Santé Les femmes sont plus exposées aux dangers des pesticides

Relax

19.5.2023 - 11:34

(ETX Daily Up) – Si l'Atlas des pesticides, publié pour la première fois en langue française, révèle les cultures faisant le plus l'objet d'épandages en France, ce passionnant document pointe une autre problématique d'envergure internationale: les inégalités de genre en matière d'exposition aux dangers des pesticides.

Les femmes sont plus exposées aux dangers des pesticides, ne serait ce que pour des questions biologiques compte tenu de leur organisme davantage sensible aux hormones, perturbés par les produits chimiques.
Les femmes sont plus exposées aux dangers des pesticides, ne serait ce que pour des questions biologiques compte tenu de leur organisme davantage sensible aux hormones, perturbés par les produits chimiques.
Capuski / Getty Images

Quand on parle d'agriculture, on a souvent à l'esprit l'image de l'homme qui cultive les champs et de sa femme qui gère la maison et la comptabilité. Or, si les schémas de vie des couples agriculteurs sont bien plus nuancés que ce cliché, il y a une réalité face à l'usage des pesticides: les femmes sont davantage exposées aux dangers des produits chimiques quand on envisage la problématique à l'échelle de la planète.

L'Atlas des pesticides, concocté par la Fondation Heinrich Böll, Friends of the Earth Europe, BUND, le Pesticide Action Network Europe et La Fabrique écologique, aborde cette épineuse question souvent peu relayée alors que près de 70% des femmes salariées en Asie du sud et plus de 60% en Afrique subsaharienne travaillent dans l'agriculture. «Leur participation à ce secteur est sans doute sous-estimée», indique même ce document riche en chiffres clés et en infographies, ajoutant que «l’agriculture de subsistance, les tâches familiales non payées et le travail saisonnier, qui incombent souvent aux femmes et aux filles, ne sont généralement pas pris en compte».

Concrètement, on parle de plantations de café en Afrique du Sud, de bananeraies au Costa Rica ou de champs de culture de fleurs au Kenya. Dans ce dernier cas, l'Atlas donne un exemple très concret sur la façon dont les femmes sont exposées aux dangers des pesticides de manière insidieuse. Elles s'occupent de désherber sinon de préparer les fleurs, en les coupant et en les emballant, et aucun équipement de protection n'est prévu pour elles. Les femmes «présentent plus souvent des symptômes d’empoisonnement que les hommes, chargés de la pulvérisation des pesticides», révèle le document.

Vulnérables par manque d'alphabétisation et de formation

L'autre problématique, c'est le manque d'instruction. Au Népal, 75% des femmes qui travaillent dans l'agriculture ne savent ni lire ni comprendre la toxicité des produits relayée par les étiquettes. Pourtant, elles sont 66% à décider de l'utilisation de pesticides. En fait, les filles et les femmes sont vulnérables face à cet usage parce que leur taux d'alphabétisation est plus faible et que leur accès aux formations est plus limité. Cette inégalité de genre face aux dangers des pesticides est une sérieuse problématique de santé parce que le corps d'une femme n'est pas exposé de la même manière que celui d'un homme. «Les personnes de sexe féminin ayant généralement une plus grande proportion de masse grasse, elles sont plus susceptibles de stocker les polluants qui s’accumulent dans les tissus adipeux», révèle l'Atlas. Par ailleurs, elles sont davantage vulnérables face aux produits repérés comme des perturbateurs endocriniens. Pourquoi? Les femmes disposent «de plus de tissus sensibles aux hormones». Pour les associations écologistes et organismes de défense de l'environnement qui ont écrit ce rapport, l'usage de pesticides n'est pas étranger au développement de l'endométriose, cette maladie qui peut entraîner d'intenses douleurs durant les périodes menstruelles et l'infertilité. Cette réalité est d'autant plus un problème que l'on estime à 385 millions le nombre d'intoxications aigües et non intentionnelles par les pesticides chaque année. «Toutefois, les chiffres ne permettent pas d’estimer le taux d’incidence de ces empoisonnements chez les femmes, car la recherche sur la santé au travail manque de données ventilées par sexe et de perspectives de genre», alerte l'Atlas.

Edité d'abord en octobre dernier comme le précise Euractiv, le média spécialisé dans les affaires européennes, cet Atlas des pesticides est riche d'enseignements à plus d'un titre, parce qu'il vient cette fois d'être publié en langue française. Des données spécifiques à l'agriculture tricolore ont ainsi été ajoutées. On retiendra que la France est la troisième plus grande consommatrice de pesticides en Europe. Parmi les 453 produits approuvés par l'Union européenne, elle en utilise 291, contre 298 en Grèce et 296 en Espagne. Enfin, on obtient une idée concrète des cultures qui font le plus l'objet d'épandage, à savoir dans l'ordre les pommes, les pêches, la pomme de terre, la vigne, la tomate, l'abricot, le poireau, la prune, la cerise et la carotte.