Entretien avec Sébastien Buemi «Je suis un peu en dehors de ma zone de confort»

Léo Martinetti

12.1.2023

Samedi à Mexico, le pilote vaudois prendra part à sa neuvième saison de Formule E. A cette occasion, le champion du monde 2016 a répondu aux questions de blue News.

Sébastien Buemi : formule gagnante

Sébastien Buemi : formule gagnante

Samedi à Mexico, le pilote Vaudois prendra part à sa neuvième saison de Formule E. A cette occasion, le champion du monde 2016 a répondu aux questions de blue News.

12.01.2023

Léo Martinetti

Mexico accueille samedi la manche initiale du championnat 2023 de Formule E. Dans la capitale mexicaine, Sébastien Buemi disputera sa première course sous ses nouvelles couleurs, celles de l’écurie Envision Racing qu’il a rejoint après huit saisons passées chez Nissan e-dams. Présent depuis la création de cette compétition de monoplaces électriques, le Vaudois, vainqueur de 13 courses dans la discipline, n’avait donc connu qu’une seule formation jusqu’à présent.

Les raisons de ce changement d’écurie sont claires pour le champion du monde 2016 : «[…] on ne mettait pas assez de moyens et on a dégringolé.» La faute également au règlement qui figeait les améliorations. Conséquence de cela, le Suisse n’a pas pu faire mieux que 15e du classement général en 2022 et 21e en 2021. «Malheureusement, on a su très tôt que ça allait être très compliqué», reconnait le pilote de 34 ans avant d’ajouter, «[…] c’est sûr que mon but n’était pas de rester dans cette situation, je veux pouvoir me battre aux avant-postes».

«L’objectif pour moi est de faire le maximum et le mieux possible avec ce que j’ai comme matériel»

Sébastien Buemi

Pilote de Formule E

Suite à son arrivée dans l’écurie Envision Racing, le Vaudois a vécu une préparation différente de celles qu’il a connues lors des huit saisons précédentes. «C’est sûr que je suis un peu en dehors de ma zone de confort», admet Sébastien Buemi, «c’est toujours difficile de se réadapter à de nouvelles personnes, à de nouvelles manières de travailler. Par contre, c’est une équipe qui a toujours été très compétitive par le passé».

Autre nouveauté de cet exercice 2023, l’arrivée de monoplaces de troisième génération. Des bolides censés être plus rapides, plus compactes et plus performants. Un changement majeur qui va certainement rebattre les cartes comme cela a pu se voir lors des essais hivernaux de Valence. «Je pense qu’au début de la saison, la fiabilité sera extrêmement importante parce que c’est ça qui apportera de gros résultats. Petit à petit, au fil de la saison, quand la voiture sera plus fiable, on verra vraiment qui est au-dessus du lot en termes de compétitivité. L’objectif pour moi est de faire le maximum et le mieux possible avec ce que j’ai comme matériel», estime Sébastien Buemi.

Du sprint à l’endurance

En plus de celui de Formule E, Sébastien Buemi participera également au Championnat du monde 2023 d'endurance qu’il a remporté à trois reprises dont la dernière fois en 2022. Une discipline qui plaît énormément au Vaudois : «Je dirais qu’humainement, c’est une super expérience de partager la voiture avec deux coéquipiers, de faire les 24 Heures du Mans, de faire tout le Championnat du monde d’endurance. Dès l’année prochaine, il y aura de gros concurrents avec Porsche, Ferrari, Peugeot, Cadillac. C’est sûr que ça va être très difficile, mais maintenant je pense que ça va être une période en or pour l’endurance avec tous ces constructeurs qui arrivent.»

Outre ses couronnes mondiales en endurance, Sébastien Buemi est également quadruple vainqueur et tenant du titre de la mythique course des 24 Heures du Mans. Un exploit que le Vaudois a encore de la peine à réaliser : «[…] je vais d’une année à l’autre, j’essaie de me battre aux avant-postes, de me créer des opportunités, de me battre pour la victoire et j’estime que le jour où j’arrêterai, j’aurai le temps d’y penser. Pour le moment c’est dur à réaliser, mais c’est plutôt sympa comme sentiment.»

Cerise sur le gâteau, Sébastien Buemi peut combiner ces deux activités sans collision de dates. De plus, contrairement à ce que nous pouvons penser, la Formule E et l’endurance sont complémentaires. «Ça me permet de ne pas trop avoir l’esprit endurance en se disant qu’on a le temps, qu’on ne va pas prendre de risque, mais d’un autre côté, avoir ce côté sprint», explique le Suisse, avant d’ajouter, «et en Formule E, d’avoir aussi ce côté endurance en se disant que la course, même si elle est courte, c’est quand même 45 minutes, il faut garder la mécanique, les pneus jusqu’au bout».

La polyvalence de celui qui est encore pilote d’essais en Formule 1 est reconnue dans le monde du sport automobile. Différentes casquettes qu’il apprécie porter : «C’est sûr que j’ai envie de maximiser ma période où je roule parce que c’est vrai que les années passent quand même et je suis content de pouvoir rouler un maximum. Je fais ce que j’aime, j’ai la chance de pouvoir vivre de ma passion donc automatiquement j’en suis conscient et j’essaie d’optimiser tout cela.» 

La F1 comme locomotive pour sortir de l’ombre

Alors que la Formule 1 a connu un net regain d’intérêt ces dernières années, notamment grâce à la série Drive to Survive diffusée sur Netflix, Sébastien Buemi estime que cela ne péjore pas la popularité de la Formule E : «C’est certain que la F1 reste la catégorie numéro une dans le sport automobile. Après pour moi, c’est important que la F1 se porte bien parce que c’est bien pour le sport en général.» 

Si la Formule 1 se porte bien, le chemin qui mène à la catégorie reine n’est pas facile pour les pilotes helvétiques. «C’est peut-être un petit peu dommage que la Fédération ou le pays [la Suisse] ne soutiennent pas plus que ça les jeunes pilotes. C’est vrai que je trouve décevant par moment qu’aujourd’hui, peut être au moment où j’en ai le moins besoin, j’ai beaucoup de gens qui me contactent, de potentiels partenaires, sponsors», témoigne l’ancien pilote de la Scuderia Toro Rosso.  

Un manque de soutien qui peut aussi être lié à la visibilité qui est accordée aux sports mécaniques dans les médias helvétiques. «Honnêtement, je n’en ai pas forcément besoin», admet le Vaudois, «c’est juste que vous avez d’autres pays qui en parleront énormément si un jour un pilote venait à gagner les 24 Heures du Mans et c’est vrai qu’en Suisse on n’a aucune retombée là-dessus. Après, vous avez un petit tournoi de tennis, alors là, bien entendu, on va en parler énormément».

S’il ne remet pas en question l’importance des succès d’autres sportifs Suisses, Sébastien Buemi espère «juste que la mentalité évoluera un petit peu pour essayer d’aider, de promouvoir le sport et les pilotes. On a de supers écoles que ça soit pour le foot, le tennis ou le ski, c’est dommage que l’on n’ait pas plus d’aides pour le sport auto».