«CoronaLeaks» Alain Berset était au courant des échanges mais pas du contenu

kigo, ats

17.11.2023 - 17:37

Les mesures décidées par le Conseil fédéral pour enrayer la pandémie de Covid-19 ont fait l'objet de nombreuses indiscrétions, rapportent vendredi les commissions de gestion du Parlement. Le président de la Confédération Alain Berset avait connaissance des échanges entre son chef de la communication et les médias. Mais il n'aurait pas su leur contenu.

«Coronaleaks» : Alain Berset au courant des échanges mais pas du contenu

«Coronaleaks» : Alain Berset au courant des échanges mais pas du contenu

Le président de la Confédération Alain Berset avait connaissance des échanges entre son chef de la communication et les médias dans le cadre des fuites pendant la pandémie. Mais il n'aurait pas su leur contenu, ont informé vendredi les commissions du Parlement.

17.11.2023

17.11.2023 - 17:37

Il n'y a aucun indice qui permet de ne pas croire ce qu'a dit M. Berset, a indiqué Philippe Bauer (PLR/NE) au nom des commissions de gestion du Parlement devant la presse à Berne.

Les commissions ont rapidement pu établir qu'il y a eu de nombreuses indiscrétions. La diffusion massive d’informations classifiées «CONFIDENTIEL» non seulement pendant la période sous revue, mais aussi plus récemment, étonne les commissions de gestion, surtout que tous les membres du Conseil fédéral auditionnés ont assuré appliquer une tolérance zéro concernant les indiscrétions.

Mais «nous n'avons pas réussi à identifier tous les auteurs des indiscrétions, ni tous les destinataires», a précisé M. Bauer. «Des courriels ont été effacés.» L'ancien chef de la communication du Département fédéral de l'Intérieur (DFI) a notamment fait effacer ses messages privés.

M. Bauer a toutefois ajouté que, selon les commissions de gestion, d'autres courriels envoyés par ou destinés à l’ancien chef de la communication du DFI laissent penser que les informations classifiées ou non publiques étaient traitées «à la légère». Il n’était pas rare que des informations soient sciemment partagées avec des personnes extérieures ou des médias.

«Préparer le terrain»

Interrogé sur sa définition d'une indiscrétion, l'ancien chef de la communication Peter Lauener a indiqué que des renseignements pouvaient sans problème être partagés avec des journalistes afin de leur donner des informations contextuelles. Mais cette conception ne correspond pas aux prescriptions, indiquent les commissions dans leur rapport.

Lors de son audition, M. Lauener a précisé qu’il lui incombait de préparer le terrain pour que la population accepte la voie médiane choisie par la Suisse pour gérer la pandémie. Même dans le contexte de la situation extraordinaire, le groupe de travail ne comprend pas cette façon de voir les choses.

M. Bauer a précisé: «Nous avons voulu garder la proportionnalité.» Il n'est pas possible de contrôler toutes les adresses courriel privées et publiques de toutes les personnes susceptibles d'avoir été concernées.

200 articles concernés

Quelque 200 articles publiés par 24 titres de presse concernant le Covid-19 ont été rédigés sur la base d'indiscrétions. Et 38 séances sur 50 du Conseil fédéral ont été «contaminées», a précisé Thomas de Courten (UDC/BL).

Les commissions ont étudié environ 500 articles et 50 séances du gouvernement. Seules douze d'entre elles n'ont pas été sujettes à indiscrétions. Dans les 38 autres cas, les décisions du Conseil fédéral avaient été publiées avant la séance.

Ce sont surtout les médias alémaniques, en premier lieu les médias de Ringier et de Tamedia, qui ont profité des indiscrétions de l'administration fédérale et obtenu des informations classifiées. Le Blick, le Sonntagsblick, le Tages-Anzeiger et la SonntagsZeitung ont publié chacun 60 articles sur la base d'informations confidentielles; contre seulement six pour Le Temps et 24 heures.

Dans certains cas, ces journaux alémaniques étaient les premiers à publier des projets de mesures ou des contenus de propositions ou de co-rapports. D’autres journaux ont ensuite explicitement fait référence à ces premières publications dans leurs propres articles.

Perte de confiance

Le Conseil fédéral a essayé de prendre un certain nombre de mesures à cet égard, qui se sont «vite révélées relativement vaines», a poursuivi Philippe Bauer, citant par exemple l'augmentation du degré de classification des documents. Au final, le gouvernement «s'est résigné». Cela a conduit à une perte de confiance de la part de certains conseillers fédéraux, qui ont renoncé à déposer des co-rapports, ou alors ceux-ci étaient simplifiés.

Les CdG regrettent beaucoup que le Conseil fédéral, en tant qu’organe, n’ait pour l’heure pas réussi à gérer de façon plus efficace la problématique des indiscrétions. C'est pourquoi elles ont formulé neuf recommandations à l'intention du Conseil fédéral.

Ce dernier devra notamment définir clairement les critères applicables au partage d’informations. Les commissions veulent également prolonger le délai de 135 jours prévu pour effacer les mails d'un collaborateur qui quitte son travail.

Le gouvernement devra prendre position d'ici au 2 février 2024.

Enquête ouverte en janvier

En janvier dernier, les commissions de gestion ont décidé d’enquêter sur les indiscrétions liées aux affaires du Conseil fédéral relatives au Covid-19, y compris sur le rôle du chef du Département fédéral de l’intérieur.

kigo, ats