Proche-Orient Des chouettes pour l'écologie et la paix

La chouette semble détrôner la colombe comme oiseau de la paix dans la Vallée du Jourdain. Dans le cadre d'un projet auquel participe l'Université de Lausanne, des nichoirs sont installés de chaque côté de la frontière entre Israël, la Palestine et la Jordanie.

Les chouettes effraies permettent de réguler la population de rongeurs et d'éviter l'usage de pesticide dans les cultures. Même si l'objectif premier est de protéger l'environnement, l'emplacement des nichoirs favorise aussi la coopération entre des communautés, habituellement en conflit.

«Les chouettes n'ont pas besoin de visa ou de passeport. Nous avons réalisé une expérience avec un GPS et des traceurs et avons constaté que les chouettes nichaient du côté israélien et allaient chasser la nuit en Palestine», explique à Keystone-ATS Alexandre Roulin, professeur au Département d'écologie et d'évolution à l'Université de Lausanne.

Le scientifique participe au projet «Les chouettes n'ont pas de frontière» depuis 2008. Il tiendra une conférence le 10 avril à l'Université de Lausanne pour présenter une nouvelle fois sa mission dans la Vallée du Jourdain, au lendemain des élections législatives israéliennes.

A la frontière israélo-palestinienne, les rongeurs pullulent car leurs habitats ne sont pas régulièrement détruits. Les champs ne sont labourés que tous les trois ans. Pour lutter contre ce fléau, les paysans arrosent leurs champs de pesticides.

Le projet initial est né en 1983. Un paysan israélien avait décidé d'utiliser des chouettes pour éliminer les rongeurs au lieu de recourir aux pesticides. En 2002, le projet s'est étendu aux pays voisins.

Peur d'être des «collabos»

Mais depuis la recrudescence du conflit israélo-palestinien, le projet est plus difficile à mener, reconnaît Alexandre Roulin. «Les tensions sont devenues intenses. Les Palestiniens qui font partie du programme ont peur d'être pris pour des collaborateurs et d'être la cible de représailles de la part de leurs concitoyens.»

Un autre problème divise les deux camps et le projet «Les chouettes n'ont pas de frontière». «Israël est un pays riche comme la Suisse, alors que la Palestine est très pauvre et a d'autres problèmes à régler avant l'écologie», constate le professeur.

Malgré quelques ombres au tableau, le projet est soutenu depuis cette année par la Confédération. Les acteurs présenteront aussi leur projet au pape, en mai prochain.