Les joueuses de l'équipe de Suisse utilisent le cycle menstruel à leur avantage. Cela permet de lutter contre les douleurs et les blessures, comme le montre un entretien avec l'attaquante Meriame Terchoun et l'experte de l'ASF Mélanie Pauli.
Meriame Terchoun a commencé à avoir ses règles avant le match de Coupe du monde de vendredi face aux Philippines. C'était pénible, a-t-elle décrit deux jours plus tard devant les médias à Dunedin. Selon elle, il est particulièrement important de maîtriser les symptômes lors d'un tel match. C'était le cas pour elle.
Les joueuses de l'équipe nationale intègrent ainsi le cycle menstruel dans leur planning d'entraînement depuis près d'un an. «Je ne prends pas de contraceptif et je ressens donc le cycle plus intensément», explique Meriame Terchoun en citant un exemple: auparavant, elle souffrait à chaque fois de migraine avant ses règles, mais elle a commencé à s'intéresser au cycle et à l'entraînement après sa troisième blessure aux ligaments croisés.
La joueuse de Dijon a été soutenue par Mélanie Pauli et par l'ASF. Depuis 2019, Mélanie Pauli est responsable de la formation athlétique et de la prévention des blessures au sein de l'ASF pour le secteur féminin. Elle porte son attention sur l'entraînement axé sur le cycle, et a conseillé à Terchoun de boire moins de café ou de manger des noix pendant la période prémenstruelle. Les anti-inflammatoires naturels ont fait leur effet. «Depuis, je suis en bonne santé, en forme et rarement blessée», déclare l'attaquante.
Réduire les ruptures du ligament croisé
Lorsque Mélanie Pauli a commencé son travail à l'ASF, elle a rapidement été confrontée à des blessures au ligament croisé. Une blessure typique des footballeuses, dont cette coach d'athlétisme a voulu connaître l'origine. Le cycle s'est vite imposé comme le principal «coupable». Beaucoup de choses ont alors pris sens, souligne Pauli en claquant des doigts. Elle avait elle-même pratiqué un sport de haut niveau. Mais «je n'aurais jamais fait le lien entre mon cycle et mes performances ou mes blessures», dit-elle.
Pour les footballeuses, la prise de conscience n'a pas été si tardive. En septembre 2022, Mélanie Pauli a commencé à enregistrer systématiquement le cycle et les symptômes – positifs ou négatifs – au sein de l'équipe A. En se basant sur des données individuelles et des preuves scientifiques, elle a créé une stratégie pour «réduire les blessures», comme elle le dit. Pour elle, le terme de prévention n'est pas approprié. «Il y aura toujours des blessures», souligne-t-elle.
Mélanie Pauli parle également d'un entraînement «orienté vers le cycle». Selon elle, une préparation entièrement guidée par le cycle n'est possible que pour les sportives individuelles – et non pour une équipe. Le flux hormonal constitue la base. «Le cycle est un outil de surveillance naturel, un appareil de navigation», explique-t-elle. Avec les hormones comme guide, les joueuses font attention à trois choses: alimentation, régénération et activation.
Quatre phases
Le cycle se divise en quatre phases en ce qui concerne la gestion de l'équipe nationale. La première phase commence avec le début des menstruations. Après les règles démarre la phase 2. Entre celle-ci et la phase 3 a lieu l'ovulation. C'est pendant cette période que le corps est le plus performant. «Nous sommes alors toutes en pleine forme», explique Meriame Terchoun.
Mais les tendons ont alors besoin de plus de stabilité. Mélanie Pauli compare le travail sur la «chaîne postérieure», des fesses aux mollets, à un brossage de dents. C'est nécessaire, même si certaines n'aiment pas le faire. La force pendant la phase d'ovulation doit être utilisée de manière ciblée. Les tendons et les ligaments sont alors armés contre les coups, et les blessures sont évitées.
La quatrième phase est la période prémenstruelle. Dans les jours qui précèdent et pendant les règles, Meriame Terchoun s'entraîne ainsi plus calmement. «Cela ne veut pas dire que nous ne faisons rien du tout», souligne-t-elle. Mais il se peut qu'elle renonce parfois à une séance dans la salle de musculation.
Au lieu de la stabilité, il faut de la mobilité. Les mouvements semblent plus «collés», dit l'attaquante en touchant sa hanche. Avec le travail préparatoire, il est finalement possible de fournir la performance nécessaire pendant 90 minutes lors de la phase 4. «Tu peux être performante dans n'importe quelle phase», souligne Pauli. Mais les joueuses doivent savoir dans quelle phase elles se trouvent.
Briser un tabou
Les joueuses suivent leur cycle avec une application. Le staff est également informé. Dans son club de Dijon, Terchoun a également insisté sur une plus grande prise en compte de l'équilibre hormonal. «Le staff est entièrement composé d'hommes. Il faut donc plus d'échanges, d'explications et de compréhension», dit-elle.
La pandémie de Covid-19 aura donné un coup de pouce à cette thématique. Il y a cinq ans, les joueuses n'étaient pas encore conseillées en conséquence, explique Mélanie Pauli. Même dans les ligues inférieures, une chose est importante pour elle: «Le tabou doit disparaître».
A tous les niveaux, il doit être normal de parler du cycle menstruel avec le ou la coach. Pour Meriame Terchoun, le cycle fait désormais naturellement partie de l'entraînement. Une bonne perception de son propre corps fait partie du sport de haut niveau. Et le corps est contrôlé par les hormones.