Identité électroniqueAprès le «non», unanimité pour une nouvelle solution rapide
st, ats
7.3.2021 - 19:28
Une identité électronique unique, certifiée par l'Etat, ne verra pas encore le jour. Les Suisses ont rejeté dimanche à 64,36% le projet de loi. Partisans et adversaires s'accordent toutefois sur la nécessité d'une nouvelle solution rapide et viable.
Keystone-SDA, st, ats
07.03.2021, 19:28
08.03.2021, 09:26
ATS
La ministre de la justice Karin Keller-Sutter essuie ainsi un premier échec cinglant dans les urnes. Devant la presse, elle a estimé que le rejet de la loi ne veut pas forcément dire qu'une solution purement étatique réunirait une majorité. Elle appelle toutes les forces à s'unir pour trouver une nouvelle solution. Le sujet sera discuté au sein du gouvernement.
Aucun canton n'a soutenu le texte. Bâle-Ville (70,69%) a compté le plus d'opposants. Vaud (70,05%), Genève (69,40%) et Neuchâtel (68,55%) lui emboîtent le pas.
Les autres cantons romands rejettent aussi très largement le projet. Le Jura dit «non» à 66,65%, Fribourg à 62,19% et le Valais à 59,98%. A Berne, les opposants ont récolté 66,76% des voix. Le Tessin (55,81%) enregistre quant à lui le refus le plus faible.
Le projet prévoyait l'introduction d'un seul identifiant, certifié par l'Etat. L'utilité d'une e-ID n'était pas controversée. C'est sa gestion par des entreprises privées qui faisait grincer des dents. La Société numérique, l'organisation suisse Campax, la plateforme We collect et l'association Public Beta ont lancé le référendum, dénonçant la libéralisation d'une tâche régalienne.
«Une occasion manquée»
En rejetant l'e-ID, la Suisse manque une occasion de donner une impulsion à la numérisation du pays, regrette le PLR. Le parti rappelle que le sujet de l'introduction d'une identité électronique est depuis 15 ans sur la table. Une solution étatique ne viendra pas si rapidement, a averti la présidente du parti Petra Gössi.
L'UDC regrette pour sa part le rejet de la loi, qui aurait apporté une sécurité juridique et de la fiabilité dans l'espace numérique. Elle aurait également apporté davantage de sécurité pour les utilisateurs, grâce à des règles strictes de protection des données.
Le Centre déplore également le «non», car le projet aurait été important pour la transformation numérique. Le parti exige à présent de nouvelles idées et approches, car le pays a besoin d'une solution suisse moderne et pleine d'avenir en matière d'e-ID.
Un vote pour le service public
Le rejet de la loi est un vote fort en faveur du service public, se réjouit de son côté le PS, qui se dit toutefois prêt à aller de l'avant sur la question. Le parti va déposer la semaine prochaine une motion au Parlement pour demander au Conseil fédéral de créer la base juridique d’une e-ID en mains publiques.
De leur côté, les Verts notent «avec satisfaction» le rejet de la privatisation de l'identité électronique. Ils se disent prêts à rejoindre une alliance interpartis afin d’exiger rapidement une nouvelle loi minimisant les risques sécuritaires et donnant la priorité à la protection des données.
Selon l'Union syndicale suisse (USS), le «non» permet d’éviter la mise en place d’une société à plusieurs vitesses sur Internet et la captation d'informations officielles à des fins de profilage. Il s'agit de rapidement mettre en place une identification électronique officielle publique, transparente et au service de l'intérêt public.
Pas d'opposition à la numérisation
Le coordinateur romand du référendum, Benoît Gaillard (PS), estime que le «non» des citoyens reflète leur opposition à la gestion privée de l'e-ID. Le résultat n'est pas un rejet de la numérisation, mais une revendication pour une solution sûre, fiable, démocratique et sous contrôle de l'Etat.
Une nouvelle solution devrait être trouvée relativement rapidement, ajoute auprès de Keystone-ATS Erik Schönenberger, codirecteur de campagne du référendum. Tous les partis et les comités s'accordent pour dire qu'il faut trouver assez rapidement une solution étatique viable, dans laquelle la population puisse avoir confiance. Le lancement d'une nouvelle identité électronique serait envisageable dans deux ans.
«Avancer rapidement»
Avec le rejet de la loi, la Suisse manque une occasion de réaliser une avancée technologique majeure, estime à l'inverse l'Alliance pour une e-ID suisse. Le directeur général de digitalswitzerland Nicolas Bürer souligne sur la SRF que les choses doivent maintenant «avancer rapidement», afin de trouver une solution capable d'emporter une majorité, car «sous sommes en retard», souligne-t-il.
Egalement interrogé à la RTS, il espère qu'un nouveau projet pourra voir le jour dans les deux à trois ans. Faute d'avancées, la Suisse sera perdante en matière d'e-gouvernement. La confiance de la population est également nécessaire pour un tel projet.
L'Union suisse des arts et métiers (Usam) regrette de son côté le «retour en arrière» que constitue le rejet de la loi pour le développement de la cyberadministration et de la numérisation. La faîtière exige une solution dans les plus brefs délais.