientifiques de l’EPFL et de l'Institut WSL pour l'étude de la neige et des avalanches (SLF) ont affiné leur compréhension des avalanches de plaques, les plus meurtrières. Leurs résultats ouvrent la voie à une meilleure prévision des risques.

L'analyse vidéo de cette avalanche de plaque, à laquelle le snowboardeur a échappé de justesse, a permis de confirmer l'hypothèse des chercheurs.
L'analyse vidéo de cette avalanche de plaque, à laquelle le snowboardeur a échappé de justesse, a permis de confirmer l'hypothèse des chercheurs.
ATS

Keystone-SDA, uc, ats

En agrandissant l’échelle de simulation des avalanches de plaques du mètre à la centaine de mètres, les chercheurs ont fait une découverte qui modifie notre compréhension de leur fonctionnement, ont indiqué lundi l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et le SLF dans un communiqué commun.

La découverte, publiée dans la revue Nature Physics, révèle l’apport des grandes capacités de calcul à une meilleure observation de phénomènes physiques complexes, selon ses auteurs.

Johan Gaume, directeur du Laboratoire de simulation des avalanches à l’EPFL et affilié au SLF, et son doctorant Bertil Trottet ont observé que lors du déclenchement de l’avalanche, la vitesse de propagation de la rupture dépasse les 100 mètres par seconde, une vitesse qui va bien au-delà des mesures expérimentales, de l’ordre de 30 mètres par seconde.

Effet de cisaillement

L’avalanche de plaque se caractérise par une cassure linéaire très nette au sommet de la masse de neige qui se détache. Elle peut se produire lorsqu’une couche dense, la plaque, repose sur une couche fragile, très peu cohésive.

Lors de l’avalanche, par exemple au passage d’un skieur, la couche fragile s’effondre et la plaque perd son soutien. La flexion de la plaque est alors l’un des moteurs de la propagation de la rupture. C’est du moins ce qui avait été démontré au niveau expérimental et numérique jusqu’alors avec des longueurs de plaques testées et simulées de moins de deux mètres.

En modélisant des systèmes de plaque de l’ordre de la centaine de mètres, les chercheurs ont remarqué que, lorsque la distance de propagation dépasse une certaine longueur, trois à cinq mètres environ, la traction de la plaque devient alors le seul moteur du processus. Cela induit une rupture de la couche fragile en cisaillement de manière similaire à la rupture observée lors de rares séismes de grande magnitude.

«Nous sentions que nous tenions quelque chose d’important, mais il nous fallait des données expérimentales pour le confirmer», indique Johan Gaume, cité dans le communiqué.

Analyse vidéo

Lors d’un colloque, Johan Gaume découvre qu’un collègue du Centre d’Information Avalanche du Colorado, Ron Simenhois, travaille sur une technique d’analyse vidéo de pointe. Au même moment, un ancien étudiant en sciences et ingénierie de l’environnement de l’EPFL, Mathieu Schaer, aujourd’hui snowboardeur professionnel et ingénieur à MétéoSuisse, lui envoie une vidéo de lui échappant de peu à une avalanche de plaque de grande envergure.

«Nous avions des données nivologiques sur cette avalanche survenue au Col de Cou, dans les Alpes suisses, et la vidéo était de grande qualité, car destinée à un film sur le snowboard. Grâce à l’analyse vidéo et à ces paramètres, nous avons pu valider une première fois notre modèle», explique le chercheur.

En tout, quatre avalanches réelles ont pu confirmer le passage du mode «anticrack» au mode de propagation dit «supershear», observé lors de certains séismes. Dans la continuité de ces résultats, le SLF développe actuellement à Davos un dispositif expérimental à plus grande échelle afin d’aller encore plus loin dans la compréhension du processus.

Ces résultats permettront de formuler de nouvelles hypothèses qui aideront à simplifier les modèles numériques et à réduire considérablement les temps de calcul de modélisation des avalanches, les faisant passer de plusieurs jours à quelques minutes.

Ces nouveaux modèles pourront servir à évaluer la taille des avalanches, un paramètre crucial pour la gestion et la prévision du risque, notent encore les auteurs.

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