Thomas Pesquet a beau rejouer une saison bis dans les étoiles, l'engouement qu'il soulève sur Terre ne retombe pas: depuis un mois qu'il flotte en orbite, l'astronaute français surfe sur une popularité au sommet, due tant à sa personnalité qu'à une mécanique de communication bien huilée.
Capture d'écran d'une retransmission vidéo d'une conférence de presse de Thomas Pesquet, le 30 avril 2021
L'astronaute italien Luca Parmitano à son retour sur Terre au Kazakhstan, le 6 février 2020
Peu avant son départ, l'astronaute français Thomas Pesquet confiait à la presse (ici en Floride le 19 avril 2021) que sa deuxième mission pourrait être "plus difficile"
L'équipage de Crew Dragon (de g à d: Thomas Pesquet, Megan McArthur, Shane Kimbrough et Akihiko Hoshide) avant son décollage depuis Cap Canaveral en Floride, le 23 avril 2021
Thomas Pesquet: star de l'espace, as de la com' - Gallery
Capture d'écran d'une retransmission vidéo d'une conférence de presse de Thomas Pesquet, le 30 avril 2021
L'astronaute italien Luca Parmitano à son retour sur Terre au Kazakhstan, le 6 février 2020
Peu avant son départ, l'astronaute français Thomas Pesquet confiait à la presse (ici en Floride le 19 avril 2021) que sa deuxième mission pourrait être "plus difficile"
L'équipage de Crew Dragon (de g à d: Thomas Pesquet, Megan McArthur, Shane Kimbrough et Akihiko Hoshide) avant son décollage depuis Cap Canaveral en Floride, le 23 avril 2021
Thomas Pesquet a beau rejouer une saison bis dans les étoiles, l'engouement qu'il soulève sur Terre ne retombe pas: depuis un mois qu'il flotte en orbite, l'astronaute français surfe sur une popularité au sommet, due tant à sa personnalité qu'à une mécanique de communication bien huilée.
Les méthodes ne datent pas d'hier. «Les astronautes ont toujours fonctionné comme ambassadeurs des agences spatiales, qui ont besoin d'incarnation», souligne le sociologue des sciences, Arnaud Saint-Martin.
Les vols habités viennent donner de la chair au secteur spatial, «souvent perçu comme abstrait», explique à l'AFP ce chercheur au CNRS. A l'époque d'Apollo 11, dans les années 1960, «la Nasa parlait de +propagande+, au sens où il fallait atteindre le public, ce qui s'avère utile quand il faut justifier les budgets».
En Europe, ces vols revêtent un caractère plus exceptionnel que chez les Américains et les Russes, où les astronautes sont presque devenus banals.
Thomas Pesquet a joui d'une aura supplémentaire car il était le premier Européen à voler avec Space X. Son envol, fin avril, s'est «fondu dans l'engouement» pour la société d'Elon Musk et sa mise en scène futuriste, analyse Arnaud Saint-Martin.
Génération 2.0
Quand l'équipe des six astronautes européens, dont Thomas Pesquet, a été recrutée en 2009, l'ESA avait «érigé en priorité la capacité des candidats à communiquer», raconte Jules Grandsire, en charge de la communication de l'agence spatiale européenne. C'est donc un groupe rodé à la com' qui a débarqué en orbite, en même temps que les réseaux sociaux se généralisaient: un cocktail idéal pour donner une nouvelle dimension interactive aux missions et booster leur visibilité.
La recette a pris. «En 2013, la mission de Luca Parmitano a recueilli un énorme engouement en Italie, à des niveaux que je n'avais pas connus avant. En me promenant avec Luca dans Rome, les gens nous arrêtaient, nous remerciaient», se souvient Jules Grandsire.
Un impact d'autant plus fort auprès des jeunes que les enseignants ont construit des programmes éducatifs autour des expériences scientifiques menées dans l'ISS. Au Royaume-Uni, pas moins d'une école sur trois a suivi le séjour dans l'ISS de Timothy Peake (de fin 2015 à juin 2016).
«Pas en titane»
Les astronautes bénéficient tous d'une belle notoriété dans leurs pays respectifs, mais Thomas Pesquet semble particulièrement doué pour partager son expérience. «Ses messages sont sympas, jamais dans le conflit mais pas complètement consensuels. Il sait activer les bons messages au bon moment: sur la planète, la diversité...», observe le sociologue Arnaud Saint-Martin.
«Il fait son boulot comme un pro, y compris avec les journalistes qu'il accueille avec bienveillance, alors qu'il y a une attente fébrile autour de lui», salue-t-il.
«Thomas se détache peut-être du lot par sa décontraction», relève Jules Grandsire, responsable de sa communication pour sa première mission, Proxima.
Marion Montaigne, l'auteure de la BD «Dans la combinaison de Thomas Pesquet» (2017), trouve l'astronaute «encore plus décontracté» pour sa mission Alpha.
«Il est plus +fun+ dans ses messages, et n'hésite plus à parler des moments où c'est dur», confie à l'AFP la dessinatrice dont l'ouvrage s'est vendu à plus de 450.000 exemplaires.
Une quête d'authenticité, sans doute mue selon elle par un souci de montrer qu'il n'est pas ce «super-héros en titane» trop parfait pour certains.
Des fans et des moins fans
Sur les réseaux sociaux, environ 4% des Français suivent son compte Twitter, «un score dans la moyenne des personnalités en vue», selon Paul Merveilleux du Vignaux, analyste digital à l'agence Majorelle. Ce qui est notable, c'est que «la majorité (64%) de ses abonnés français sont des fans», qui relayent ses tweets.
Grâce à un nouveau logiciel, il a suivi l'évolution sur un mois: avant le départ de l'astronaute, c'est essentiellement une communauté «geek» de l'espace qui le suivait. L'audience s'est ensuite élargie. Signe d'une «démocratisation», le quotidien sportif l'Equipe est le compte média le plus suivi par ses fans, «un bon marqueur populaire qui montre que l'adhésion va bien au-delà de la communauté spatiale habituelle», relève l'analyste digital.
La nature des commentaires tourne d'ailleurs beaucoup autour de la performance physique. Les critiques existent, mais sur Twitter, elles sont «écrasées par le volume de tout ce que Thomas Pesquet produit et qui est massivement relayé», ajoute-t-il.
En dehors des réseaux sociaux, le sociologue Arnaud Saint-Martin remarque néanmoins «de plus en plus de tribunes affirmant +y'en a marre de Pesquet+». Des voix discordantes «qu'on n'entendait pas avant». «C'était presque indécent d'interroger la pertinence du vol habité."
A l'aune du changement climatique, certains interrogent la nécessité de dépenser de tels budgets «pour aller +faire des photos là-haut+», ajoute le sociologue. Des critiques susceptibles de redoubler avec l'arrivée, dans l'avenir, de touristes -milliardaires- au sein de l'ISS, qui pourraient aussi «désacraliser» l'image de l'astronaute.