Visite d'EtatMacron en visite à Berne comme un signe d'une détente des relations
st, ats
12.11.2023 - 10:20
Le président français Emmanuel Macron se rend en Suisse mercredi et jeudi prochains pour une visite d'Etat. Pour la Confédération, l'objectif est d'«approfondir les relations diplomatiques traditionnelles avec la France et de faire avancer d'importants dossiers bilatéraux», alors qu'un réchauffement se dessine.
Keystone-SDA, st, ats
12.11.2023, 10:20
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Les relations entre les deux pays revêtent une grande importance, notamment dans les domaines de l'économie, de la recherche, de l'énergie, de l'environnement, de la santé et de la mobilité, a indiqué jeudi le Département fédéral de l'intérieur (DFI). Les objectifs de la Suisse pour stabiliser et développer la voie bilatérale avec l'Union européenne (UE) seront aussi abordés.
«Les relations avec l'UE devront être au centre des discussions, pour voir notamment comment la France perçoit la reprise des discussions de la Suisse avec Bruxelles après l'échec de l'accord-cadre», espère Charles Juillard (Centre/JU), président de la Délégation pour les relations avec le Parlement français, récemment interrogé par Keystone-ATS.
Il s'agira aussi de sonder quel soutien la Confédération peut attendre de Paris sur d'autres dossiers liés à l'UE, comme le marché de l'électricité ou le programme de recherche Horizon Europe, note le Jurassien. Au niveau bilatéral, les questions du partage des eaux du Rhône ou des transports pourraient aussi être abordées.
Le président français sera également attaché à valoriser la relation économique franco-suisse et à expliquer les réformes entreprises en France, relève Marc Ferracci, député représentant les Français de Suisse. La rencontre, qui fait notamment suite à des jalons formels et informels posés avec Ignazio Cassis et Alain Berset, devrait avoir une dimension européenne, mais pourrait également inclure un volet lié à l'actualité internationale, en fonction de son évolution.
Dernière visite d'Etat en 2015
La dernière visite d'Etat d'un président français remonte à avril 2015 avec le président de l'époque, François Hollande. Lors de cette rencontre de deux jours, Berne et Paris avaient célébré leur réconciliation après des années de conflits fiscaux qui avaient débuté sous Nicolas Sarkozy.
Les relations s'étaient à nouveau tendues, notamment après l'épisode, douloureux pour la France, du choix suisse d'acheter ses nouveaux avions de combat aux Etats-Unis (F-35) plutôt que d'opter pour le Rafale français. La réception d'Emmanuel Macron par le Conseil fédéral a ainsi été interprétée comme un signe d'une sérénité retrouvée dans les relations franco-helvétiques.
Parmi les signaux positifs, figurent l'accord trouvé fin 2022 concernant l'imposition du télétravail des frontaliers, ou la solidarité transfrontalière de la Suisse dans le cadre de la lutte contre le Covid. La participation helvétique à la Communauté politique européenne, initiée par M. Macron, a aussi été perçue favorablement côté français, estime Marc Ferracci.
Pour le député, les deux pays sont dans une phase de dialogue, ce qui se vérifie notamment par la reprise des visites ministérielles. Ainbsi ces 10 derniers jours les conseillers fédéraux Elisabeth Baume-Schneider, Karin Keller-Sutter et Albert Rösti ont rencontré leurs homologues respectifs Gérald Darmanin, Bruno Le Maire et Agnès Pannier-Runacher.
Les relations franco-suisses se sont détendues significativement, la preuve en est cette visite présidentielle, abonde Charles Juillard. Concernant les raisons de ce réchauffement, le Jurassien note que «le temps arrange les choses». Les bonnes relations personnelles d'Alain Berset et d'Emmanuel Macron ont certainement aussi joué.
En phase de dégel
L'état des relations entre la Suisse et la France n'est toujours pas au beau fixe, nuance auprès de Keystone-ATS Gilbert Casasus, professeur émérite en Etudes européennes à l'Université de Fribourg. «Cette visite marque un mieux sensible, mais nous sommes seulement en phase de dégel», relève-t-il.
Les Français vont sûrement réaffirmer les liens d'amitié ancestraux entre les deux pays. Les deux parties vont éventuellement se féliciter d'avancées techniques, sur des dossiers transfrontaliers par exemple. «On peut donc s'attendre à des avancées techniques et non pas politiques», résume le professeur.
«Par ailleurs, Emmanuel Macron va sans doute réaffirmer que nous sommes tous des Européens et que nous avons des intérêts communs». Mais il ne faut pas pour autant s'attendre à des concessions au niveau européen de la part du président français, surtout après les récents résultats des élections fédérales, qui n'envoient pas un signal encourageant, analyse Gilbert Casasus.
Ce dernier s'étonne d'ailleurs de la date de la visite, placée entre les élections fédérales et l'élection au Conseil fédéral, un moment pas optimal pour aborder les dossiers de politique étrangère et européenne. «On a l'impression d'un manque d'anticipation concernant cette visite, qui ressemble plutôt à un voyage pour honorer Alain Berset», estime le professeur.
Bonnes relations personnelles
Pour Alain Berset, qui quittera le Conseil fédéral à la fin de l'année, la visite d'Emmanuel Macron représentera sans doute le point d'orgue de son activité de conseiller fédéral. En 2023, les deux chefs d'Etat se sont notamment rencontrés en mai à l'occasion du couronnement du roi Charles III à Londres et lors de différents sommets à Reykjavik, Chisinau et Paris. Ils se sont encore vus jeudi et vendredi dans la capitale française.
Les précédentes visites officielles de présidents français remontaient à François Hollande en 2015, Jacques Chirac en 1998, François Mitterrand en 1983, et... Armand Fallières en 1910.