Port du masque«Cette pétition est un appel à la prise de responsabilité»
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28.8.2020
«Stop au port abusif du masque», c’est le titre d’une pétition qui circule depuis trois semaines sur Internet. Adressée au ministre jurassien de la Santé Jacques Gerber, elle dénonce «une obligation qui ne repose sur aucun argument scientifique concret». Son auteur, le médecin ajoulot Olivier Gérin, veut avant tout susciter la réflexion.
Médecin généraliste à Bonfol (Jura) depuis 2013 et enseignant à l’école de médecine chinoise Liang Shen, à Genève, le docteur Gérin a fait son doctorat à la Faculté de médecine de Marseille (1992); et est formé en médecine traditionnelle chinoise et en aromathérapie.
Dr Olivier Gérin, vous jugez «inconsciente» l’obligation du port du masque, estimant qu’elle «engendre un climat de peur et d’anxiété». Pourtant on entend tous les jours nombre de vos confrères assurer que le masque réduit le risque de contamination. Ils se trompent?
Je pense qu’ils se trompent. À ce jour, même si les voies de transmission ne sont pas très claires, il semble que le virus se transmet plutôt par aérosol, donc dans l’air, que par les gouttelettes de salive. Or pour pouvoir filtrer cela il faut des masques particuliers, pas ceux en papier ou en tissu - d’ailleurs les gens qui travaillent dans les laboratoires de virologie ne portent pas ce type de masques. Par ailleurs, quand on voit la courbe de l’épidémie depuis le mois de mars, et qu’à ce moment-là le Conseil fédéral n’a pas préconisé le port du masque, ce n’est pas cohérent, ni logique, d’imposer cette protection-là aujourd’hui. Pour moi, ça n’a pas été réfléchi. On ne sait pas même pas si le virus qui circule aujourd’hui est le même qu’au mois d’avril, même s’il porte le même nom.
Quel intérêt auraient alors nos gouvernants à recommander le masque?
Bonne question! Je pense que c’est pour l’effet psychologique, comme cela a été le cas pour la fermeture des écoles - Daniel Koch l’a dit. On peut même aller plus loin et s’interroger sur l’éventualité d’un test qui permettrait de voir jusqu’où les gens sont d’accord de se soumettre sans poser de question.
Tout de même, si les cas sont peu nombreux aujourd’hui dans le Jura et même en Suisse, est-ce que ce n’est pas justement grâce à cette obligation du port du masque?
Mais alors, comment expliquer que la courbe des mois de mars-avril soit redescendue sans que nous portions le masque? Ce n’est pas grâce au confinement non plus, la courbe de la Suède le montre. En réalité cette épidémie a suivi la courbe naturelle de toutes les épidémies.
Elle est donc terminée, pensez-vous?
En tout cas, comme le dit le professeur Raoult, il est clair qu’aujourd’hui, quel que soit le nombre de cas, le virus n’a plus le même impact. On ne devrait parler de pandémie qu’en fonction du nombre de morts, et ici nous ne sommes plus dans ce cas.
Il n’y aura donc pas de deuxième vague?
Non. S’il y a une nouvelle épidémie, ce sera… une nouvelle épidémie, comme il y a une grippe qui revient chaque année. Et c’est possible qu’il y ait une association grippe saisonnière-coronavirus. Mais il faut être juste dans les mots. D’ailleurs si on regarde dans le passé, aucune épidémie n’a jamais connu de deuxième vague.
En fin de compte, qu’est-ce qui vous a décidé à lancer cette pétition?
J’ai en moi une certaine inquiétude. J’observe que l’esprit critique, ou le discernement, ne sont pas majoritaires. La majorité tend à aller davantage dans la peur que dans la confiance, et refuse de penser que prendre en charge le terrain pourrait permettre d’éviter ce qu’on a observé. Je parle du terrain au sens large, le terrain de la vie.
Le corps humain est complexe, il y a encore des choses qu’on ne connaît pas, mais on peut affirmer que pour maintenir l’homéostasie, c’est-à-dire l’équilibre, et ne pas tomber malade, il faut prendre soin de ce que l’on mange, de son repos physique et psychique, et de ses interrelations. Le corps a l’intelligence de trouver en lui les ressources qui lui sont nécessaires, si on lui laisse le temps de les accueillir et de les laisser s’exprimer.
«Je ne le porte pas avec mes patients, et je les invite aussi à l’enlever.»
Est-ce qu’il vous arrive tout de même de porter un masque?
Je le porte quand ma responsabilité à moi n’engage pas celle des autres. C’est-à-dire que oui, je le porte quand je vais au magasin du village ou au centre commercial à Porrentruy. En revanche je ne le porte pas avec mes patients, et je les invite aussi à l’enlever. Mais je ne leur impose rien.
Votre pétition n’est donc pas un appel à la désobéissance?
C’est un appel à la prise de responsabilité. Que chacun s’interroge sur le bien-fondé de ce qu’on nous propose, sur ses propres peurs et les prenne en charge. Que chacun fasse son choix en conscience, et respecte celui de l’autre.