L'armée pourra acquérir de nouveaux avions de combat. Sur le fil, à 50,1%, les Suisses ont accepté dimanche l'enveloppe maximale de 6 milliards de francs pour cet achat. A l'exception du Valais, tous les cantons romands et le Jura bernois ont dit non.
Le verdict a mis du temps à tomber, les projections faisant état d'un score à 50-50 jusqu'en fin d'après-midi. Une situation inattendue, dans les sondages du début du mois, l'objet recueillait encore plus de 55% des voix.
Les cartes des votations
Pas un «chèque en blanc»
Pas question ainsi d'attendre une éventuelle initiative contre cet achat, a souligné la ministre de la défense Viola Amherd dimanche à Berne devant la presse. Heureuse du résultat, elle a assuré que l'analyse sera effectuée en toute transparence. Le choix de l'avion reviendra ensuite au gouvernement. Elle a encore relevé que les six milliards étaient un «plafond», et dans tous les cas pas un «chèque en blanc».
La gauche et les milieux antimilitaristes, qui ont lancé le référendum, ont longtemps espéré que le peuple balaierait la dépense qu'ils jugeaient luxueuse. Mais par une différence de 8670 voix, les efforts du Conseil fédéral après l'échec du Gripen en 2014 ont payé. Quelque 1,605 million de Suisses ont donné leur feu vert à l'achat et 1,597 million l'ont refusé. La participation s'est montée à près de 59%.
A l'exception du Valais, d'où est originaire la ministre de la défense Viola Amherd, tous les cantons latins ont dit «non» à l'acquisition des nouveaux avions. Comme avec le Gripen, le plus grand refus est venu du Jura avec 68,6%.
Genève vient ensuite avec 62,8% de «non», puis Neuchâtel avec 61,6%, Vaud 58,9%, Fribourg 54,3%, le Tessin 52,8%. Les Valaisans ont en revanche accepté l'arrêté par 52% des voix.
Oui en Suisse alémanique
En Suisse alémanique, seuls Bâle-Ville (63,34%) et Bâle-Campagne (50,3%) ont refusé l'enveloppe comme ils l'avaient fait lors de la votation de 2014. Berne a dit oui à 51,4%. Le Jura bernois a néanmoins voté comme la majorité des Romands en refusant à raison de 60,1%. A Zurich, les avions ont obtenu tout juste 50,3%. Ils recueillent près de 57% en Argovie.
La palme du «oui» revient à Nidwald avec 65,7%, suivi de Schwyz (62,7) et d'Obwald (62,3%). St-Gall acquiesce du bout des lèvres (50,7%), Schaffhouse réalise 51,2%.
La somme maximale de 6 milliards doit permettre d'acheter les avions de combat qui remplaceront les 26 F-5 Tiger et les 30 F/A-18 de l'armée. Le financement proviendra du budget ordinaire de l'armée, qui devrait augmenter de 1,4% par an ces prochaines années.
Début du combat pour le GSsA
Le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA), qui a lancé le référendum avec le PS et les Verts, se dit déjà prêt à lancer une initiative contre un type concret d'avion de combat. Selon les antimilitaristes, c'est le début du combat dimanche et non la fin.
Pour Roger Nordmann, le chef du groupe socialiste aux Chambres fédérales, même avec ce oui, «il est exclu d'acheter les F-35 américains, qui sont les plus chers», a-t-il dit à la RTS. Les Verts se montreront également vigilants, a promis Fabien Fivaz (Verts/NE).
Du côté du camp du «oui», qui rassemble des membres du PLR, de l'UDC, du PDC, du PBD, des Vert'libéraux, du PEV et de nombreuses organisations militaires, «ce vote est à prendre avec reconnaissance», a déclaré la conseillère nationale Jacqueline de Quattro (PLR/VD), en référence à la situation économique fragile résultant de la pandémie.
Ce oui aux avions est réjouissant pour la Suisse romande, a-t-elle ajouté. La région bénéficiera d'un milliard de francs d'affaires compensatoires, «une bouffée d'oxygène bienvenue».
SSO: Un oui tout de même
La longue attente du résultat dimanche et le score serré ont un goût «amer» pour Gianni Bernasconi, vice-président de la Société suisse des officiers. Soulagé, il relève que le «oui signifie une sécurité aérienne pour la population; cela n'est pas seulement un signal fort pour l'armée». Même s'il s'agit d'un oui du bout des lèvres, «c'est un oui tout de même».
Ce dimanche de votation a été qualifié de «surprenant» par le nouveau président de l'UDC, le Tessinois Marco Chiesa. «Sans avion de combat on ne pourrait pas défendre notre espace aérien, ni mettre toutes les pièces du puzzle ensemble. Cela aurait voulu dire que l'on perdait de notre souveraineté.»
Les présidents du PLR et du PDC estiment que l'engagement de Viola Amherd a joué un rôle crucial dans l'issue positive de ce scrutin. Ils demandent toutefois que le Conseil fédéral tienne compte du vote serré des Suisses en ne dépensant pas obligatoirement le total des 6 milliards de francs.
Mesures en faveur de l'industrie
L'arrêté accepté par le peuple inclut des conditions visant à renforcer l'industrie helvétique, ce que saluent l'usam et swissmem. Le constructeur qui remportera l’appel d’offres devra investir 60% du montant du contrat dans l’économie suisse (65% en Suisse alémanique, 30% en Suisse romande et 5% en Suisse italienne). L’achat sera coordonné avec la modernisation du système de défense sol-air.
Quatre jets sont en lice: le Rafale du français Dassault, l'Eurofighter de l'européen Airbus et les deux avions américains, le Super Hornet de Boeing et le F-35A de Lockheed-Martin.
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