SuisseAlbert Rösti préoccupé par la situation des médias
fb, ats
24.5.2024 - 11:51
Invité du Swiss Media Forum à Lucerne, le conseiller fédéral Albert Rösti s'est montré préoccupé par la situation économique difficile des médias. Il a assuré que le gouvernement s'employait à créer de bonnes conditions cadres, sachant qu'il n'y a pas de solutions miracles.
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24.05.2024, 11:51
24.05.2024, 13:39
ATS
Le ministre en charge des médias a cité la baisse de plus de 20% du nombre de titres dans le pays depuis 2009, la réduction de moitié des tirages ces quinze dernières années et les milliards de francs de recettes publicitaires siphonnées par les géants de l'internet comme Google ou Facebook. Parallèlement, toujours plus de monde s'éloigne des médias traditionnels.
Albert Rösti a rappelé le projet du Conseil fédéral d'édicter des règles pour les grandes plateformes, afin de créer plus de transparence et protéger les droits des utilisateurs. Le gouvernement examine aussi la nécessité de règles en matière d'intelligence artificielle (IA), spécifiquement pour le secteur des médias.
Il a par ailleurs relevé les initiatives en cours au niveau du Parlement tendant à renforcer le soutien aux médias. Il a en particulier exprimé son soutien à l'instrument de l'aide indirecte, soit les contributions accordées par la Confédération pour alléger la facture de la distribution des journaux.
«Risque d'implosion»
Le ministre réagissait aux propos du président de TX Group jeudi au Swiss Media Forum. Pietro Supino a affirmé que sans une hausse de cette aide, le paysage des médias imprimés pourrait «imploser» ces prochaines années.
Albert Rösti a admis que cette aide restera importante ces prochaines années, le temps que les journaux achèvent leur mue numérique. Ce sera cependant au Parlement de décider d'une éventuelle hausse de cette manne, selon le conseiller fédéral, qui n'a pas caché que le gouvernement était réservé sur ce point.
Le conseiller fédéral a aussi exprimé son «plein soutien» à l'introduction d'un droit voisin en Suisse. Cette norme comparable au droit d'auteur permettrait aux éditeurs de réclamer des dédommagements aux géants d'internet pour l'utilisation de leurs contenus. Le dossier, piloté par le Département fédéral de la justice de Beat Jans, est «difficile», a commenté M. Rösti, jugeant cependant nécessaire de faire passer les plateformes à la caisse.
Parmi les mesures prévues, Albert Rösti a aussi mentionné un soutien accru à l'agence de presse Keystone-ATS, qui reçoit actuellement une subvention annuelle de 4 millions de francs de la Confédération.
«Initiative vraiment dangereuse»
Albert Rösti a également abordé l'initiative «200 francs, ça suffit», lancée par l'UDC, l'Union suisse des arts et métiers (usam) et les Jeunes PLR. Ce texte fait suite à l'initiative «No Billag», balayée par le peuple en 2018. Sur proposition d'Albert Rösti, le Conseil fédéral veut faire passer la redevance radio-TV de 335 francs par an et par ménage actuellement à 300 francs à partir de 2029.
Albert Rösti a insisté sur le fait que l'objectif du Conseil fédéral est d'éviter l'acceptation de l'initiative, un texte qualifié de «vraiment dangereux» par le ministre UDC : ce dernier avait rejoint le comité d'initiative lorsqu'il était conseiller national. Le projet aboutirait à une restructuration de la SSR, qui devrait renoncer à la décentralisation actuelle en Suisse romande et au Tessin, selon le gouvernement.
L'idée du gouvernement n'a pas fait l'unanimité en procédure de consultation. Le Conseil fédéral prendra une décision avant les vacances d'été. L'initiative arrivera au Parlement au 2e semestre, a précisé le chef du Départment fédéral de la communication (DETEC).
«Des machines de production»
Albert Rösti a souligné que le Conseil fédéral voulait se limiter à créer de bonnes conditions cadres pour les médias. «Les éditeurs et les journalistes resteront les seuls responsables des contenus. L'indépendance reste et restera un bien inviolable», a affirmé le conseiller fédéral.
Dans ce contexte, Albert Rösti a exprimé sa préoccupation pour la pratique journalistique en Suisse, qui souffre selon lui du contexte économique difficile. «Le journaliste a tendance à devenir une machine de production», a imagé le conseiller fédéral. Il doit assurer une multiplicité de tâches, rédiger des textes mais aussi prendre des photos, des vidéos, poster des contenus sur les réseaux sociaux voire réaliser un podcast.
La couverture devient ainsi superficielle. «Parfois, je me demande si tous ces canaux sont nécessaires, et si moins ne serait pas mieux», a dit le conseiller fédéral, appelant à soigner les vertus de base du journalisme. «Une Suisse sans des médias forts est pour moi inimaginable. Les médias sont indispensables pour la démocratie», a martelé M. Rösti.