ClimatLe Conseil fédéral ne veut pas de deux initiatives de la gauche
kigo, ats
15.5.2024 - 11:05
La Suisse ne doit pas se doter d'un fonds climat. Le Conseil fédéral a recommandé mercredi le rejet de l'initiative du PS et des Vert-e-s. Il rejette aussi l'initiative «pour l'avenir» de la Jeunesse socialiste, visant à taxer les plus riches pour financer la protection du climat.
15.05.2024, 11:05
15.05.2024, 12:02
ATS
Le premier texte demande que la Confédération crée un fonds et l'alimente par un versement annuel de 0,5 à 1% du PIB (entre 3,9 et 7,8 milliards de francs par an) jusqu'en 2050. Ce fonds doit servir à construire davantage de panneaux solaires, à accélérer les rénovations de bâtiments ou à développer les transports publics, tout en préservant les milieux naturels et en favorisant la biodiversité.
La Confédération et les cantons consacrent aujourd’hui déjà une enveloppe de plus de trois milliards de francs par an en faveur du climat et de la biodiversité chaque année, indique le gouvernement dans un communiqué.
Citant la loi sur la protection du climat acceptée par le peuple en juin dernier, la loi sur le CO2 qui devrait entrer en vigueur au 1er janvier prochain ainsi que la loi sur l'électricité en votation le 9 juin, il rappelle que des mesures d'encouragement et des incitations ciblées sont déjà prévues. Des actions complémentaires peuvent être définies au besoin.
Risques
Même s'il est indéniable que des investissements supplémentaires sont nécessaires pour atteindre la neutralité climatique et développer les énergies renouvelables indigènes, et que les défis sont considérables, le Conseil fédéral ne juge pas nécessaire de créer un nouveau fonds à cet effet.
Il trouve aussi que la mise en oeuvre de l'initiative ne serait pas sans risque. Les ressources pourraient être utilisées de manière inefficace, voire faire concurrence aux investissements privés. Le principe du pollueur-payeur pourrait aussi se voir affaibli.
Le gouvernement se montre encore réticent face à la proposition des initiants qui demandent que les dépenses en lien avec le climat ne soient pas soumises au frein à l’endettement. Celles-ci pourraient endetter davantage la Confédération et créer une charge supplémentaire dans une situation financière déjà tendue.
Le Département fédéral de l'environnement a jusqu'à février prochain pour présenter un projet de message recommandant le rejet de l'initiative sans contre-projet.
Taxer les plus riches
La Jeunesse socialiste propose elle aussi une solution pour financer la protection du climat. Elle a déposé une initiative populaire «pour l'avenir». Le but est que les «super-riches passent à la caisse».
Concrètement, leur texte demande un impôt de 50% sur les successions à partir d'un montant exonéré de 50 millions pour financer la transformation écologique de l'économie suisse. Selon les calculs de la JS, cet impôt rapporterait environ six milliards de francs par an. La Confédération et les cantons pourraient ensuite investir cet argent.
Cette proposition n'est pas pertinente pour atteindre les objectifs climatiques de la Suisse, selon le Conseil fédéral. L'initiative ne produirait aucun effet incitatif et n'encouragerait pas les personnes les plus fortunées à adapter leur comportement, puisqu'elles seraient redevables de l'impôt indépendamment de leur empreinte carbone.
Perte d'attrait de la Suisse
Le texte diminue aussi l'attrait de la Suisse pour les personnes fortunées. Ces dernières sont aujourd’hui déjà soumises dans les cantons et les communes à un impôt sur la fortune, généralement progressif, qui rapporte environ neuf milliards de francs par an, rappelle le gouvernement. Une partie des personnes potentiellement concernées pourrait décider de quitter la Suisse ou de renoncer à s'y installer.
Les deux tiers du produit de l’impôt fédéral direct sont aujourd’hui générés par les quelque 5% de contribuables les plus aisés, chiffre le Conseil fédéral. En ce qui concerne l’impôt sur la fortune, on estime que plus de 44% des recettes proviennent du 1% des personnes les plus fortunées.
La mise en œuvre de l'initiative entraînerait également une atteinte au fédéralisme. Les impôts sur les successions et les donations sont des impôts cantonaux.
Le texte crée encore de mauvaises incitations. La Confédération et les cantons seraient tenus d’affecter le produit de l’impôt à des fins de politique climatique. Le montant des dépenses ne serait donc pas déterminé par les besoins effectifs en matière de politique climatique, mais par l’ampleur des recettes générées par le nouvel impôt, ce qui pourrait entraîner des dépenses inefficaces et inadaptées aux besoins et conduire à des effets d’aubaine importants.
Le Conseil fédéral recommande de rejeter l’initiative sans lui opposer de contre-projet.