Chambre basseMieux contrôler le commerce des biens utilisés pour la torture
vf, ats
13.6.2024 - 10:03
La Suisse doit se doter d'une loi sur le contrôle des biens pouvant être utilisés pour la peine de mort ou la torture. Le Conseil national a adopté jeudi un projet du Conseil fédéral qui met en œuvre une recommandation du Conseil de l’Europe. L’UDC s'y est opposée.
Keystone-SDA, vf, ats
13.06.2024, 10:03
ATS
Aujourd'hui, la Suisse réglemente déjà l'utilisation de certains médicaments pouvant être utilisés lors de l'exécution de condamnés dans certains pays étrangers. La nouvelle loi est plus complète et porte sur le commerce de tous les biens susceptibles d'être concernés.
A l'échelle mondiale, le commerce de biens destinés à la torture est florissant, a rappelé Raphaël Mahaim (Vert-e-s/VD) au nom de la commission. «La Suisse ne doit pas devenir un îlot pour ce commerce», a déclaré Vincent Maitre (Centre/GE). Cette loi n'aura pas de conséquences pour la police, a précisé Patrick Hässig (PVL/ZH).
Réputation de la Suisse en jeu
«En n'adoptant pas cette loi, la Suisse risquerait de voir sa réputation ternie. Elle risquerait surtout d'être perçue comme un pays de contournement dans un domaine économique pourtant peu important pour elle», a complété le chef du Département fédéral de l'Economie, Guy Parmelin.
L'UDC était contre. La Suisse dispose déjà de toutes les bases légales nécessaires pour remplir les règles européennes, que ce soit pour les médicaments ou les armes, a contré Manfred Bühler (UDC/BE). Sa proposition de ne pas entrer en matière sur le projet n'a pas convaincu au-delà de son groupe.
Trois catégories de biens
Le projet règle le commerce des biens susceptibles d’être utilisés en vue d’infliger la peine capitale, la torture ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. La loi s'appuie sur le règlement anti-torture de l'UE.
La loi établit trois catégories. Il y a les biens utilisés à titre primaire pour la torture (potence, chaises électriques, etc.), dont le commerce est généralement interdit, ensuite les biens utilisés à titre secondaire, qui ont d'autres utilisations pratiques (dispositif d'immobilisation, gaz lacrymogène, armes anti-émeute...), et les médicaments susceptibles d'être utilisés pour infliger la peine capitale.
L'importation, le transit et l'exportation de biens utilisés à titre primaire seront interdits, de même que toute assistance technique. Pour la deuxième catégorie, l'exportation, le courtage ainsi que la fourniture d'une assistance technique pour des biens ayant d'autres utilisations pratiques que celle d'infliger la torture ou d'autres traitements cruels seront soumis à autorisation.
Les dispositions de la loi concernant les médicaments susceptibles d'être utilisés pour infliger la peine de mort seront transférées dans la nouvelle loi. En plus de l'exportation, le courtage et la fourniture d'une assistance technique pour ces médicaments seront aussi soumis à autorisation.
Gauche et UDC pas suivis
Le conseil a apporté une modification en matière de protection des données. Il y précise quelles données peuvent être traitées et échangées entre les autorités, et à quelles fins.
La gauche a tenté de durcir un peu plus la loi. Elle aurait voulu par exemple interdire tout financement de biens utilisés directement pour la torture. Mais cette exigence va bien au-delà de la législation européenne.
L’UDC n'a pas non plus réussi à limiter le champ d'application de la loi. Dans le cadre d'échanges d'informations avec des autorités étrangères, elle demandait entre autres des garanties contre l'espionnage économique. La proposition a été rejetée par 128 voix par 62.
Au vote sur l'ensemble, le National a soutenu ce projet par 129 voix contre 59. Le dossier passe au Conseil des Etats.