ElectionsDes Kosovars de Suisse se plaignent d'entraves à leur participation
sn, ats
22.1.2021 - 13:58
Des Kosovars de Suisse se sentent entravés dans leurs possibilités de participer aux scrutins dans leur pays. Alors que des législatives anticipées sont prévues mi-février, ils dénoncent une manoeuvre pour écarter les électeurs en dehors du territoire national.
«Il y a une volonté politique claire de nous empêcher de voter», affirme à Keystone-ATS l'un des responsables de l'Association des étudiants albanais de Genève (AEAGE), Edon Duraku. En cause selon lui, l'attitude de la Commission électorale centrale (CEC), accusée d'être aux ordres d'une classe politique «rongée par la corruption».
«Ils savent que le vote de la diaspora peut avoir une influence», ajoute M. Duraku. Les Kosovars à l'étranger rassemblent environ un tiers des électeurs. Selon les estimations d'une ONG en 2019, ils sont au moins plus de 700'000. Or, seuls 40'000 se sont enregistrés lors du scrutin parlementaire la même année, dont 25'000 ont finalement voté.
Un chiffre qui reflète, selon les protestataires, les difficultés de la participation. Avec deux autres associations représentant les Albanais du Kosovo en Suisse, l'AEAGE a déposé il y a quelques jours des sacs de poubelles remplis de bulletins symboliques devant le consulat kosovar à Genève, bloquant son entrée.
Une action inédite mais qui reflète, selon M. Duraku, une large défiance à l'égard du système. Seuls les électeurs à l'étranger sont contraints de s'enregistrer à chaque scrutin. Or, ils n'ont pu accomplir cette procédure en ligne que pendant sept jours, jusqu'à ce jeudi et, nouveau dispositif qui a fait l'objet d'un recours, ils doivent valider leur identité lors d'un appel téléphonique avec la CEC.
Permanences citoyennes
Selon les autorités consulaires, ce délai d'une semaine est largement suffisant pour une manoeuvre qui ne prend que quelques minutes. «Il y a beaucoup de formulaires. Ceux qui disent cela n'ont pas conscience des difficultés numériques pour les Albanais du Kosovo, surtout en Suisse», rétorque M. Duraku. Avec une population plutôt âgée et souvent aux revenus modestes, il faut un encadrement.
Rien qu'à Genève, cinq permanences citoyennes ont été ouvertes pour aider ces personnes. D'autres ont été lancées en Suisse alémanique, parfois par des partis politiques kosovars. De quoi poser des questions d'intégrité, selon M. Duraku. «Nous faisons le travail des ambassades et des consulats», insiste-t-il encore. Une plateforme en ligne a aussi été établie, contestée par la CEC.
Il semblerait que l'intérêt soit important cette année. Avant même la fin de l'enregistrement jeudi soir, des médias kosovars en Suisse ont mentionné le chiffre de 200'000 demandes d'électeurs de l'étranger pour le scrutin, dont plus de 80'000 en Suisse. Un chiffre qui semble «énorme» malgré la prise de conscience de l'importance de ce scrutin, dit M. Duraku. Interrogée, l'ambassade kosovare n'a pas encore répondu.
Nombreuses élections
Une fois enregistré, l'électeur ne pourra accéder à son bulletin en ligne que le 2 février. Il devra l'envoyer par un courrier qui devra être reçu sous dix jours. Un mécanisme incertain s'il ne débourse pas plusieurs dizaines de francs pour l'acheminer de manière prioritaire, souligne M. Duraku.
Selon lui, beaucoup se méfient et se rendent dans leur commune au Kosovo pour voter. Une situation qui provoque là aussi des frais, surtout quand les familles sont constituées de plusieurs électeurs. En période de pandémie, les Kosovars de Suisse voient une raison supplémentaire de demander de pouvoir voter dans leurs représentations à l'étranger, comme pour les ressortissants d'autres pays.
La loi l'interdit. «Nous sommes encore un nouveau pays» et l'organisation serait difficile, explique un responsable des autorités kosovares. Les élections anticipées se multiplient au Kosovo et celles de février ont été convoquées après que la plus haute cour a jugé le mois dernier que la désignation en juin par le Parlement du cabinet d'Avdullah Hoti, par une seule voix de majorité, n'était pas valide. En raison des accusations de corruption contre un député.