Soudan Darfour: Khartoum va remettre el-Béchir et d'ex-dirigeants à la CPI

ATS

11.8.2021 - 16:13

Omar el-Béchir a été renversé en avril 2019, après des mois d'un mouvement populaire inédit.
Omar el-Béchir a été renversé en avril 2019, après des mois d'un mouvement populaire inédit.
ATS

Le Soudan va remettre à la Cour pénale internationale (CPI) trois anciens dirigeants parmi lesquels l'autocrate déchu Omar el-Béchir. Ils sont recherchés notamment pour «génocide» et crimes contre l'humanité lors du conflit au Darfour.

Keystone-SDA

«Le Conseil des ministres a décidé de remettre les personnes recherchées à la Cour pénale internationale», a déclaré la ministre Mariam al-Mahdi, selon l'agence officielle Suna. Elle s'exprimait lors d'une rencontre avec le nouveau procureur général du tribunal basé à La Haye, Karim Khan, en visite à Khartoum pour une semaine.

Le conflit au Darfour, région de l'ouest du pays, a opposé à partir de 2003 le régime à majorité arabe de M. Béchir et des rebelles issus de minorités ethniques s'estimant marginalisées. Il a fait environ 300'000 morts et près de 2,5 millions de déplacés, en majorité durant les premières années de violences, d'après les Nations unies.

Fille de l'ancien Premier ministre Sadek al-Mahdi, renversé en 1989 par un coup d'Etat mené par M. Béchir, la ministre soudanaise n'a pas précisé la date de l'extradition des trois anciens dirigeants, qui doit être discutée entre le gouvernement et le Conseil souverain, plus haute instance chargée de la transition.

Renversé en 2019

Omar el-Béchir, 77 ans, a été renversé après 30 ans d'un règne sans partage en avril 2019 sous l'impulsion d'un mouvement populaire inédit déclenché quatre mois plus tôt par le triplement du prix du pain.

En février 2020, le pouvoir de transition mis en place après sa chute avait pris l'engagement verbal de favoriser la comparution d'Omar el-Béchir devant la CPI, qui a émis il y a plus de dix ans des mandats d'arrêt contre lui et d'autres figures de l'ancien régime, pour «crimes contre l'humanité» et «génocide» au Darfour.

Avant sa chute, l'autocrate avait plusieurs fois défié la Cour en voyageant à l'étranger sans être arrêté.

La CPI s'exprimera jeudi

La CPI, qui n'a pas souhaité commenter la décision soudanaise, a annoncé la tenue d'une conférence de presse jeudi à 16h30 locales et suisses à Khartoum avec M. Khan dont la visite au Soudan est consacrée «à discuter de la coopération» entre la Cour et le pays.

Les deux autres pontes du régime qui seront remis à la CPI sont l'ex-gouverneur de l'Etat du Kordofan-Sud, Ahmed Haroun, et l'ancien ministre de la Défense, Abdel Rahim Mohamed Hussein, recherchés pour les mêmes motifs. Arrêtés après la chute de Béchir, ils sont actuellement détenus au Soudan.

Le CPI a émis en 2007 un mandat d'arrêt contre M. Haroun, avec 42 chefs d'accusation, notamment meurtre, viol, torture, persécution et pillage.

Coopération avec la CPI nécessaire

Un accord de paix historique signé en octobre 2020 entre le gouvernement de transition et plusieurs groupes rebelles insistait sur la nécessité d'une «coopération complète et illimitée» avec la CPI. Le cabinet ministériel soudanais a voté la semaine dernière en faveur de la ratification du Statut de Rome de CPI.

Déjà reconnu coupable de corruption en décembre 2019, l'ex-président est actuellement détenu à la prison de Kober, à Khartoum.

Il est aussi jugé par la justice soudanaise pour son rôle dans le coup d'Etat qui l'a porté au pouvoir en 1989, mais son procès a été à plusieurs reprises reporté depuis juillet 2020, les avocats de l'accusé avançant des arguments procéduraux.