SociétéLes jeunes peinent encore à prendre le pouvoir au travail
Relax
22.2.2023 - 09:37
(ETX Daily Up) – Les jeunes générations ont un rapport au travail différent de celui de leurs aînés. De quoi pousser de nombreuses entreprises à adopter de nouveaux modèles de managements plus responsabilisants pour attirer ces jeunes talents. Mais ces derniers peinent encore à être intégrés aux processus de décision.
ETX Studio
22.02.2023, 09:37
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C’est du moins ce qu’affirme l’enquête «Jeunes et pouvoir au travail» de Youth Forever. L’association française a analysé une trentaine de cas concrets et de dispositifs de gouvernance visant à donner du pouvoir à la jeunesse dans le monde de l’entreprise, et a mené de nombreux entretiens avec ceux qui y ont participé. Elle a constaté que ces initiatives peinent à convaincre. La raison? Elles sont «coûteu[ses], chronophages et souvent perçu[e]s comme plus symboliques qu’utiles», notent les autrices de l’étude.
Ces dix dernières années, de nombreuses entreprises ont mis en place des dispositifs de ce genre pour accommoder et fidéliser une génération en quête de sens et d’utilité. Parmi elles, figurent des sociétés du CAC 40 dont Accor. Le groupe a lancé, en 2015, un «shadow comex» pour impliquer davantage ses collaborateurs de moins de 35 ans dans ses décisions. Ce «comité de l’ombre» est un organe miroir du comité exécutif du groupe. Il est chargé d’examiner et d’étudier les mêmes problématiques que son grand frère officiel.
De son côté, Air France a opté pour le mentorat inversé, à l’instar de Harmonie Mutuelle ou d’AXA. Le principe: proposer aux «digital natives», ces jeunes nés avec l'avènement de l'ère numérique, d’aider leurs responsables plus âgés à mieux comprendre les mutations à venir, notamment sur les sujets liés à la révolution digitale.
Repenser les modes de management
Paradoxalement, ces initiatives peuvent créer de la frustration chez les jeunes qu’elles cherchent pourtant à valoriser. «Une fois lancés, nous n’avons pas été formés ou briefés sur la mission. Nous ne savions même pas combien de temps ça allait durer. Le seul + c’était de rencontrer des jeunes d’autres départements», déplore un jeune membre de l'un de ces dispositifs, cité dans l'étude pilotée par Youth Forever.
La démarche derrière ces instances de gouvernance peut également être mal comprise par celles et ceux qui y participent. Ces derniers peuvent se sentir frustrés à l’idée de ne pas être intégrés aux organes décisionnaires traditionnels, comme leurs collègues plus expérimentés. «On n’a bossé que sur de la prospective, en chambre, loin des décisionnaires. C’était intéressant mais ça ne servait à rien, et ça nous prenait beaucoup trop de temps», regrette un autre membre d’un dispositif «jeune et pouvoir».
La pertinence de ces dispositifs peut aussi être questionnée, à l’heure où de nombreux salariés se plaignent d’un sentiment de surcharge permanente. En effet, 60% des professionnels français estiment que leur charge de travail a augmenté ces cinq dernières années, selon une récente étude de l’institut Montaigne. Peu d’actifs appartenant aux générations Y et Z sont enclins à s’investir dans des organes décisionnaires «pour jeunes», en plus de leurs attributions habituelles.
Pourtant, les dirigeants ont tout intérêt à associer la jeunesse à la prise de décision. «Les jeunes font des liens que les adultes ne font plus: leur conscience au monde est différente. De même que l’impératif de cohérence qui les anime permet de faire des liens qui n’étaient pas évident pour nous [...] La gouvernance doit révéler ce que l’on ne voit pas», considère Pierre Hurtel, fondateur du cabinet de conseil en management Matière à Réflexion, cité dans l’étude «Jeunes et pouvoir au travail».
Les entreprises doivent être réellement à l’écoute des doléances et des aspirations de leurs jeunes employés pour rendre leurs instances de gouvernance plus inclusives et intergénérationnelles. Mais gare au miroir aux alouettes! Les membres des générations Y et Z n’ont pas forcément réponse à tout et les «mad skills» (compétences atypiques, ndlr) qu’ils mentionnent dans leur CV ne font pas nécessairement d’eux des experts en innovation. Il est donc important de croiser les points de vue et les sensibilités pour repenser les modes de management en profondeur. Et contenter les salariés de tout âge.