Un jeune talent vaudois «Je rêve de couvrir au moins une fois les Jeux olympiques»

Valérie Passello, ats

8.6.2021 - 16:08

Gabriel Monnet, de Bex (VD), est le lauréat du Prix Sept du photojournalisme suisse 2021 parmi une vingtaine de projets présentés. Le jeune photographe réagit à cette récompense.

Keystone-SDA, Valérie Passello, ats

Gabriel Monnet, 20 ans en août, collaborateur occasionnel de Keystone-ATS, a été récompensé pour son récit intitulé «92%», qui narre l’histoire de Sébastien Maillard, gravement brûlé sur plus de 90% de son corps et qui a survécu grâce à la thérapie cellulaire. Le jeune photographe est en train d'achever son apprentissage au Centre d’enseignement professionnel de Vevey (CEPV) et semble promis à un bel avenir dans le milieu de la photo de presse. Interview.

Recevoir un tel prix, qu'est-ce que ça représente pour vous?

C'est une forme de reconnaissance, quand même. Je suis content que cela arrive à la fin de mes quatre ans de formation, cela prouve que je n'ai pas travaillé pour rien! J'avais déjà remporté des prix de photo nature et j'ai participé à plusieurs concours. Mais c'est cette année que j'ai tenté Swiss Press et le Prix Photo Sept, vraiment dans le domaine du photojournalisme. 

Pourquoi avez-vous choisi de raconter l'histoire de Sébastien Maillard?

Pendant les cours, nous devions réaliser un travail sur trois mois autour du thème: «risque». Beaucoup sont partis sur des sujets traitant de sports extrêmes. Je ne sais pas très bien comment l'idée m'est venue, mais j'ai pensé au feu, aux risques que ce la entraînait. Et visuellement, je trouvais assez beau de faire quelque chose autour de Sébastien Maillard. On ne voit pas quelqu'un comme lui tous les jours. Par contre, j'en avais juste entendu parler, mais je ne le connaissais pas: je ne savais pas du tout s'il allait accepter.

Le contact avec autrui est primordial, pour un photographe? 

C'est sûr! Dans ce cas, par exemple, je lui ai demandé d'enlever son pull, de me montrer son corps brûlé, ainsi que des zones non-touchées qui ont permis de prendre des cellules pour sa thérapie. Il fallait qu'il me fasse confiance pour accepter, qu'il soit ok avec ça. Nous avons bien discuté et je me suis aperçu qu'il le vit très bien, il lui arrive même d'en rire. Lui et sa famille en parlent très librement. À un moment, je lui ai demandé de venir poser pour des détails en studio. Et là, il m'a amené ses oreilles de sport. J'ai appris qu'il en avait plusieurs paires, ce sont des oreilles qui se déclipent: je trouve ça incroyable!

Rêvez-vous de photographier quelqu'un ou quelque chose en particulier?

J'aimerais beaucoup couvrir au moins une fois des Jeux olympiques pour une agence. Sinon, un gros sommet politique, comme la rencontre Biden-Poutine qui aura lieu le 16 juin à Genève, mais à laquelle je ne peux pas assister, car je dois passer mes examens pratiques. J'avais pu photographier le pape lors de sa venue en Suisse en 2017, c'est ça que j'ai envie de faire: être sur le terrain lors d'un grand événement qui va rester gravé dans les mémoires.

Même si vous n'avez pas encore vingt ans, vous êtes déjà un «vieux briscard» de la photographie. Comment cela vous est-il venu?

Cela doit faire dix, onze ans que je fais de la photo. Mon parrain m'avait offert un petit compact, avec lequel je photographiais un peu de tout, comme mon chat, par exemple. Puis j'ai découvert la photographie animalière avec un ami, j'ai donc demandé un appareil plus performant. Ensuite est arrivée la fin de ma scolarité. Comme une formation existait à Vevey, je me suis dit: «faisons ça, on verra où ça nous mène». Au début, j'étais très passionné de nature et d'oiseaux, mais des stages au Nouvelliste et chez Keystone, notamment, m'ont ouvert l'esprit. Comme dans la photo animalière, la photo de presse demande d'être actif et réactif.  

Quelle est la suite après votre formation, qui s'achève bientôt?

Je vais partir à Tokyo pour les Jeux paralympiques, puis à mon retour je vais effectuer un stage de six mois à l'Illustré, en tant que rédacteur photo et photographe. Ce n'est pas simple de trouver du travail dans ce métier, mais j'ai gardé de bons contacts et je suis heureux de pouvoir continuer à faire ce que j'aime.

Le Prix

Doté de 1500 francs, le prix du photojournalisme suisse en est à sa quatrième édition depuis 2017. Il est organisé par Sept.ch, la société éditrice du site de slow journalisme sept.info et du magazine-livre Sept mook à Villars-sur-Glâne (FR). Le concours est ouvert aux photographes âgés de moins de 30 ans, de nationalité helvétique ou basés en Suisse.

«Aller à l’essentiel, tel est le discours d’un storytelling photographique, explique le président du jury Bruno Maillard. Notre jeune lauréat, Gabriel, a su tenir un discours qui ne se contente pas de digressions ou d’à peu près. Il tient, dans ce travail tout autant informatif que touchant, un langage fort et prégnant, maîtrisé et porteur, comme doit l’être un reportage photographique.»

Le jury a également attribué cette année un deuxième prix. Né en 1996, Théophile Bloudanis est étudiant à l’Université de Neuchâtel à l'Académie du journalisme et des médias (AJM). Il a été récompensé pour un récit autour des installations militaires italiennes de l’île de Leros en Grèce, installations qui datent des années 1930.