Libre circulationL'immigration européenne élevée reflète la croissance de l'emploi
ro, ats
24.6.2024 - 12:00
L'immigration en provenance des pays européens a atteint des sommets l'an dernier en Suisse. Elle reflète la croissance de l'emploi et le faible taux de chômage. Elle permet aussi de compenser les effets du vieillissement de la population, rapporte lundi le Seco.
ro, ats
24.06.2024, 12:00
24.06.2024, 15:19
ATS
Au total, 68'000 personnes en provenance de l'UE/AELE ont immigré en Suisse l'an dernier, écrit le Secrétariat d'Etat à l'économie dans son 20e rapport de l'Observatoire de la libre circulation des personnes. C'est 29% de plus qu'un an plus tôt.
Avant cela, l'immigration dans le cadre de la libre circulation des personnes n'avait été plus élevée qu'en 2008, juste avant la crise économique et financière (72'100 personnes).
Les pays voisins en tête
Les principaux pays de provenance sont l'Allemagne (21%), la France (16%) et l'Italie (15%), qui représentent à eux trois plus de la moitié de l'immigration. Ce classement n'a cessé d'évoluer au fil des années, relève le Seco, qui note que «la conjoncture dans la zone UE/AELE a eu une influence sensible» sur sa composition.
«Cette corrélation semble se confirmer à nouveau» en ce qui concerne l'Allemagne, ajoute-t-il: l'immigration en provenance d'outre-Rhin a en effet «particulièrement augmenté en 2023 (...) dans un contexte de faible développement économique de l'Allemagne».
Selon le Seco, immigration et croissance de l'emploi vont de pair en Europe. Cela vaut aussi pour la Suisse, où la croissance de l'emploi a «nettement dépassé» la moyenne de l'UE ces 20 dernières années. Elle fut aussi solide en 2023, tandis que le taux de chômage a atteint son niveau le plus bas depuis 2001.
Peu de marge de manoeuvre
Le potentiel indigène était, lui, déjà bien exploité. La population suisse en âge de travailler n'a connu qu'une faible croissance ces vingt dernières années, en raison du vieillissement démographique, relève le Seco. Elle est en outre déjà très bien intégrée au marché du travail et son taux d'activité est élevé.
La marge de manoeuvre était faible en Suisse, par rapport à d'autres pays comparables, comme l'Autriche, la Belgique ou les Pays-Bas. Dans ces deux derniers Etats, par exemple, la baisse du chômage et «le développement de potentiels inexploités» ont favorisé l'emploi de main-d'oeuvre indigène, relève le Seco.
Aux deux extrêmes de l'éventail
Le rapport souligne par ailleurs qu'une grande partie des Européens travaillant en Suisse sont hautement qualifiés. Ils sont nombreux à exercer «des activités exigeantes dans des secteurs économiques en plein essor, comme les services spécialisés, scientifiques et techniques, l'information et la communication ou la santé».
Mais l'économie helvétique dépend également du recrutement d'immigrés de l'UE pour occuper des emplois moins qualifiés, principalement dans l'hôtellerie-restauration, la construction et l'industrie.
Pour le Seco, cette situation peut être considérée comme «un avantage, voire un privilège» pour la Suisse du point de vue du marché de l'emploi.
Le Secrétariat d'Etat ne cache toutefois pas qu'une migration durablement élevée «comporte également des défis. Les débats passionnés et contradictoires sur la question du rapport coût/bénéfice de l'immigration pour l'ensemble de la société qui animent aussi d'autres grands pays d'immigration nette en témoignent», écrit-il en conclusion du rapport.
Soutien des partenaires sociaux
Devant la presse, la secrétaire d'Etat Helene Budliger Artieda a relevé devant la presse que les discussions sur une limitation de l'immigration ont repris en Suisse. Se référant à l'exemple de la Grande-Bretagne, elle a toutefois souligné que la fin de la libre circulation des personnes après le Brexit n'avait pas entraîné de baisse globale de l'immigration.
Un avis partagé par les partenaires sociaux. Le directeur de l'Union patronale suisse Roland Müller a mis en avant le coût pour les entreprises de la pénurie de main-d'oeuvre. «L'analyse montre une fois de plus que l'immigration de l'UE et de l'AELE est un pilier important de prospérité de la Suisse», a-t-il dit, mettant en garde contre une acceptation de l'initiative sur la neutralité de l'UDC.
Economiste en chef de l'Union syndicale suisse (USS), Daniel Lampart a de son côté insisté sur le fait que des systèmes «à points», comme au Canada, ou des systèmes de contingents ne sont pas meilleurs que la libre circulation des personnes flanquée de mesures d'accompagnement.