Euro 2021 Martin Kallen : "Je ne pense pas que ce soit un non-sens"

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8.6.2021 - 10:06

Keystone-SDA, stw, ats

Martin Kallen est pour la cinquième fois le directeur du tournoi final de l'Euro. Le Bernois évoque dans un entretien à Keystone-ATS les problèmes qui doivent encore être résolus avant le coup d'envoi et explique pourquoi un Championnat d'Europe organisé dans onze pays différents constitue un avantage en cette période de pandémie.

Kallen estime qu'un Championnat d'Europe organisé dans onze pays différents est  un avantage.
Kallen estime qu'un Championnat d'Europe organisé dans onze pays différents est  un avantage.
Keystone

- M. Kallen, vous avez déclaré il y a quelques mois dans une interview: «J'aime avoir des problèmes». Vous devez avoir l'impression d'être au paradis en ce moment...

«Ce n'est pas tout à fait faux. J'aime les contextes difficiles. Cependant, pour le moment, nous n'avons plus de problème vraiment important. Plutôt quelques petites difficultés.»

- Quelles sont-elles ?

«En ce moment, par exemple, les supporters de Croatie et de République tchèque ne peuvent pas entrer en Angleterre sans être mis en quarantaine. Cela signifie qu'ils ne peuvent pas assister aux matches de leur équipe dans le tour préliminaire. Par ailleurs, nous discutons actuellement avec le gouvernement allemand des conditions d'entrée pour les voyageurs en provenance d'Angleterre. Cela pourrait devenir un problème si une équipe a joué à Londres et doit ensuite se rendre à Munich pour les quarts de finale (réd: la Suisse sera concernée si elle gagne son groupe). Pour l'instant, la législation ne le permet pas en Allemagne, à moins de se mettre en quarantaine.»

- Alors un tel match ne pourrait pas avoir lieu à Munich ?

«Attendons. Le gouvernement allemand nous a présenté une solution. Nous ne l'avons pas encore concrètement sur la table. Mais une chose est claire: notre objectif doit être qu'aucune quarantaine ne soit imposée. Avec des tests négatifs, cela devrait être possible.»

- Que se passe-t-il si un joueur est contrôlé positif ?

«Le protocole de retour au jeu sera en vigueur, ce qui a déjà été le cas pendant toute la saison. Le joueur concerné est mis en isolement, les autres sont testés et s'ils sont négatifs, ils peuvent continuer à s'entraîner dans leur bulle. Seuls des joueurs testés négatifs se retrouvent sur le terrain. Ce n'est différent qu'en Écosse. Là-bas, selon la réglementation locale, toute l'équipe devrait être mise en quarantaine en cas de cas positif. C'est pourquoi la Croatie et la République tchèque ont également renoncé à organiser leur camp d'entraînement en Ecosse.»

- Onze sites, onze pays, différentes réglementations d'entrée et de quarantaine. La situation reste fragile. Comprenez-vous les personnes qui disent qu'un championnat d'Europe comme celui-là, c'est une mauvaise idée dans une telle période?

«Je ne pense pas que ce soit un non-sens. La situation présente également des avantages avec onze sites dans onze pays. Un plus grand nombre de supporters peuvent voir jouer leur équipe sans avoir à se déplacer à l'étranger. De même, il y aura moins de supporters étrangers dans les stades. Normalement, ils représentent 35%, mais aujourd'hui, ils sont beaucoup moins nombreux. Par exemple, seuls 300 supporters suisses se rendront à Bakou. A Rome, il y en aura environ 1500. Cela facilite également la tâche des autorités locales. Et si nous rencontrons soudainement des problèmes dans un ou deux pays, nous avons de nombreuses alternatives.»

- L'UEFA est devenue experte en la matière. L'année dernière, les finales des Coupes européennes ont été organisées au pied levé, cette année la finale de la Ligue des champions a été déplacée d'Istanbul à Porto...

«En fin de compte, c'est une question de bonne planification. Si ça se joue sur des détails, vous pouvez encore y arriver en jonglant et en dribblant au dernier moment. Nous avons toujours – même sans coronavirus – un plan A, un plan B, un plan C et même un plan D. Normalement, il ne faut que le plan A. En ce qui concerne le championnat d'Europe, nous avions aussi besoin du plan B et nous avons même repris certains aspects du plan C. C'était pareil pour la finale de la Ligue des champions. A Istanbul, tout était plus ou moins prêt. Nous avions déjà plus de 100 personnes sur place. Ensuite, à Porto, nous avons dû repartir quasiment de zéro. Mais parce que nous avions sérieusement examiné les scénarios au préalable, nous avons été en mesure de nous en sortir.»

- A quoi ressemblerait un changement de programme de dernière minute pour l'Euro ? Imaginons que le match entre l'Italie et la Suisse ne puisse pas avoir lieu à Rome à l'heure prévue...

«Si un match doit être reporté mais peut avoir lieu dans le même stade, le coup d'envoi sera donné le lendemain à 12h00 ou à 15h00. Simplement avant les autres matches prévus au calendrier. Si nous devons le déplacer dans un autre lieu, il sera joué là où il n'y a pas d'autre match le lendemain ou le surlendemain, simplement sans spectateur. Et en principe, nous aurions même la possibilité de nous installer dans un stade qui ne fait pas partie des onze stades du championnat d'Europe.»

- Tout cela risque de coûter beaucoup d'argent à l'UEFA...

«Nous nous attendons à perdre plusieurs centaines de millions de francs de recettes. En ce qui concerne la billetterie, nous en sommes à environ 42 % des recettes calculées avant la pandémie. Nous avons aussi beaucoup de frais supplémentaires, par exemple à cause du report des matches de Bilbao à Séville. Ou à cause de l'annulation des camps d'entraînement. Ou à cause de fan zones qui ne se concrétisent pas mais qui entraînent des coûts pour les fournisseurs que nous devons payer. Mais nous nous sommes très bien débrouillés, et je suis fier de ce que nous avons accompli. Dans ce domaine, vous pouvez effacer quelques centaines de millions supplémentaires si vous ne travaillez pas rapidement et précisément sur les milliers de contrats qui sont sur la table.»

- L'UEFA doit-elle même s'inquiéter de perdre de l'argent au final ?

«Non, parce que nous ne pouvions pas nous le permettre. L'UEFA utilise les recettes pour financer l'ensemble de l'administration et soutenir les associations. Il y aura toujours un bon résultat pour nous, aussi parce que nous avons des revenus de télévision et de sponsoring très importants. Ils représentent 75 % des recettes et nous ne sommes pas loin de ce chiffre.»

- Et comment vivrez-vous l'Euro en tant que directeur du tournoi ?

«Je serai sur la route la plupart du temps, avec le secrétaire général. Je vais visiter toutes les villes et voir chaque équipe au moins une fois. Cela représente environ 25 à 30 matches. Et je serai également présent lors du troisième match de groupe de la Suisse contre la Turquie à Bakou. J'y mettrai un point d'honneur !»