Non-brassage des eaux profondes Rendement de pêche en baisse dans le Léman

zd, ats

13.10.2022 - 14:09

Avec 502 tonnes de poissons capturés, le rendement global de la pêche dans le Léman a subi une baisse de 8% par rapport à 2020 et de plus de la moitié par rapport à 2015. En cause, la diminution du stock des féras en lien avec divers facteurs environnementaux notamment le non-brassage des eaux profondes en hiver

La pêche professionnelle sur le lac Léman, avec ses 130 pêcheurs, représente toutes espèces confondues la plus grande part des captures annuelles (88,2%) avec un peu plus de 463 tonnes de poissons pêchées (archives).
La pêche professionnelle sur le lac Léman, avec ses 130 pêcheurs, représente toutes espèces confondues la plus grande part des captures annuelles (88,2%) avec un peu plus de 463 tonnes de poissons pêchées (archives).
Keystone/VALENTIN FLAURAUD

Keystone-SDA, zd, ats

«Depuis 2015, nous constatons une décroissance de la population de corégones, communément appelé 'féras' liée à une mauvaise reproduction», explique jeudi à Keystone-ATS Yvon Crettenand, biologiste, au Service valaisan de la chasse, de la pêche et de la faune. Les cohortes d'ombles-chevalier et de truites – deux autres poissons de la famille des salmonidés – sont également touchées par le phénomène, quoique de manière moindre et différenciée quant aux causes.

L’oxygénation des eaux profondes ne se fait plus

Plusieurs facteurs défavorables et parfois cumulés expliquent cette baisse. Les hivers n'étant plus assez rudes, l'oxygénation des eaux profondes ne se fait plus et certains oeufs des salmonidés n'éclosent jamais, avance le scientifique.

La moule quagga, organisme exotique sans prédateurs qui se développe dans le fond du lac, a aussi sa part de responsabilité. «En filtrant l’eau, ce néozone indésirable retient le phosphore. Il influe négativement sur la croissance, la quantité et la qualité des phytoplanctons et de facto du zooplancton, base de la nourriture des poissons»

En terme de chiffres, les captures d’ombles-chevalier et de truites restent plus ou moins stables sur les trois dernières années: 13 tonnes d’ombles (12 en 2020 et 17 en 2019) et 6 tonnes de truites ont été capturées en 2021 (8 en 2020 et 7 en 2019), indique jeudi dans un communiqué la Commission internationale de la pêche dans le Léman.

Quant au féra: il y a eu 195 tonnes de corégone pêchées en 2021 contre 203 tonnes en 2020. En 2015, année record, on parlait alors de 1145 tonnes.

Résultats d'ici trois ans

Face à ce constat, des mesures de protection ou de restriction de pêche sont entrées en vigueur en 2022, à la demande des pêcheurs professionnels et de loisir des deux pays bordant le Léman. Elles ont été reconduites pour 2023.

Ces mesures visent à préserver les géniteurs de corégones, mais aussi ceux des ombles chevaliers et de truites lacustres avant leurs périodes de reproduction, en réduisant de deux semaines la pêche de ces trois salmonidés emblématiques du bassin lémanique. La mesure légale de capture des corégones a aussi été fixée à 37 centimètres pour la pêche professionnelle en lieu et place des 30 centimètres réglementaires.

Ces mesures font suite à l'entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2021, d'un nouveau règlement d'application de l'Accord entre le Conseil fédéral et le gouvernement français sur la pêche dans le Léman pour la période 2021-2025 en vue «d'assurer une exploitation durable et équilibrée des peuplements piscicoles du lac», selon la Commission internationale de la pêche dans le Léman. «Les résultats de ces mesures de gestion halieutique seront visibles d'ici trois ans seulement. En parallèle, une étude scientifique sur cette espèce est en cours», précise Yvon Crettenand.

La perche toujours championne

La perche reste le poisson le plus capturé en 2021, comme les années précédentes avec 241 tonnes (253 tonnes en 2020). Concernant les autres espèces, les captures de brochets continuent de diminuer avec 21 tonnes en 2021, contre 29 en 2020 et 39 en 2019.

Et la pêche des écrevisses signal (espèce exotique envahissante) est passée de 17 tonnes en 2018 à 3 tonnes en 2021. Difficile de dire toutefois si la population de cette espèce exotique envahissante est en baisse ou si les pêcheurs s'en sont partiellement détournés, relève Yvon Crettenand.

Le nombre de permis de pêche de loisir délivrés par les autorités suisses et françaises est resté stable à près de 6200, attestant de «l'intérêt de la population» pour cette activité. Mais c'est la pêche professionnelle, avec ses 129 pêcheurs, qui représente, toutes espèces confondues, la plus grande part des captures annuelles (90%) avec près de 450 tonnes de poissons pêchés.