Un milliard de pertes Les hôpitaux ne restent à flot que grâce à la manne publique

om, ats

27.7.2024 - 13:36

Les hôpitaux suisses ont subi des pertes d'un milliard de francs en 2023, selon une étude de la société de conseils KPMG, relayée samedi par la NZZ. N'atteignant pas le seuil nécessaire de revenus pour investir, la plupart dépendent de la manne publique.

La situation des hôpitaux suisses est précaire. Sur les 48 institutions de soins sondées par KPMG, seules 14 ont indiqué avoir enregistré un bénéfice en 2023. (Photo d'illustration)
La situation des hôpitaux suisses est précaire. Sur les 48 institutions de soins sondées par KPMG, seules 14 ont indiqué avoir enregistré un bénéfice en 2023. (Photo d'illustration)
sda

Keystone-SDA, om, ats

Sur les 48 institutions sondées, 68% des directeurs financiers ont indiqué partir du principe de disposer d'une garantie implicite de l'Etat. Dans le cadre de son étude intitulée «Clarté sur la santé», dont Keystone-ATS a obtenu une copie, KPMG a sondé des hôpitaux ainsi que des cliniques psychiatriques et de rééducation.

Seules 14 des 48 institutions sondées ont enregistré un bénéfice en 2023, ce qui veut dire que 70% sont dans les chiffres rouges. KPMG a calculé que, extrapolé à toute la branche, ce résultat représente une perte d'un milliard de francs pour 2023.

Le secteur ne s'est donc pas remis de la crise du Covid-19, bien au contraire: la situation financière des hôpitaux suit une tendance négative persistante qui met la branche sous une pression toujours plus forte. En effet, trouver de l'argent devient de plus en plus difficile pour les institutions de soins car le marché évalue les risques comme étant élevés.

Des hôpitaux incapables d'investir

D'après une règle qui prévaut dans la branche, une institution de soins doit atteindre un bénéfice avant intérêts, impôts et amortissements (Ebitda) de 10% pour être à même de procéder à des investissements. Or, l'étude de KPMG révèle que seules les cliniques de rééducation se trouvent légèrement au-dessus de ce seuil fatidique.

Pour l'ensemble des institutions sondées, la marge Ebitda n'est que de 1,8% en 2023, soit bien en deçà des 4% anticipés par des prévisions trop optimistes. Et 96% des directeurs financiers interrogés dans le cadre de l'étude ne voient pas de possibilité à long terme d'atteindre ce seuil de 10%.

La numérisation figure parmi les grands défis que les hôpitaux auront à relever ces prochaines années, selon KPMG, alors que la plupart ne se trouvent qu'au début du processus. Mais sans de grandes capacités d'investissement, cela ne sera pas réalisable.

Les directeurs financiers des institutions sondées ont en moyenne prévu d'investir 2,5% de leur chiffre d'affaires dans l'informatique et la numérisation en 2024. Un montant insuffisant, estime KPMG.

Pénurie de personnel

Pour augmenter leur rentabilité, les hôpitaux de Suisse procèdent à des restructurations, alors que deux ont fermé leurs portes l'an dernier. Le groupe hospitalier bernois Insel, le plus grand de Suisse, veut par exemple supprimer de 200 à 300 postes.

Si le chiffre d'affaires des institutions de soins a continué d'augmenter en 2023, les taux de croissance sont inférieurs à ceux enregistrés immédiatement après la pandémie de Covid-19, relève KPMG. Les traitements ambulatoires, en hausse constante, ont atteint pour la première fois la barre d'un tiers du chiffre d'affaires dans le domaine des soins somatiques aigus.

Mais les hôpitaux et cliniques doivent faire face à des coûts qui s'envolent au niveau du personnel et des fournitures médicales. Selon KPMG, les charges liées au personnel ont augmenté de 8% en 2023, soit la plus forte hausse annuelle depuis 2019.

Cette tendance est essentiellement due à la hausse des salaires, qui va de pair avec la pénurie de personnel qualifié dans la branche. Les tarifs qui ne couvrent pas les coûts réels sont aussi responsables de cette hausse. Au total, KPMG a calculé que les coûts ont augmenté de 17% au cours des cinq dernières années.