2020 s'est achevé sans jouer pour la Suisse. Le match contre l'Ukraine annulé, l'équipe nationale n'a pas eu l'occasion d'embellir une année sans victoire. Mais elle part avec quelques promesses.
A l'heure du bilan, Vladimir Petkovic aurait sûrement préféré inclure la rencontre contre l'Ukraine. Histoire au moins de considérer le sort de l'équipe de Suisse dans cette Ligue des nations. Maintien en Ligue A ou relégation en Ligue B ? Ce sera à l'UEFA de le décider, en coulisses. 2020 est de toute façon suffisamment particulière pour consacrer l'adaptation.
L'Euro n'a pas eu lieu, mais avec cet enchaînement de sept matches en trois mois, la Suisse en sait un peu plus sur elle. Sur ses carences, mais aussi sur ses espoirs.
Des résultats indignes
Il faut probablement aborder le sujet fâcheux d'emblée, afin de pouvoir l'évacuer le plus rapidement possible. Il est concret et il ne peut pas être occulté: trois matches nuls et quatre défaites. Et donc aucune victoire. L'équipe de Suisse n'avait pas connu un bilan comptable aussi désastreux depuis 1998, avec Gilbert Gress à sa tête. Autre époque. Autres exigences aussi.
«Ce match contre l'Ukraine nous aurait donné l'occasion de corriger un résultat négatif», estimait Pierluigi Tami mardi soir. Le directeur des équipes nationales ne peut pas se cacher. Il faut assumer et considérer que ce n'est pas suffisant.
«Mais cette campagne a aussi amené beaucoup de réponses, qui ne sont pas toutes positives bien sûr, tempère le Tessinois. Nous avons joué contre des équipes très fortes sur la scène internationale.» C'est à mettre au compte de la Suisse. L'Espagne, l'Allemagne, l'Ukraine, la Croatie et la Belgique font partie du haut du panier. A titre de comparaison, en 1998, l'équipe nationale avait joué l'Angleterre, l'Irlande du Nord, la Yougoslavie, l'Italie, le Danemark et la Hongrie. En football, les résultats ne disent pas tout non plus.
Une ambition nouvelle
«Du point de vue footballistique, la Suisse a montré qu'elle était en train de faire du chemin», estime Tami. Autrement dit, et cela est à mettre au crédit de Vladimir Petkovic, jamais dans son histoire l'équipe nationale n'avait semblé aussi ambitieuse dans le jeu.
Le sélectionneur, repris en écho par ses joueurs, a passé son automne à clamer qu'il voulait «affirmer notre style», qu'importe l'adversaire en face. Il y a des principes très clairs, moins stéréotypés que par le passé et adaptés aux joueurs en présence: ce pressing très haut, qui a mis en difficulté aussi bien l'Espagne que l'Allemagne, cette volonté constante de ressortir depuis l'arrière, quitte à prendre des risques parfois inconsidérés.
Cela a coûté cher, avec plusieurs erreurs qui ont compromis un résultat. «On a vu nos défauts et ça ne suffit pas encore, car les résultats sont là pour le démontrer, juge Tami. Mais le développement de cette équipe m'inspire de la confiance, je suis optimiste. J'espère ne pas me tromper. Et puis, notamment samedi contre l'Espagne, il y a eu quelque chose de nouveau, avec une équipe qui a su souffrir et montrer d'autres qualités.»
Il y a le sentiment que la Suisse devient plus complète. Le travail de Petkovic a même été loué par plusieurs sélectionneurs étrangers (Roberto Martinez ou Luis Enrique). Mais avec une interrogation: la Suisse peut-elle briser son plafond de verre et continuer d'appliquer ce style dans des matchs couperets, sans en sortir déçue ? 2021, avec dès le mois de mars les qualifications pour la Coupe du monde 2022 (la Suisse, dans le pot 2, connaîtra ses adversaires le 7 décembre) et surtout l'Euro, donnera des réponses.
Les joueurs: en file derrière Xhaka
Individuellement, elle l'a démontré cet automne, la Suisse est un cran en-dessous d'à peu près toutes les meilleures nations et même les moins bonnes. A l'exception de Xherdan Shaqiri, intermittent à Liverpool, elle ne compte aucun joueur qui évolue dans les sept ou huit meilleures équipes d'Europe et cela se sent à l'heure de se frotter au haut niveau.
Elle est en fait très dépendante de Granit Xhaka. Le capitaine de l'équipe nationale a profité de cet enchaînement de matchs pour affirmer son rôle capital. Comme si son statut de maillon indispensable, d'élément-clé de cette équipe était enfin reconnu. Ses sorties en amical contre la Croatie et la Belgique ont coïncidé avec les pertes de repère de la Suisse. Les matchs à huis clos ont aussi mis en exergue l'emprise qu'il a sur le jeu: il dirige aussi bien la phase offensive qu'il organise le jeu sans ballon.
Yann Sommer, bien que critiqué et pas toujours irréprochable, est au moins aussi intouchable. Ses deux pénalties stoppés devant Sergio Ramos lui ont rendu sa crédibilité aux yeux du public. Pour Petkovic, cela n'a jamais fait de doute: son jeu au pied fait de lui un indispensable à ce poste de gardien.
Les autres cadres ont parfois laissé des impressions mitigées, mais sans mettre en doute leur place. Ricardo Rodriguez, Manuel Akanji et Nico Elvedi semblent avoir pris de l'avance en défense, de par leur sérénité qui les rend plus fiables que Fabian Schär. Même si ce dernier sera toujours choisi à un moment ou un autre. Xherdan Shaqiri, quand il revient en forme, conserve un impact certain, alors que Haris Seferovic a la confiance du sélectionneur.
Encore quelques places à prendre
Reste à trouver les bons éléments pour les accompagner: Breel Embolo a par exemple son utilité, mais Mario Gavranovic est à nouveau un candidat crédible. Remo Freuler et ses deux buts en Allemagne et contre l'Espagne a parfaitement complété Xhaka, mais l'absence de Denis Zakaria lui a offert de l'espace. Le Genevois reviendra et sera important, à l'image aussi de Kevin Mbabu.
Car c'est sûrement sur les côtés que la Suisse a le plus de questionnements: à gauche, tant Steven Zuber que Renato Steffen ne convainquent pas. A droite, Silvan Widmer est intéressant, Edimilson Fernandes a été correct contre l'Espagne, mais ont-ils le niveau international ? Il y aura quelques places à gagner en 2021.
Jordan Lotomba, par exemple, sera candidat. Devant, Andi Zeqiri aimerait bien trouver un temps de jeu à Brighton qui pourrait amener Petkovic à le prendre en considération. Même si le cadre du Mister est de plus en plus figé. Ils sont au moins une quinzaine, si ce n'est plus, à déjà avoir leur ticket pour l'Euro. Les places restantes vaudront chères.